En cause:
les recours en annulation partielle du décret de la Région wallonne du 29 mars 2018 « modifiant le Code de la démocratie locale et de la décentralisation en vue de renforcer la gouvernance et la transparence dans l'exécution des mandats publics au sein des structures locales et supra-locales et de leurs filiales », introduits par la SA « Integrale » et par la SA « Socofe ».
La Cour constitutionnelle,
composée des présidents F. Daoût et A. Alen, et des juges J.-P. Moerman, T. Merckx-Van Goey, P. Nihoul, T. Giet et J. Moerman, assistée du greffier P.-Y. Dutilleux, présidée par le président F. Daoût,
après en avoir délibéré, rend l'arrêt suivant :
I Objet du recours
a. Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 14 août 2018 et parvenue au greffe le 17 août 2018, la SA « Integrale », assistée et représentée par Me J. Bourtembourg et Me F. Belleflamme, avocats au barreau de Bruxelles, et par Me J.-P. Lacomble et Me S. Pâques, avocats au barreau de Liège, a introduit un recours en annulation du décret de la Région wallonne du 29 mars 2018 « modifiant le Code de la démocratie locale et de la décentralisation en vue de renforcer la gouvernance et la transparence dans l'exécution des mandats publics au sein des structures locales et supra-locales et de leurs filiales » et, en particulier, des articles 7 et 9, 31, 35, 38 à 41, 44, 45, 47 à 49, 51 et 52, 62, 67 à 80 et 82 de ce décret (publié au Moniteur belge du 14 mai 2018).
Par la même requête, la partie requérante demandait également la suspension des mêmes dispositions décrétales. Par l'arrêt n° 170/2018 du 29 novembre 2018, publié au Moniteur belge du 26 avril 2019, la Cour a rejeté la demande de suspension.
b. Par requête adressée à la Cour par lettre recommandée à la poste le 13 novembre 2018 et parvenue au greffe le 21 novembre 2018, la SA « Socofe », assistée et représentée par Me X. Remy, Me P. De Bock et Me N. Tulkens, avocats au barreau de Bruxelles, a introduit un recours en annulation des articles 35, 44 et 45 du même décret.
Ces affaires, inscrites sous les numéros 6999 et 7055 du rôle de la Cour, ont été jointes.
Des mémoires et mémoires en réplique ont été introduits par :
- le Gouvernement wallon, assisté et représenté par Me D. Renders et Me E. Gonthier, avocats au barreau de Bruxelles (dans les deux affaires);
- le Gouvernement flamand, assisté et représenté par Me B. Staelens, avocat au barreau de Flandre occidentale (dans les deux affaires).
Les parties requérantes ont introduit des mémoires en réponse.
Par ordonnance du 25 septembre 2019, la Cour, après avoir entendu les juges-rapporteurs P. Nihoul et T. Merckx-Van Goey, a décidé que les affaires étaient en état, qu'aucune audience ne serait tenue, à moins qu'une partie n'ait demandé, dans le délai de sept jours suivant la réception de la notification de cette ordonnance, à être entendue, et qu'en l'absence d'une telle demande, les débats seraient clos le 9 octobre 2019 et les affaires mises en délibéré.
À la suite de la demande de la partie requérante dans l'affaire n° 6999 à être entendue, la Cour, par ordonnance du 9 octobre 2019, a fixé l'audience au 6 novembre 2019.
Par ordonnance du 5 novembre 2019, la Cour, à la demande du conseil du Gouvernement wallon, a reporté les affaires à l'audience du 20 novembre 2019.
À l'audience publique du 20 novembre 2019 :
- ont comparu :
. Me J. Bourtembourg, Me F. Belleflamme et Me S. Pâques, pour la partie requérante dans l'affaire n° 6999;
. Me X. Remy et Me N. Tulkens, pour la partie requérante dans l'affaire n° 7055;
. Me M. Uyttendaele et Me A. Feyt, avocats au barreau de Bruxelles, pour le Gouvernement wallon;
. Me S. Mens, avocat au barreau de Flandre occidentale, loco Me B. Staelens pour le Gouvernement flamand;
- les juges-rapporteurs P. Nihoul et T. Merckx-Van Goey ont fait rapport;
- les avocats précités ont été entendus;
- les affaires ont été mises en continuation à l'audience du 18 décembre 2019.
À l'audience publique du 18 décembre 2019 :
- ont comparu :
. Me J. Bourtembourg et Me F. Belleflamme, et Me S. Pâques, qui comparaissait également loco Me J.-P. Lacomble, pour la partie requérante dans l'affaire n° 6999;
. Me N. Tulkens, qui comparaissait également loco Me X. Remy, pour la partie requérante dans l'affaire n° 7055;
. Me M. Uyttendaele et Me A. Feyt, pour le Gouvernement wallon;
. Me R. Van Ooteghem, avocat au barreau de Flandre occidentale, loco Me B. Staelens, pour le Gouvernement flamand;
- les avocats précités ont été entendus;
- les juges-rapporteurs P. Nihoul et T. Merckx-Van Goey ont fait rapport;
- les affaires ont été mises en délibéré.
Les dispositions de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle relatives à la procédure et à l'emploi des langues ont été appliquées.
II En droit
A Argument
Quant à la recevabilité des recours
A.1.1. La partie requérante dans l'affaire n° 6999, la SA « Integrale », expose qu'elle est une société anonyme de droit privé active dans le domaine des assurances. Elle indique qu'étant indirectement détenue à plus de 50 % par l'intercommunale « Publifin », elle doit être considérée comme une « société à participation publique locale significative » et qu'elle est par conséquent soumise à toutes les dispositions du décret de la Région wallonne du 29 mars 2018 « modifiant le Code de la démocratie locale et de la décentralisation en vue de renforcer la gouvernance et la transparence dans l'exécution des mandats publics au sein des structures locales et supra-locales et de leurs filiales » (ci-après : le décret du 29 mars 2018) qu'elle attaque. Elle fait valoir que les dispositions dont elle demande l'annulation créent toute une série de contraintes supplémentaires pour son activité, de telle sorte qu'elle estime avoir indéniablement intérêt au recours.
A.1.2. La partie requérante dans l'affaire n° 7055, la SA « Socofe », expose qu'elle est une « société à participation publique locale significative » au sens de l'article 47 du décret du 29 mars 2018. Elle estime avoir intérêt à demander l'annulation de dispositions qui lui imposent des contraintes importantes dans son fonctionnement et dans ses activités.
A.2. Le Gouvernement wallon estime que les recours en annulation sont irrecevables, pour plusieurs raisons. Il considère que les sociétés requérantes n'établissent pas que leur situation serait défavorablement affectée par les dispositions attaquées, dès lors que la circonstance que des procédures de contrôle sont établies ne permet pas de conclure automatiquement qu'une personne morale aurait intérêt à obtenir l'annulation de ces dispositions, la personne morale ayant au contraire intérêt à ce que des contrôles s'exercent sur ses décisions. En ce qui concerne les dispositions limitant les rémunérations des organes dirigeants de la société, le Gouvernement wallon estime que les seules personnes à qui elles pourraient porter préjudice sont les administrateurs et les dirigeants eux-mêmes, et non la société qui les rémunère. En ce qui concerne les dispositions imposant des obligations administratives à ces organes, le Gouvernement wallon considère qu'elles n'affectent pas la société requérante dans l'affaire n° 6999, puisqu'elles garantissent au contraire que celle-ci bénéficiera de mandataires et de dirigeants investis et que les tiers seront correctement informés. Le Gouvernement wallon en déduit que les sociétés requérantes n'ont pas intérêt à demander l'annulation des dispositions attaquées.
A.3.1. La SA « Integrale » estime que les dispositions attaquées limitent sa liberté d'action et qu'elles l'affectent donc personnellement, directement et défavorablement.
A.3.2. La SA « Socofe », partie requérante dans l'affaire n° 7055 fait valoir que les dispositions attaquées affectent directement et défavorablement son fonctionnement et sa liberté d'action.
