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05 novembre 1998 - Arrêté du Gouvernement wallon relatif aux règles d'indemnisation par la Région wallonne des dommages causés par des déchets
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Le Gouvernement wallon,
Vu le décret du 27 juin 1996 relatif aux déchets, notamment l'article 44;
Vu l'avis de l'Inspection des finances, donné le 10 juin 1997;
Vu l'accord du Ministre du budget, donné le 6 octobre 1997;
Vu l'avis de la Commission des déchets;
Vu l'avis du Conseil d'Etat;
Sur la proposition du Ministre de l'Environnement, des Ressources naturelles et de l'Agriculture,
Arrête:

Art. 1er.

Aux termes du présent arrêté, on entend par:

1° décret: le décret du 27 juin 1996 relatif aux déchets;

2° Office: l'Office wallon des déchets visé à l'article 34 du décret;

3°Ministre: le Ministre qui a l'environnement dans ses attributions.

Art. 2.

§1er. Il appartient au demandeur en réparation d'établir qu'il a subi un dommage causé par des déchets.

§2. Sont réparables au sens du présent arrêté:

1° les dommages dont la première manifestation objective est constatée après l'entrée en vigueur du présent arrêté;

2° les dommages non repris au 1° dont le Gouvernement autorise la réparation par décision motivée liée à la gravité de la situation.

§3. Ne sont pas réparables au sens du présent arrêté:

1° les dommages même moraux résultant des incapacités temporaires, et les frais de toute nature qui s'y rapportent;

2° les dommages résultant des incapacités permanentes inférieures à 15%, et les frais de toute nature qui s'y rapportent;

3° les dommages résultant directement d'une chute de déchets, du heurt ou du choc dus à la présence de déchets;

4° les dommages causés à l'installation qui est la source de la pollution, ou les dommages aux biens se trouvant sur le site de celle-ci et placés sous le contrôle de l'exploitant;

5° les dommages résultant des préjudices matériels consécutifs aux études, analyses, prélèvements ou travaux réalisés par les autorités publiques dans le cadre de la politique des déchets ou de la remise en état de sites contaminés;

6° les intérêts compensatoires et moratoires.

§4. Pour être réparable au sens du présent arrêté, le dommage doit:

1° résulter de l'atteinte à un intérêt personnel et légitime;

2° être certain;

3° ne pas avoir déjà fait l'objet d'une réparation à la suite de l'intervention d'un organisme de droit public ou privé;

4° avoir été subi sur le territoire de la Région.

Le dommage est réputé avoir été subi sur le territoire de la Région lorsque la victime se trouvait sur ce territoire au moment où elle a été exposée aux effets nocifs des déchets. En cas de préjudice par répercussion, cette condition doit être vérifiée dans le chef de la victime directe.

Art. 3.

Dans l'appréciation de la preuve du lien de causalité, il est tenu compte du risque accru de provoquer le dommage inhérent à la présence de déchets dans le voisinage de la victime.

Il appartient à la personne lésée d'établir de façon vraisemblable le lien entre son établissement ou son séjour en Région wallonne et le dommage dont elle se prévaut.

Art. 4.

L'évaluation des dommages prend pour base les critères et les méthodes de réparation applicables en droit commun de la responsabilité civile.

En ce qui concerne l'étendue de la réparation, le Ministre n'est toutefois pas tenu par le principe de la réparation intégrale. Il statue en équité, compte tenu de toutes les circonstances, notamment l'ampleur et la gravité des intérêts lésés, les dangers qu'une absence de réparation ou qu'une réparation tardive feraient courir à la sécurité publique, à la santé publique ou à l'environnement ainsi que les ressources financières des victimes.

Art. 5.

Le montant de l'indemnité attribuée par le Ministre ne peut dépasser les limites suivantes:

1° un million de francs par victime pour les dommages résultant d'une atteinte à l'intégrité physique, y compris les dommages moraux;

2° six cent mille francs par victime pour les dommages résultant d'une atteinte aux biens, à l'exclusion des dommages moraux subis par répercussion.

Art. 6.

Préalablement à l'introduction de sa demande, le demandeur doit:

1° avoir porté plainte auprès des autorités compétentes;

2° avoir introduit préalablement à sa demande d'indemnisation tous les recours civils permettant d'obtenir réparation des dommages causés par des déchets, pour autant que ceux-ci présentent une chance raisonnable de succès.