Quant au fond
En ce qui concerne le premier moyen dans l'affaire n° 6999
A.4.1. La partie requérante prend un premier moyen de la violation des articles 4 et 5 de la Constitution et des articles 6, § 1er, VIII, 7 et 19 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, en ce que les dispositions attaquées soumettent aux contraintes qu'elles créent les sociétés à participation publique locale significative, définies comme étant les sociétés de droit belge ou les sociétés ayant un siège d'exploitation en Belgique qui ne relèvent pas d'une série de catégories de personnes morales de droit public citées et dans lesquelles certaines personnes morales de droit public soit détiennent directement ou indirectement une participation au capital supérieure à 50 %, soit désignent plus de 50 % des membres du principal organe de gestion. Elle fait valoir
que les normes de référence précitées ne permettent pas aux régions de régler l'organisation et le fonctionnement de sociétés purement privées ou de soumettre ces dernières à une autorité de tutelle au seul motif que des personnes morales de droit public locales y détiendraient une participation majoritaire. Elle considère que ce n'est pas parce qu'une personne morale de droit public estime qu'il est conforme à l'intérêt général d'intervenir, même indirectement, dans une société commerciale de droit privé que cette société deviendrait investie d'une mission de service public.
Elle ajoute qu'à supposer que les dispositions de référence citées dans le moyen permettent aux régions de régler la situation des filiales des personnes morales de droit public locales, elles ne les autorisent en tout cas pas à régler le sort desdites filiales, où que se trouve leur siège social.
Enfin, la partie requérante demande la communication de la consultation juridique qui a été donnée au Gouvernement wallon en ce qui concerne la compétence de la Région wallonne et qui a été évoquée à plusieurs reprises au cours des travaux préparatoires du décret attaqué.
A.4.2. Le Gouvernement flamand expose que l'article 47 du décret attaqué introduit, dans l'article L5111-1 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation, une définition de la « société à participation publique locale significative » qui a une incidence, entre autres, sur les articles 35 et 44 du décret attaqué. Il considère que le législateur wallon excède sa compétence territoriale en instituant l'exercice d'une tutelle administrative à l'égard de sociétés qui peuvent être établies dans une autre région que la Région wallonne ou qui peuvent être établies dans plus d'une région sans qu'un accord de coopération ait été conclu au préalable à ce sujet entre les régions. Il souligne qu'un tel accord est indispensable.
A.5. Le Gouvernement wallon considère que ce moyen est dirigé contre l'article 47 du décret attaqué, en ce qu'il définit les sociétés à participation publique locale significative. Il fait valoir que la participation majoritaire d'une personne morale de droit public locale dans une société de droit privé justifie la compétence du législateur décrétal d'adopter les dispositions attaquées, puisqu'en réalité, celles-ci ne font qu'étendre le contrôle de tutelle exercé par l'autorité publique aux actes de personnes morales contrôlées par des autorités locales décentralisées, lesquels échappaient jusque-là à tout contrôle. Il ajoute que le législateur décrétal a mis fin à la possibilité, pour des personnes morales de droit public locales soumises au contrôle de tutelle, de recourir abusivement au droit privé des sociétés pour échapper à ce contrôle. Il en déduit qu'en soumettant les sociétés à participation publique locale significative à un contrôle de tutelle, le législateur décrétal a exercé la compétence en matière de pouvoirs locaux et de tutelle sur les pouvoirs locaux qui lui est attribuée par l'article 6, § 1er, VIII, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles.
Il ajoute que le décret attaqué ne s'applique qu'aux sociétés à participation publique locale significative qui sont contrôlées par des personnes morales de droit public wallonnes, de sorte que le critère de rattachement tient de la circonstance que les autorités publiques qui contrôlent les sociétés à participation publique locale significative sont soumises au Code wallon de la démocratie locale et de la décentralisation. Il en déduit que le législateur décrétal n'a pas excédé les limites territoriales de ses compétences. Il ajoute que les mesures attaquées seraient sans effet s'il suffisait aux sociétés visées de disposer d'un siège social dans une autre région pour y échapper.
A.6. La SA « Integrale » fait valoir que l'organisation d'une tutelle administrative à l'égard de services publics décentralisés porte atteinte à la liberté d'association. Elle fait valoir que, si l'objectif du législateur décrétal consistant à éviter que le procédé de l'investissement public dans une société privée soit détourné pour échapper aux règles et contrôles de droit public est légitime, le critère retenu n'est pas adéquat et emporte des effets disproportionnés.
En ce qui concerne le deuxième moyen dans l'affaire n° 6999 et le premier moyen dans l'affaire n° 7055
A.7.1. Les parties requérantes dans les deux affaires prennent un moyen de la violation de l'article 39 de la Constitution et des articles 6, § 1er, VI, alinéa 5, 5°, et 10 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles par les articles 35, 44 et 45 du décret attaqué. Elles font valoir que ces dispositions modifient le droit commun des sociétés de manière générale, alors que l'autorité fédérale est seule compétente en matière de droit des sociétés. Elles estiment que les articles 35, 44 et 45 du décret attaqué dérogent aux articles 61, § 1er, 63, 64, 521, 522, 527 et 531 du Code des sociétés. Elles rappellent par ailleurs qu'en vertu du droit commun des sociétés, tout organe de gestion d'une société commerciale est tenu d'agir conformément à l'intérêt social, lequel ne s'identifie pas à l'intérêt général. Elles en déduisent qu'en adoptant les dispositions attaquées, le législateur décrétal a légiféré dans une matière réservée à l'autorité fédérale.
A.7.2. Les parties requérantes estiment que les conditions à remplir pour pouvoir se prévaloir de l'article 10 de la loi spéciale du 8 août 1980 ne sont pas réunies. Elles font valoir que le législateur décrétal ne démontre pas que la dérogation aux règles répartitrices de compétences est nécessaire pour exercer sa compétence matérielle, que le droit commun des sociétés ne se prête à l'évidence pas au traitement différencié induit par la distinction entre les sociétés à participation publique locale significative et les autres sociétés et qu'en l'espèce, l'empiétement sur la matière du droit des sociétés n'est pas marginal.
A.8. Le Gouvernement wallon soutient que les articles 35, 44 et 45 du décret attaqué ne dérogent pas au droit commun des sociétés. Il expose que ces dispositions ne font qu'ajouter des règles s'appliquant à certaines sociétés qui sont l'émanation des personnes morales de droit public qui les contrôlent. Il ajoute qu'en revanche, les dispositions attaquées ne dispensent aucune société privée de respecter les règles du Code des sociétés adoptées par l'autorité fédérale. Il estime que l'article 35 du décret attaqué, en ce qu'il prévoit la consultation préalable de l'intercommunale qui contrôle la société, ne déroge pas à l'article 522 du Code des sociétés, puisque ce dernier envisage la possibilité que les statuts d'une société prévoient l'obligation pour le conseil d'administration de procéder à des consultations préalables. Il considère que les articles 44 et 45 du décret attaqué ne régissent pas l'organisation des sociétés soumises au Code des sociétés, mais qu'ils précisent uniquement que l'action de certaines sociétés régies par ce Code est soumise à la tutelle.
Le Gouvernement wallon fait en outre valoir qu'à supposer que les articles 35, 44 et 45 ressortissent au droit des sociétés, il faudrait admettre que leur adoption était indispensable pour permettre au législateur wallon d'exercer ses compétences en matière de pouvoirs locaux et de tutelle. Il rappelle que les travaux de la Commission d'enquête parlementaire chargée d'examiner la transparence et le fonctionnement du groupe « Publifin » ont mis en exergue le fait que certaines intercommunales recourraient au droit des sociétés pour soustraire une part substantielle de leurs activités à tout contrôle et il indique que les dispositions attaquées visent à éviter que de telles situations se reproduisent. Il ajoute que la matière concernée se prête à un règlement différencié, dès lors que les dispositions attaquées s'appliquent aux seules sociétés qu'elles visent. Il considère enfin que l'effet des dispositions attaquées sur le droit des sociétés est marginal, puisque le nombre de sociétés qui sont contrôlées par des personnes morales de droit public wallonnes est faible par rapport au nombre global des sociétés régies par le Code des sociétés.