Art. 7.

La demande en réparation est adressée en double exemplaire à l'Office par pli recommandé à la poste.

A peine d'irrecevabilité, la demande contient les renseignements visés aux 1° à 9° du présent alinéa:

1° l'indication des jours, mois et an;

2° les noms, prénoms, profession, domicile du demandeur et, s'il s'agit d'un préjudice par répercussion, de la victime directe;

3° la description de toutes les circonstances qui entourent la survenance des dommages et leur manifestation;

4° les éléments permettant d'identifier les éventuels responsables, et si possible:

a) leurs noms, prénoms, professions, domicile et nationalité, s'il s'agit d'une personne physique;

b) leur dénomination et siège social s'il s'agit d'une personne morale;

5° une copie de la plainte adressée aux autorités compétentes et de l'acte introductif d'instance visant à obtenir réparation de tout ou partie des dommages subis;

6° les informations et pièces justificatives nécessaires à l'établissement et à l'évaluation du dommage;

7° l'indication du montant de la réparation postulée;

8° l'indication des ressources financières du demandeur;

9° la signature du demandeur ou de son conseil.

Doivent être communiqués à l'Office si possible au moment de l'introduction de la demande, et en tout état de cause en cours de procédure ou même après la décision définitive:

1° une copie de toute décision judiciaire qui serait intervenue sur l'action publique et/ou sur l'action civile;

2° toutes les pièces justificatives du dommage dont réparation est postulée;

3° une copie des documents attestant des indemnités perçues et des demandes introduites en vue de percevoir de telles indemnités, notamment les déclarations de sinistre;

4° la liste et, dans la mesure du possible, la copie des contrats d'assurance souscrits par la victime ou par toute autre personne dont elle ou ses ayants droit seraient bénéficiaires et dont le demandeur aurait connaissance, ainsi que des contrats de travail liant la victime depuis qu'elle a subi le dommage.

La demande doit être terminée par les mots: « J'affirme sur l'honneur que la présente déclaration est sincère et complète ».

Art. 8.

§1er. Dans les huit jours de la réception de la demande, l'Office informe par pli recommandé le demandeur du caractère recevable ou non de sa demande.

Si la demande est irrecevable, l'Office indique les renseignements manquants.

Si la demande est recevable, l'Office en informe le Ministre par pli ordinaire et procède à l'instruction de la demande.

A cette fin, il peut proposer de recourir à une expertise amiable contradictoire.

Si l'Office ne s'est pas prononcé dans le délai prévu à l'alinéa 1er, la demande est considérée comme recevable.

§2. L'Office élabore un rapport écrit dans les six mois de la notification du caractère recevable de la demande. Ce rapport est accompagné d'une proposition d'indemnisation ou de refus d'indemnisation.

Passé ce délai, la proposition d'indemnisation est censée être faite au montant maximum visé à l'article 5.

§3. Le rapport et la proposition visées au §2 sont adressés par lettre recommandée simultanément au demandeur et au président de la commission visée à l'article 9 dans un délai de huit jours à dater de leur élaboration.

§4. La commission émet son avis dans les quarante-cinq jours de sa saisine conformément au §3. Le demandeur peut adresser à la commission un mémoire en réplique dans un délai de vingt jours à dater de la réception du rapport et de la proposition. S'il le souhaite, il est entendu par la commission.

§5. Dans un délai de quarante-cinq jours à dater de l'avis visé au §4, l'Office transmet une proposition motivée d'indemnisation ou de refus d'indemnisation au Ministre, ainsi que, le cas échéant, le montant de la réparation proposée. Il joint l'avis visé au §4.

Lorsque des éléments d'information complémentaire doivent être recueillis, l'Office peut, décider de proroger le délai endéans lequel il transmet la proposition visée à l'alinéa 1er sans que ce délai ne puisse excéder soixante jours.

Le Ministre notifie sa décision au demandeur et à son conseil par pli recommandé à la poste avec accusé de réception dans les trente jours qui suivent la réception de la proposition de l'Office.

Si la demande est accueillie, l'arrêté précise quels sont les chefs de préjudice que l'indemnité entend réparer et à concurrence de quels montants.

Art. 9.