A.9. Le Gouvernement flamand fait valoir que le législateur décrétal dispose d'un large pouvoir d'appréciation en la matière et il en conclut que les moyens ne sont pas fondés.
A.10.1. La partie requérante dans l'affaire n° 6999 estime qu'il n'y a aucune commune mesure entre la possibilité de prévoir des consultations préalables, visées à l'article 522 du Code des sociétés, et la nécessité de requérir un avis conforme, lequel doit être compris comme une véritable autorisation. Elle maintient que le législateur décrétal a dérogé à plusieurs principes fondamentaux du droit des sociétés et, en particulier, au principe de spécialité et à celui du but de lucre, établis par l'article 1er du Code des sociétés. Elle ajoute que le Gouvernement wallon ne précise pas comment on pourrait considérer que la disposition qui prévoit la substitution des organes de la société par un commissaire du Gouvernement ne déroge pas au Code des sociétés.
Cette partie conteste que les dispositions attaquées puissent être justifiées sur la base de l'article 10 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles et elle estime que ce n'est pas parce que le nombre de sociétés auxquelles s'appliquent les dispositions attaquées est limité que l'effet de ces dispositions sur la matière du droit des sociétés ne serait que marginal.
A.10.2. La partie requérante dans l'affaire n° 7055 expose en quoi chacune des dispositions attaquées porte atteinte aux règles établies par le Code des sociétés.
Elle fait valoir que la position du Gouvernement wallon, selon laquelle les dispositions attaquées ne seraient pas contraires au droit des sociétés mais ne feraient qu'y ajouter des règles s'appliquant à certaines sociétés, est contraire aux principes de répartition des compétences dans l'État fédéral, lesquels seraient vidés de leur substance s'il était possible de les contourner en ajoutant simplement des règles touchant à la compétence d'un autre législateur. Elle estime que, lorsque le législateur décrétal adopte des règles qui affectent les conditions de validité des actes adoptés par les organes des sociétés soumises au Code des sociétés, il empiète sur la compétence fédérale en matière de droit des sociétés, même si aucune exemption au Code des sociétés n'est accordée.
Cette partie expose ensuite en quoi les conditions d'application de l'article 10 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles ne sont pas réunies en l'espèce.
En ce qui concerne le troisième moyen dans l'affaire n° 6999
A.11.1. La partie requérante prend un troisième moyen de la violation de l'article 39 de la Constitution et des articles 6, § 1er, VI, alinéa 5, 2°, et 10 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles par les articles 35, 44 et 45 du décret attaqué. Elle fait grief à ces dispositions d'instaurer des règles qui relèvent de la réglementation et du contrôle des entreprises d'assurances et d'entrer en contradiction avec la loi du 13 mars 2016 « relative au statut et au contrôle des entreprises d'assurance ou de réassurance ». Elle souligne que l'autorité fédérale est seule compétente en ce qui concerne la réglementation et le contrôle des entreprises d'assurances, ainsi que le droit de l'assurance. Elle précise que l'obligation de transmettre au conseil d'administration de l'intercommunale dont la société est une filiale, pour avis conforme, les projets de décisions relatifs aux prises ou retraits de participation dans toute personne morale est en contradiction flagrante avec l'article 133, paragraphe 2, de la directive 2009/138/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 « sur l'accès aux activités de l'assurance et de la réassurance et leur exercice (solvabilité II) (refonte) ». Elle ajoute que l'article 45 du décret attaqué est en contradiction avec l'article 517, § 1er, de la loi, précitée, du 13 mars 2016. Plus fondamentalement, elle se demande comment une même entreprise d'assurances pourrait satisfaire simultanément, d'une part, à des mécanismes de contrôle visant à assurer le respect d'obligations propres au droit fédéral des assurances et, d'autre part, à de pareils mécanismes instaurés pour préserver l'intérêt général wallon.
A.11.2. La partie requérante estime que le législateur décrétal ne peut se prévaloir de l'article 10 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles pour justifier l'empiétement sur les compétences du législateur fédéral. Elle considère que son inclusion dans le champ d'application du décret attaqué n'est en rien nécessaire pour permettre au législateur fédéral d'exercer sa compétence en matière de pouvoirs subordonnés.
A.12. Le Gouvernement wallon fait valoir que le législateur décrétal n'a pas entendu légiférer en matière de réglementation et de contrôle des entreprises d'assurances, ni déroger aux dispositions prévues en la matière par l'autorité fédérale. Il considère que si une incompatibilité quelconque devait exister entre le droit des assurances et les articles 35, 44 et 45 du décret attaqué, cette incompatibilité tiendrait à la nature de l'actionnariat de la partie requérante ou à une incompatibilité avec les activités qu'une intercommunale peut mener à travers les sociétés qu'elle contrôle.
Il estime que s'il fallait considérer que les dispositions attaquées dérogent au droit fédéral des assurances, leur adoption serait en tout état de cause justifiée sur la base de l'article 10 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, dès lors que leur adoption était indispensable pour permettre au législateur wallon d'exercer ses compétences en matière de pouvoirs locaux et de tutelle. Il ajoute que la matière concernée se prête à un règlement différencié, dès lors que les dispositions attaquées ne s'appliquent qu'aux seules sociétés qu'elles visent. Il considère enfin que l'effet des dispositions attaquées sur le droit des sociétés est marginal, puisque la partie requérante déclare être la seule société à participation publique locale significative qui exerce une activité dans le domaine des assurances.
Au surplus, le Gouvernement wallon fait valoir que les dispositions attaquées ne violent pas les dispositions du droit de l'assurance qui sont invoquées par la partie requérante. Il estime que l'obligation de recueillir l'avis conforme de l'intercommunale qui contrôle la société ne supprime pas le contrôle exercé par la Banque nationale de Belgique ou par l'Autorité des services et marchés financiers (ci-après : la FSMA). Il considère que la soumission des actes de la société concernée à la tutelle générale d'annulation ou à une tutelle de substitution ne s'analyse pas davantage en une perte de pouvoir de contrôle prudentiel de la Banque nationale de Belgique ou de la FSMA.
A.13. Le Gouvernement flamand fait valoir que le législateur décrétal dispose d'un large pouvoir d'appréciation en la matière et il en conclut que le moyen n'est pas fondé.
A.14. La partie requérante estime qu'il appartenait au législateur décrétal d'envisager que les sociétés qu'il visait pouvaient avoir des activités de toute nature, y compris d'assurances, et qu'il lui revenait de ne rien prévoir qui fût contraire au droit fédéral et européen régissant les activités d'assurances.
En ce qui concerne le quatrième moyen dans l'affaire n° 6999
A.15. La partie requérante prend un quatrième moyen de la violation des articles 39 et 134 de la Constitution, ainsi que de l'article 6, § 1er, VI, alinéa 5, 12°, de l'article 6, § 1er, VIII, et de l'article 10 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles par les articles 47, 56, 76 et 82 du décret attaqué. Elle fait grief aux dispositions attaquées de régler le droit du travail et de la sécurité sociale en violation de la compétence exclusive de l'autorité fédérale dans ces matières.
A.16. Le Gouvernement wallon considère que les dispositions attaquées ne concernent pas les relations de travail dans le secteur privé, mais bien les relations de travail dans le secteur public des pouvoirs locaux. Il estime que la forme juridique privée éventuelle de l'employeur est, à cet égard, sans importance, dès lors que celui-ci est contrôlé et financé par les pouvoirs publics locaux.
Il estime par ailleurs que la partie requérante n'a aucun intérêt à poursuivre l'annulation des dispositions attaquées, dès lors qu'elles ont pour effet de limiter ses frais et de lui permettre de conclure, à son bénéfice, une clause de non-concurrence avec la personne qui exerce la fonction dirigeante en son sein.
Il considère enfin qu'à supposer que les dispositions attaquées dérogent au droit fédéral du travail, elles seraient justifiées sur la base de l'article 10 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles. Il rappelle que les travaux de la Commission d'enquête parlementaire chargée d'examiner la transparence et le fonctionnement du groupe « Publifin » ont mis en exergue le fait que des mandataires, dirigeants et membres du personnel au sein de certaines sociétés à participation publique locale significative percevaient des rémunérations excessives et il indique que les dispositions attaquées visent à éviter que de telles situations se reproduisent, dans l'intérêt des personnes morales de droit public locales wallonnes, même lorsqu'elles agissent au travers de sociétés de droit privé qu'elles contrôlent. Il fait valoir que la matière se prête à un règlement différencié, dès lors que les dispositions attaquées s'appliquent aux seules sociétés visées par ces dispositions. Il ajoute que l'effet de celles-ci est marginal, compte tenu du nombre particulièrement limité de sociétés et de travailleurs concernés.
A.17. Le Gouvernement flamand fait valoir que les dispositions attaquées ne comportent aucune violation des règles répartitrices de compétences.
En ce qui concerne le cinquième moyen dans l'affaire n° 6999 et le deuxième moyen dans l'affaire n° 7055
A.18.1. La partie requérante dans l'affaire n° 6999 prend un cinquième moyen de la violation, par les articles 7, 9, 31, 35, 38 à 41, 44, 45, 47 à 49, 51, 52, 62, 67 à 80 du décret attaqué, des articles 10 et 11 de la Constitution, lus ou non en combinaison avec l'article 22 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, avec les articles 8 et 11 de la Convention européenne des droits de l'homme, avec l'article 27 de la Constitution, avec l'article 7 du décret d'Allarde et les articles II.3 et II.4 du Code de droit économique, avec les articles 16 et 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, avec les libertés de circulation consacrées aux articles 28, 45, 49, 54 et 56 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, et avec l'article 133 de la directive 2009/138/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 « sur l'accès aux activités de l'assurance et de la réassurance et leur exercice (solvabilité II) (refonte) ». Elle expose qu'elle est la seule compagnie d'assurances à être soumise aux contraintes établies par les dispositions attaquées. Elle en déduit qu'elle est discriminée par rapport à toutes les autres compagnies d'assurances (première branche), par rapport aux sociétés dans lesquelles la Région wallonne et les personnes publiques qui en sont l'émanation détiendraient une participation significative (deuxième branche), par rapport à une société d'assurances dans laquelle la Région wallonne et les personnes publiques qui en sont l'émanation détiendraient une participation significative (troisième branche) et par rapport aux organismes de financement de pensions créés sur la base de la loi du 27 octobre 2006 « relative au contrôle des institutions de retraite professionnelle », alors même qu'ils seraient détenus à plus de 50 % par des personnes publiques locales (quatrième branche).
À titre subsidiaire, elle suggère d'interroger la Cour de justice de l'Union européenne à titre préjudiciel au sujet de l'article 133, paragraphe 2, de la directive 2009/138/CE précitée.
A.18.2. La partie requérante dans l'affaire n° 7055 prend un deuxième moyen de la violation, par les dispositions attaquées, des articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison avec l'article 27 de la Constitution, avec l'article 11 de la Convention européenne des droits de l'homme et avec l'article 22 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Elle fait valoir que celles-ci induisent une différence de traitement injustifiée, premièrement, entre les sociétés soumises au décret attaqué et les autres sociétés commerciales qui ne sont pas concernées par le décret et, deuxièmement, entre les sociétés dont l'actionnariat public est local et les sociétés dont l'actionnariat public est régional. Elle estime que ce double traitement différencié est manifestement disproportionné par rapport aux objectifs poursuivis par le décret. Elle fait valoir qu'alors que de nombreuses filiales d'intercommunales évoluent dans des secteurs d'activités extrêmement compétitifs, il ne leur sera pas possible de concurrencer efficacement des sociétés à l'actionnariat purement privé ou à l'actionnariat public régional, en raison des pouvoirs exorbitants accordés par le décret aux intercommunales actionnaires. Elle précise que la tutelle sur toutes les décisions prises génère quant au caractère définitif des décisions prises une incertitude qui place la société concernée dans une situation de désavantage concurrentiel particulièrement important. Enfin, elle fait valoir que la tutelle administrative exercée sur des personnes morales de droit privé est contraire à la liberté d'association garantie par les dispositions citées au moyen.
A.19. Le Gouvernement wallon fait valoir que les différences de traitement dénoncées reposent sur le critère du contrôle des sociétés concernées par un ou plusieurs pouvoirs publics locaux dont elles sont l'émanation. Il estime que ce critère est objectif et pertinent au regard du but poursuivi par le législateur décrétal, à savoir mettre un terme aux abus constatés par la Commission d'enquête parlementaire chargée d'examiner la transparence et le fonctionnement du groupe « Publifin ». Il expose que des mesures similaires à celles qui sont établies par les dispositions attaquées sont en vigueur dans les sociétés au sein desquelles la Région wallonne et les personnes morales de droit public qui en dépendent disposent, directement ou indirectement, d'une participation qualifiée. Il renvoie à cet égard à trois décrets adoptés par le législateur wallon le 29 mars 2018. En ce qui concerne la différence de traitement critiquée dans la quatrième branche du cinquième moyen dans l'affaire n° 6999, il relève que le législateur décrétal n'est pas compétent pour régir les organismes de fonds de pension.
Pour le surplus, le Gouvernement wallon doute que la partie requérante dans l'affaire n° 6999 puisse se prévaloir de la liberté d'entreprendre, dès lors qu'elle est une émanation d'une personne morale de droit public locale qui la contrôle et il rappelle qu'en tout état de cause, le décret attaqué ne viole pas cette liberté. Enfin, il estime que l'article 27 de la Constitution n'est pas applicable aux sociétés à participation publique locale significative qui sont le résultat de l'association de personnes morales de droit public.
A.20.1. La partie requérante dans l'affaire n° 6999 estime que, si le législateur décrétal ne décide pas que les pouvoirs publics locaux ne peuvent intervenir dans le secteur des assurances, il ne peut agir de manière telle que la société à participation publique locale significative active dans ce secteur soit entravée dans son action, alors que ses concurrents ne le sont pas.
A.20.2. La partie requérante dans l'affaire n° 7055 conteste que les contraintes auxquelles sont soumises les sociétés partiellement détenues par la Région wallonne sont similaires à celles qui lui sont imposées par les dispositions attaquées. Pour le surplus, elle entend démontrer que les différences de traitement qu'elle dénonce ont pour elle des conséquences disproportionnées et la placent dans une situation de net désavantage vis-à-vis de ses concurrents.
B Point de vue de la cour
Quant au désistement de la partie requérante dans l'affaire n° 7055
B.1.1. La partie requérante dans l'affaire n° 7055 déclare se désister de son recours en annulation.
B.1.2. Rien ne s'oppose à ce que la Cour décrète le désistement.
Quant à la recevabilité du recours dans l'affaire n° 6999
B.2.1. La partie requérante est une société à participation publique locale significative au sens de l'article L5111-1, alinéa 1er, 10°, du Code de la démocratie locale et de la décentralisation, introduit par l'article 47 du décret de la Région wallonne du 29 mars 2018 « modifiant le Code de la démocratie locale et de la décentralisation en vue de renforcer la gouvernance et la transparence dans l'exécution des mandats publics au sein des structures locales et supra-locales et de leurs filiales » (ci-après : le décret attaqué). Toutes les dispositions insérées par le décret attaqué qui visent les sociétés à participation publique locale significative lui sont en conséquence applicables.
B.2.2. Contrairement à ce que le Gouvernement wallon soutient, les dispositions qu'elle attaque sont susceptibles d'affecter directement et défavorablement sa situation, en ce que ces dispositions instaurent des contrôles supplémentaires quant aux décisions qu'elle prend et quant aux actes qu'elle pose et en ce qu'elles lui imposent des contraintes dans ses relations avec les membres de son conseil d'administration, ainsi qu'en termes de recrutement et de gestion de son personnel dirigeant.