Il est créé une commission d'avis en matière d'indemnisation chargée de remettre un avis sur les demandes visées à l'article 7.

Cette commission est composée de trois personnalités choisies par le Ministre en raison de leur compétence particulière en matière d'indemnisation et d'évaluation des dommages dans les domaines juridique, médical et immobilier.

Les mandats sont attribués pour une période de cinq ans à dater de la notification de l'arrêté ministériel de désignation.

Le président est désigné par le Ministre. Le secrétariat de cette commission est assuré par un membre de l'Office.

La commission arrête son règlement d'ordre intérieur qui est soumis à l'approbation du Ministre. Ce règlement précise en tout cas les modalités de convocation aux réunions, d'établissement de l'ordre du jour, d'établissement et d'approbation des procès-verbaux et autres documents émis au nom de la commission.

Art. 10.

En cas de danger pour la santé publique, la sécurité publique ou l'environnement en général, le Ministre peut imposer à la victime d'affecter tout ou partie de l'indemnité attribuée en réparation d'un dommage causé à ses biens, au financement des mesures de remise en état ou des mesures de sauvegarde qu'il prescrit relativement auxdits biens. Dans cette hypothèse, le paiement de l'indemnité peut être subordonné à la production de factures ou de devis relatifs aux mesures qui ont été prises ou qui le seront.

Art. 11.

Lorsque le Ministre a statué au fond, la victime ne peut adresser une nouvelle demande d'indemnisation à l'Office à raison des mêmes faits dommageables. Toutefois, si la victime établit l'existence d'un préjudice nouveau, inconnu au moment où la décision a été rendue et qui n'a pas été pris en considération au cours de l'instance précédente, la décision antérieure ne fait pas obstacle à une nouvelle demande pour autant que le montant de l'indemnité précédemment allouée n'ait pas atteint les limites visées à l'article 5.

Lorsqu'au moment où le Ministre statue, il existe de sérieuses raisons de croire que le préjudice subi pourrait s'aggraver dans l'avenir sans que cette aggravation soit certaine, le requérant peut demander d'acter des réserves dans la décision. Ces réserves doivent être précises et limitées. La demande tendant à faire statuer sur les réserves est recevable pendant dix ans à compter du prononcé.

Art. 12.

Le Ministre exige le remboursement total ou partiel de l'indemnité qu'il a versée à la victime ou à ses ayants droit:

1° lorsque le demandeur a commis un ou plusieurs actes frauduleux aux fins d'obtenir l'indemnité;

2° lorsque la décision du Ministre a été rendue sur la base d'affirmations ou de documents, qui s'avèrent ultérieurement falsifiés ou inexacts. Le remboursement ne peut avoir lieu que si une négligence peut être reprochée au demandeur;

3° lorsque les conditions de l'affectation de l'indemnité visée à l'article 10 du présent arrêté n'ont pas été respectées, hormis le cas de force majeure;

4° lorsque les documents visés par l'article 7, alinéa 3 du présent arrêté n'ont pas été communiqués dans un délai raisonnable. Le remboursement ne peut être réclamé que si une négligence peut être reprochée au demandeur.

Art. 13.

La demande en réparation se prescrit dans un délai de trois ans à compter de la date à laquelle le demandeur a eu connaissance, ou aurait raisonnablement dû avoir connaissance du dommage.

Aucune demande ne peut être introduite après un délai de dix ans à compter de la date à laquelle s'est produit l'événement qui a causé le dommage. Lorsque l'événement consiste en un fait continu, le délai de dix ans court à partir de la fin de ce fait. Lorsque l'événement consiste en une succession de faits ayant la même origine, le délai de dix ans court à partir du dernier de ces faits. S'agissant d'un centre d'enfouissement technique, le délai de dix ans court à partir du premier jour qui suit la fin de la période de maintenance, de surveillance et de contrôle visée par l'article 19, §5 du décret.

Art. 14.

Le Ministre de l'Environnement est chargé de l'exécution du présent arrêté.

Le Ministre-Président du Gouvernement wallon, chargé de l’Economie, du Commerce extérieur, des P.M.E., du Tourisme et du Patrimoine,

R. COLLIGNON

Le Ministre de l’Environnement, des Ressources naturelles et de l’Agriculture,

G. LUTGEN