B.2.3. Bien que les dispositions attaquées aient pour objet ou pour effet d'assurer la conformité des actes et décisions de la partie requérante à la légalité, à l'intérêt social et à l'intérêt général, de sorte qu'elles pourraient avoir un effet bénéfique sur sa situation, ces dispositions ne lui en imposent pas moins des contraintes et des contrôles supplémentaires par rapport à ceux qui existaient antérieurement. La partie requérante a donc intérêt à en demander l'annulation.
B.2.4. Par une lettre du 6 janvier 2020, le Gouvernement wallon a demandé la réouverture des débats, de nouvelles dispositions décrétales ayant été votées par le Parlement wallon le 19 décembre 2019 et ces nouveaux éléments suffisant, à son estime, « à établir l'absence d'intérêt de la partie requérante ».
Les nouvelles dispositions décrétales auxquelles il est fait référence dans ce courrier produisent leurs effets, d'après le texte voté par le Parlement wallon le 19 décembre 2019, ce même jour ou, pour l'une d'entre elles, le 1er janvier 2019. Les dispositions attaquées ayant pu produire des effets juridiques avant leur modification lors de l'entrée en vigueur des dispositions votées par le Parlement wallon le 19 décembre 2019, la partie requérante a intérêt à en demander l'annulation.
Par ailleurs, ainsi que le reconnaît le Gouvernement wallon dans sa lettre du 6 janvier 2020, ces « nouveaux éléments » ont « déjà été évoqués pour l'essentiel lors de l'audience de plaidoiries », de sorte que les parties ont été en mesure de s'expliquer à leur sujet.
Il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de réouverture des débats.
B.2.5. Le recours est recevable.
Quant à la demande de production d'une consultation juridique
B.3.1. Dans sa requête en annulation, la partie requérante demande à la Cour d'ordonner la production, par le Gouvernement wallon, d'une consultation juridique qui a été donnée au Gouvernement et qui a été évoquée au cours des travaux préparatoires du décret attaqué (Doc. parl., Parlement wallon, 2017-2018, 15 mars 2018, CRIC, n° 112, pp. 13, 18 et 22).
B.3.2. Les avis juridiques sollicités par un gouvernement lors de l'élaboration d'un avant- projet de loi ne sont pas « des règles qui sont établies par la Constitution ou en vertu de celle- ci pour déterminer les compétences respectives de l'État, des Communautés et des Régions » (article 1er, 1°, de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle). Elles ne sont donc pas de nature à pouvoir lier la Cour de quelque manière que ce soit lors de son contrôle du décret attaqué au regard des règles répartitrices de compétences.
Il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de la partie requérante.
Quant à la définition de la « société à participation publique locale significative »
B.4.1. Le premier moyen vise le décret attaqué, en ce qu'il « étend son champ d'application à toute société à participation publique locale significative », telle qu'elle est définie à l'article 47 du décret attaqué, qui remplace l'article L5111-1 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation.
L'article 47 du décret attaqué insère, dans cette disposition, un 10° qui définit la « société à participation publique locale significative » en ces termes :
« Société à participation publique locale significative : société répondant aux critères suivants :
a) être une société de droit belge ou dont un siège d'exploitation est établi en Belgique;
b) ne pas être une intercommunale, une association de pouvoirs publics visées à l'article 118 de la loi organique du 8 juillet 1976 des centres publics d'action sociale, une régie communale ou provinciale autonome, une ASBL communale ou provinciale, une association de projet, une société de logement, un organisme visé à l'article 3 du décret du 12 février 2004 relatif au statut de l'administrateur public ou à l'article 3 du décret du 12 février 2004 relatif au statut de l'administrateur public pour les matières réglées en vertu de l'article 138 de la Constitution;
c) Et dans laquelle une ou plusieurs communes, provinces, C.P.A.S., intercommunales, régies communales et provinciales autonomes, associations de projet, association de pouvoirs publics visée à l'article 118 de la loi du 8 juillet 1976 organique des centres publics d'action sociale, sociétés de logement, ou personne morale ou association de fait associant plusieurs des autorités précitées détiennent seules, ou conjointement avec la Région wallonne, un organisme visé à l'article 3, § 1er à § 7, alinéa 1er, du décret du 12 février 2004 relatif au statut de l'administrateur public ou à l'article 3, § 1er à § 5, alinéa 1er, du décret du 12 février 2004 relatif au statut de l'administrateur public pour les matières réglées en vertu de l'article 138 de la Constitution, directement ou indirectement une participation au capital supérieure à cinquante pourcents du capital; ou désignent plus de cinquante pourcents des membres du principal organe de gestion.
[...] ».
Une définition similaire figure à l'article L1532-5 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation, remplacé par l'article 35 du décret attaqué, qui soumet le conseil d'administration des sociétés qu'il vise, à savoir des filiales d'intercommunales ou dans lesquelles une intercommunale détient une participation directe ou indirecte, à l'obligation de transmettre pour avis conforme à l'intercommunale certaines des décisions qu'il envisage de prendre.
B.4.2. Le moyen est pris de la violation des articles 4 et 5 de la Constitution et de l'article 6, § 1er, VIII, de l'article 7 et de l'article 19 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles. La partie requérante fait grief à la définition de la « société à participation publique locale significative » de ne pas être conforme aux règles répartitrices de compétences précitées, tant du point de vue matériel que du point de vue territorial.
Le Gouvernement flamand, partie intervenante, considère pour sa part que la définition précitée excède la compétence territoriale du législateur décrétal wallon.
B.4.3. L'exposé des motifs du décret attaqué indique que, par l'introduction dans le Code de la démocratie locale et de la décentralisation, de la définition de la « société à participation publique locale significative », le législateur décrétal entendait identifier une forme de société dans laquelle les pouvoirs publics locaux wallons sont représentés mais qui échappait auparavant aux dispositions du Code concernant la transparence des opérations menées par les intercommunales wallonnes et des mandats exercés en leur sein (Doc. parl., Parlement wallon, 2017-2018, n° 1047/1, p. 12).
B.5. L'article 6, § 1er, VIII, de la loi spéciale du 8 août 1980 confère aux régions, en ce qui concerne les pouvoirs subordonnés, le pouvoir de régler la composition, l'organisation, la compétence et le fonctionnement des institutions provinciales et communales, ainsi que celui de régler les associations de provinces, de collectivités supracommunales et de communes dans un but d'utilité publique, à l'exception de la tutelle spécifique en matière de lutte contre l'incendie, organisée par la loi.
B.6.1. Partant des recommandations formulées dans le « Rapport de la Commission d'enquête parlementaire chargée d'examiner la transparence et le fonctionnement du Groupe PUBLIFIN », adopté en séance plénière du Parlement wallon le 6 juillet 2017 (Doc. parl., Parlement wallon, 2016-2017, n° 861/1), le législateur décrétal s'est estimé compétent pour prendre, dans le cadre de sa compétence en matière de pouvoirs subordonnés, « de nouvelles règles en matière de gouvernance et de transparence au sein des structures locales, supra-locales ou dans leurs filiales » et pour étendre « considérablement le périmètre des organismes et des mandataires visés par les dispositions du Code de la démocratie locale » (Doc. parl., Parlement wallon, 2017-2018, n° 1047/1, p. 3).
B.6.2. Ainsi que l'a relevé la section de législation du Conseil d'État, « des sociétés de droit privé auxquelles sont confiées des missions de service public peuvent ainsi être soumises au contrôle de la Région et se voir imposer des contraintes que justifient les politiques publiques » (ibid., p. 49).
B.6.3. L'article L1512-5 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation autorise les intercommunales à prendre des participations au capital de toute société lorsqu'elles sont de nature à concourir à la réalisation de leur objet social. L'article L1512-6, § 1er, du même Code précise par ailleurs que, quel que soit leur objet, les intercommunales exercent des missions de service public. Il en découle qu'il faut considérer que les sociétés de droit privé au capital desquelles des intercommunales participent concourent, à tout le moins indirectement, à la réalisation d'une mission de service public. Il en va de même en ce qui concerne les sociétés de droit privé au capital desquelles des communes ou des provinces participent, ces dernières étant chargées de régler ce qui concerne les intérêts communaux et provinciaux, ainsi que des sociétés de droit privé au capital desquelles participent les autres personnes morales de droit public locales visées par la disposition attaquée. À ce titre, elles peuvent se voir imposer des contraintes justifiées par les politiques publiques.
B.6.4. Pour le surplus, il ne revient pas à la Cour de se prononcer concrètement sur le concours apporté par la société requérante à l'objet social de l'intercommunale qui participe à son financement ni sur le contenu des missions de service public assumées par cette intercommunale. La Cour examine les dispositions attaquées en considérant que les sociétés auxquelles elles s'appliquent concourent, le cas échéant indirectement, à la réalisation d'une mission de service public, dès lors que ces sociétés sont contrôlées, directement ou indirectement, par des personnes morales de droit public locales, qui ne peuvent poursuivre d'autre objectif que la réalisation d'un service public conforme à l'intérêt général.
B.7. Le critère du contrôle significatif qui est exercé sur les sociétés qu'il entend viser par les personnes morales de droit public locales qui relèvent de la compétence du législateur décrétal, critère qui se concrétise soit par la participation majoritaire au capital de la société, soit par la participation majoritaire au principal organe de gestion de la société, ne conduit pas en soi, le législateur décrétal à excéder sa compétence en matière de pouvoirs subordonnés. Le législateur décrétal a en effet raisonnablement pu considérer qu'une personne morale ayant adopté la forme d'une société privée mais dont le capital est constitué à plus de 50 % de fonds publics locaux ou dont la majorité des membres du principal organe de gestion est désignée par
les pouvoirs publics locaux peut être soumise à des dispositions organisant un contrôle des opérations menées à l'aide de ces fonds publics et de l'exercice des mandats confiés par ces pouvoirs publics locaux.
B.8.1. Les articles 5, 39 et 134 de la Constitution, lus en combinaison avec les articles 2 et 19, § 3, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles et avec les articles 2, § 1er, et 7 de la loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux institutions bruxelloises, prévoient une répartition exclusive des compétences territoriales. Un tel système suppose que l'objet de toute norme adoptée par un législateur régional puisse être localisé dans le territoire de sa compétence, de sorte que toute relation ou situation concrète soit réglée par un seul législateur.
B.8.2. Les dispositions attaquées définissent les sociétés à participation publique locale significative comme étant toute société de droit belge et toute société dont un siège d'exploitation est établi en Belgique, dont le capital est détenu, à plus de 50 %, par une ou plusieurs personnes morales de droit public locales soumises au Code de la démocratie locale et de la décentralisation ou dont le principal organe de gestion est composé, à plus de 50 %, par des personnes nommées par une ou plusieurs personnes morales de droit public locales soumises au Code de la démocratie locale et de la décentralisation.
B.8.3. Un tel critère de rattachement permet de localiser l'application des dispositions décrétales dans la sphère de compétence territoriale de la Région wallonne. En effet, les dispositions attaquées ont essentiellement pour objet de resserrer les rapports entre ces sociétés et les personnes morales de droit public locales dont elles sont l'émanation ou dont elles dépendent, de manière à permettre l'exercice d'un contrôle de ces sociétés par ces personnes morales ou par la Région wallonne, qui exerce la tutelle sur ces dernières. La personne morale de droit public locale, soumise au Code de la démocratie locale et de la décentralisation et donc nécessairement située sur le territoire de la Région wallonne, qui contrôle l'actionnariat de la société visée par les dispositions attaquées constitue un critère de rattachement territorial pertinent.
B.8.4. Par ailleurs, limiter le champ d'application des dispositions attaquées aux seules sociétés dont le siège social est situé sur le territoire de la Région wallonne aurait pour conséquence de faire échapper aux contrôles que le législateur décrétal entendait organiser toutes les sociétés contrôlées par une ou plusieurs personnes morales de droit public locales soumises au Code de la démocratie locale et de la décentralisation dont le siège social serait localisé dans une autre région du pays.
B.8.5. Toutefois, le système de la répartition exclusive des compétences territoriales suppose que chaque situation puisse être rattachée à la réglementation adoptée par un seul et même législateur. En l'espèce, le législateur décrétal a prévu, au point c) de la définition de la « société à participation publique locale significative », deux critères de rattachement alternatifs, à savoir, d'une part, l'identité des personnes détenant la majorité du capital et, d'autre part, l'identité des personnes procédant à la nomination de la majorité des membres du principal organe de gestion. En retenant deux critères de rattachement différents et alternatifs, le législateur décrétal crée une situation dans laquelle il n'exclut pas, dans l'hypothèse où un autre législateur décrétal prendrait une réglementation similaire prévoyant les deux mêmes critères de rattachement alternatifs, qu'une même situation soit réglée par deux normes législatives prises par des législateurs différents.
Eu égard à l'objet du décret attaqué, qui est de favoriser la transparence des opérations réalisées et des décisions prises à l'aide des fonds investis par des personnes morales de droit public locales dans des sociétés de droit privé, il y a lieu de privilégier le critère relatif à la détention de la majorité du capital de la société par rapport au critère de la nomination de la majorité des membres de son principal organe de gestion.
B.9. Le premier moyen est fondé dans cette mesure. Il y a lieu d'annuler, dans les articles L1532-5 et L5111-1, 10°, du Code de la démocratie locale et de la décentralisation, tel qu'ils ont été respectivement remplacés par les articles 35 et 47 du décret attaqué, respectivement, les mots « ou atteigne plus de cinquante pourcents des membres du principal organe de gestion, » et « ou désignent plus de cinquante pourcents des membres du principal organe de gestion ».
Quant à l'avis conforme de l'intercommunale « mère », à la tutelle administrative ordinaire et à la possibilité de désigner un commissaire spécial
B.10.1. L'article 35 du décret attaqué remplace l'article L1532-5 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation par la disposition suivante :
« Art. L1532-5. La filiale d'une intercommunale, ainsi que toutes les sociétés dans lesquelles une intercommunale ou une filiale de celle-ci ont une participation, à quelque degré que ce soit, pour autant que la participation totale, détenue seule ou conjointement, directement ou indirectement, des communes, provinces, C.P.A.S., intercommunales, régies communales ou provinciales autonomes, ASBL communales ou provinciales, associations de projet, associations de pouvoirs publics visées à l'article 118 de la loi du 8 juillet 1976 organique des centres publics d'action sociale, sociétés de logement ou personne morale ou association de fait associant plusieurs des autorités précitées soit supérieure à cinquante pourcents du capital ou atteigne plus de cinquante pourcents des membres du principal organe de gestion, transmettent au conseil d'administration de l'intercommunale les projets de décision relatifs aux prises ou retrait de participation dans toute personne morale de droit public ou privé, aux cessions de branches d'activités et d'universalités ainsi qu'aux rémunérations relevant de l'assemblée générale ou du principal organe de gestion.
Le conseil d'administration de l'intercommunale dispose d'un délai de trente jours pour rendre un avis conforme.
Les sociétés concernées mettent leur statut en conformité avec le présent article. A défaut, l'intercommunale se retire du capital de la société ».
En conséquence de l'annulation partielle de cette disposition, comme il est dit en B.9, il y a lieu d'omettre les mots « ou atteigne plus de cinquante pourcents des membres du principal organe de gestion » dans son alinéa 1er.
B.10.2. L'article 44 du décret attaqué insère, dans l'article L3111-1, § 1er, du même Code, qui établit la liste des organismes soumis à la tutelle administrative ordinaire de la Région wallonne, un 8°, rédigé comme suit :
« 8° sur une société à participation publique locale significative, telle que définie à l'article L5111-1, alinéa 1er, 10°».
Il en découle que les sociétés à participation publique locale significative sont, dès l'entrée en vigueur de cette disposition, soumises à la tutelle administrative ordinaire exercée par la Région wallonne.
B.10.3. L'article 45 du décret attaqué remplace l'article L3116-1 du même Code par la disposition suivante :
« L'autorité de tutelle peut, par arrêté, désigner un commissaire spécial lorsqu'une personne morale de droit public ou un organisme visé à l'article L3111-1, § 1er, lèse l'intérêt général, reste en défaut de fournir les renseignements et éléments demandés, ou de mettre en exécution les mesures prescrites par les lois, décrets, arrêtés, règlements ou statuts ou par une décision de justice coulée en force de chose jugée. Le commissaire spécial est habilité à prendre toutes les mesures nécessaires en lieu et place de l'autorité défaillante, dans les limites du mandat qui lui a été donné par l'arrêté qui le désigne ».
En ce qui concerne la compétence fédérale en matière de droit des sociétés
B.11. Le deuxième moyen est pris de la violation de l'article 39 de la Constitution et des articles 6, § 1er, VI, alinéa 5, 5°, et 10 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles.
L'article 6, § 1er, VI, alinéa 5, de la loi spéciale du 8 août 1980 dispose :
« L'autorité fédérale est, en outre, seule compétente pour :
[…]
5° le droit commercial et le droit des sociétés;
[…] ».
B.12.1. Les articles 61, § 1er, 63, 64, 521, 522, 527 et 531 du Code des sociétés, cités par la partie requérante, établissent diverses règles relatives aux organes des sociétés, à la validité des actes adoptés par ceux-ci, aux pouvoirs du conseil d'administration, à la responsabilité des membres du conseil d'administration et aux pouvoirs de l'assemblée générale des actionnaires.
Le Code des sociétés est abrogé par la loi du 23 mars 2019 « introduisant le Code des sociétés et des associations et portant des dispositions diverses ». En vertu de l'article 39 de cette loi, le nouveau Code des sociétés et des associations est applicable à partir du 1er janvier 2020. Les articles 2.41, 2.42, 2.49, 2.56, 7.85, 7.93, 7.95, 7.98 et 7.124 du Code des sociétés et des associations établissent des dispositions semblables aux dispositions du Code des sociétés qui sont citées par la partie requérante.
B.12.2. En soumettant certains actes des filiales d'intercommunales à l'avis conforme de l'intercommunale « mère » et en prévoyant une tutelle administrative sur les sociétés à participation publique locale significative ainsi que la possibilité de désigner un commissaire spécial dans certains cas de défaillance, les dispositions attaquées règlent un aspect de la matière du droit des sociétés, laquelle ressortit à la compétence de l'autorité fédérale.
À cet égard, il importe peu que, par les dispositions attaquées, le législateur décrétal n'empêche pas l'application des dispositions du Code des sociétés qui sont citées dans le moyen, mais prévoie davantage de contrôles sur certaines sociétés. En effet, ce faisant, les dispositions attaquées modifient la réglementation relative à la prise de certaines décisions au sein des sociétés concernées et ont donc une incidence sur les pouvoirs des organes de ces sociétés. Il en découle que les dispositions attaquées ressortissent à la matière du droit des sociétés.
B.13.1. La Cour doit encore examiner si les conditions d'application de l'article 10 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles sont remplies.
Cette disposition autorise notamment la Région wallonne à prendre un décret réglant une matière fédérale, pour autant que cette disposition soit nécessaire à l'exercice de ses compétences, que cette matière se prête à un règlement différencié et que son incidence sur la matière fédérale ne soit que marginale.
B.13.2. Le législateur décrétal a pu considérer qu'il était nécessaire de prendre les dispositions attaquées, en vue de renforcer la bonne gouvernance et la transparence au sein des structures locales sur lesquelles il exerce la tutelle. Sans ces dispositions en effet, certaines structures revêtant la forme de sociétés de droit privé, directement ou indirectement financées et contrôlées par les pouvoirs publics locaux, échappent à un contrôle adéquat et effectif de la part des pouvoirs publics. Il peut être admis qu'en vue d'exercer correctement sa compétence en matière d'associations de provinces, de collectivités supracommunales et de communes dans un but d'utilité publique (article 6, § 1er, VIII, alinéa 1er, 8°, de la loi spéciale du 8 août 1980), le législateur décrétal, prenant connaissance de certaines situations considérées comme étant incompatibles avec les règles de bonne gouvernance et de transparence qu'il entendait imposer au niveau local, a estimé qu'il était nécessaire de prendre les dispositions attaquées.
B.13.3. En prévoyant que les projets de décision relatifs aux prises ou aux retraits de participation dans toute personne morale de droit public ou privé, aux cessions de branches d'activités et d'universalités, ainsi qu'aux rémunérations relevant de l'assemblée générale ou du principal organe de gestion font l'objet d'un avis conforme de la part de l'intercommunale dont la société concernée est une filiale, l'article 35 du décret attaqué ne porte pas atteinte au principe selon lequel les organes de la société sont responsables des décisions qu'ils prennent. Il en va de même en ce qui concerne l'article 44 du décret attaqué, qui prévoit la tutelle administrative générale sur les actes des sociétés à participation publique locale significative, et en ce qui concerne l'article 45 du décret attaqué, qui prévoit l'intervention, dans certaines hypothèses, d'un commissaire spécial, en lieu et place des organes de la société. Ces dispositions n'ont pas pour conséquence de décharger les organes de la société de leur responsabilité, mais, dès lors qu'elles prévoient des contrôles supplémentaires sur les décisions prises par le conseil d'administration, elles ont pour effet de limiter les pouvoirs de celui-ci, qui peut se trouver empêché d'adopter certaines décisions.
Ces dispositions décrétales portent sur des aspects du droit des sociétés qui se prêtent donc à un règlement différencié, puisque les sociétés visées qui se voient imposer des contraintes et des contrôles supplémentaires ne sont pas empêchées de satisfaire, par ailleurs, à la réglementation relative à la responsabilité assumée par les organes des sociétés de droit privé.
B.13.4. Enfin, les dispositions attaquées ne s'appliquent qu'aux sociétés de droit privé dont le capital est constitué, à plus de 50 %, directement ou indirectement par des participations des personnes morales de droit public qu'elles énumèrent, de sorte que leur incidence sur la matière du droit des sociétés est marginale, eu égard au nombre de personnes morales de droit privé soumises au droit des sociétés.
B.14. Il découle de ce qui précède que les dispositions attaquées sont conformes aux règles répartitrices de compétences visées dans le moyen.
Le moyen n'est pas fondé.
En ce qui concerne la compétence fédérale relative au droit de l'assurance
B.15. Le troisième moyen est pris de la violation de l'article 39 de la Constitution et des articles 6, § 1er, VI, alinéa 5, 2°, et 10 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles.
L'article 6, § 1er, VI, alinéa 5, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles dispose :
« L'autorité fédérale est, en outre, seule compétente pour :
[...]
2° la politique financière et la protection de l'épargne, en ce compris la réglementation et le contrôle des établissements de crédit et autres institutions financières et des entreprises d'assurances et assimilées, des sociétés de portefeuille et des fonds communs de placement, le crédit hypothécaire, le crédit à la consommation, le droit bancaire et de l'assurance, ainsi que la constitution et la gestion de ses institutions publiques de crédit;
[...] ».
B.16.1. Par la loi du 13 mars 2016 « relative au statut et au contrôle des entreprises d'assurance ou de réassurance » (ci-après : la loi du 13 mars 2016), le législateur fédéral règle, « dans l'objectif de garantir la protection des preneurs d'assurance, des assurés et des bénéficiaires de contrats et d'opérations d'assurance, et d'assurer la solidité et le bon fonctionnement du système financier, en particulier, l'établissement, l'activité et le contrôle des entreprises d'assurance ou de réassurance opérant en Belgique, en ce compris certaines modalités et conditions inhérentes aux contrats et opérations d'assurance ou de réassurance » (article 3). Cette loi organise notamment le contrôle des entreprises d'assurances par la Banque nationale de Belgique.
L'article 44 de la loi du 13 mars 2016 dispose que « l'organe légal d'administration assume la responsabilité finale de l'entreprise d'assurance ou de réassurance ». Au sein de cet organe sont constitués les comités d'audit, de rémunération et des risques (article 48). Les membres de ces comités doivent disposer des connaissances, des compétences, de l'expérience et des aptitudes définies par la loi (articles 49 à 51).
B.16.2. La loi du 13 mars 2016 transpose notamment la directive 2009/138/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 « sur l'accès aux activités de l'assurance et de la réassurance et leur exercice », dite « solvabilité II », laquelle dispose, en son article 27, en ce qui concerne le contrôle exercé sur les entreprises d'assurances, que « les États membres veillent à ce que les autorités de contrôle disposent des moyens nécessaires et possèdent l'expertise, la capacité et le mandat appropriés, pour atteindre le principal objectif assigné au contrôle, qui consiste à garantir la protection des preneurs et des bénéficiaires ».
Par ailleurs, en application de l'article 42, paragraphe 1, de la directive précitée, toutes les personnes qui dirigent effectivement une entreprise d'assurances ou qui occupent d'autres fonctions-clés doivent en permanence satisfaire à des exigences en ce qui concerne leurs qualifications, connaissances et expérience professionnelles, ainsi que leur réputation et leur intégrité.
B.17. En soumettant certains actes des filiales d'intercommunales qui sont des entreprises d'assurances à l'avis conforme de l'intercommunale « mère » et en prévoyant une tutelle administrative sur les sociétés à participation publique locale significative qui sont des entreprises d'assurances, ainsi que la possibilité de désigner un commissaire spécial dans certains cas de défaillance, les articles 35, 44 et 45 attaqués concernent la matière de la réglementation et du contrôle des entreprises d'assurances, matière qui ressortit à la compétence de l'autorité fédérale.
B.18.1. La Cour doit encore examiner si les conditions d'application de l'article 10 de la loi spéciale du 8 août 1980 sont remplies.
Cette disposition autorise notamment la Région wallonne à prendre un décret réglant une matière fédérale, pour autant que cette disposition soit nécessaire à l'exercice de ses compétences, que cette matière se prête à un règlement différencié et que son incidence sur la matière fédérale ne soit que marginale.
B.18.2. Les mesures prises par le législateur fédéral en matière de contrôle des entreprises d'assurances, en exécution, notamment, de la transposition de la directive 2009/138/CE, dite « Solvabilité II », ne sauraient être écartées au profit d'autres mécanismes de contrôle instaurés par les législateurs décrétaux à l'égard de certaines entreprises d'assurances, en fonction de la composition de leur actionnariat. Singulièrement, le contrôle exercé par la Banque nationale de Belgique en vertu de la loi du 13 mars 2016 en vue de garantir la protection des preneurs d'assurance, des assurés et des bénéficiaires de contrats, ainsi que d'assurer la solidité et le bon fonctionnement du système financier ne saurait entrer en concurrence avec d'autres mécanismes de contrôle exercés par une intercommunale « mère » ou par une autorité de tutelle et ayant d'autres finalités, dès lors qu'il pourrait en résulter, pour la société d'assurances
soumise à différents mécanismes de contrôle concurrents, une impossibilité de satisfaire simultanément aux décisions ou injonctions des différentes autorités de contrôle.
Il en découle que la matière du contrôle des entreprises d'assurances ne se prête pas à un règlement différencié, de sorte que l'empiétement de compétences sur la matière du contrôle des entreprises d'assurances ne saurait être justifié sur la base de l'article 10 de la loi spéciale du 8 août 1980.
B.19. Le troisième moyen est fondé. Les dispositions attaquées violent les articles 6, § 1er, VI, alinéa 5, 2°, et 10 de la loi spéciale du 8 août 1980. En conséquence, il y a lieu d'annuler les articles 35, 44 et 45 du décret attaqué, mais uniquement en ce qu'ils s'appliquent aux entreprises d'assurances.
Quant à la « fonction dirigeante locale », aux plafonds de rémunération, aux clauses de non-concurrence et aux dispositions relatives à la fin du contrat de travail
B.20.1. L'article 47 du décret attaqué remplace l'article L5111-1 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation. Cette disposition définit la notion de « fonction dirigeante locale » dans les termes suivants :
« 7° fonction dirigeante locale : la personne occupant la position hiérarchique la plus élevée, sous contrat de travail ou sous statut dans une intercommunale, une association de pouvoirs publics visées à l'article 118 de la loi du 8 juillet 1976 organique des centres publics d'action sociale, une régie communale ou provinciale autonome, une A.S.B.L. communale ou provinciale, une association de projet, une société de logement, une société à participation publique locale significative ».
B.20.2. L'article 56 du décret attaqué insère, dans le Code de la démocratie locale et de la décentralisation, un article L5321-1 qui établit des plafonds de rémunération en ce qui concerne les titulaires de mandats locaux. Cette disposition contient un paragraphe 6, ainsi rédigé :
« Le montant annuel maximal brut de la rémunération du titulaire de la fonction dirigeante locale ne peut pas être supérieur au montant qui figure en annexe 4 ».
L'article 82 du décret attaqué insère l'annexe 4 dans le même Code. En application de ce texte, le montant annuel maximal brut de la rémunération du titulaire de la fonction dirigeante d'une société à participation publique locale significative est de 245 000 euros indexés, et aucun autre membre du personnel ne peut percevoir une rémunération qui dépasse cette rémunération.
B.20.3. L'article 76 du décret attaqué insère dans le Code de la démocratie locale et de la décentralisation un article L6434-1, § 4, qui dispose :
« Si le titulaire de la fonction dirigeante locale exerce ses fonctions dans le cadre d'un contrat de travail, une clause de non-concurrence peut être insérée avant la fin des relations contractuelles ou au moment de la rupture en respect des conditions fixées par la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, notamment [eu] égard à l'activité de l'organisme concerné.
Une convention de non-concurrence peut être conclue après la fin des relations contractuelles eu égard à l'activité de l'organisme concerné.
Dans tous les cas, la clause de non-concurrence est prévue pour une période de six mois maximum. L'indemnité perçue à ce titre n'est pas supérieure à la rémunération de base pour la moitié de la période de non-concurrence prévue ».
En ce qui concerne la compétence fédérale en matière de droit du travail et de sécurité sociale
B.21. La partie requérante prend un quatrième moyen de la violation, par les dispositions précitées, des articles 39 et 134 de la Constitution et des articles 6, § 1er, VI, alinéa 5, 12°, 6, § 1er, VIII, et 10 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles.
L'article 6, § 1er, VI, alinéa 5, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles dispose :
« L'autorité fédérale est, en outre, seule compétente pour :
[…]
12° le droit du travail et la sécurité sociale ».
B.22. Les dispositions attaquées limitent la rémunération du titulaire de la fonction dirigeante des sociétés à participation publique locale significative ainsi que de tous les autres membres du personnel de ces sociétés et permettent l'insertion d'une clause de non-concurrence limitée dans le contrat de travail du titulaire de la fonction dirigeante. Elles règlent ainsi des aspects de droit du travail qui ressortissent à la compétence de l'autorité fédérale.
B.23.1. La Cour doit encore examiner si les conditions d'application de l'article 10 de la loi spéciale du 8 août 1980, telles qu'elles sont mentionnées en B.18.1, sont remplies.
B.23.2. Il ressort de l'exposé des motifs du décret attaqué que le législateur décrétal a jugé nécessaire de « renforcer la responsabilité personnelle des mandataires, qu'ils soient élus ou désignés dans des structures locales, supra-locales ou dans leurs filiales » et de développer des « règles plus strictes […] afin d'éviter tout abus ». L'encadrement plus strict des rémunérations et le plafonnement de la rémunération attribuée à la fonction dirigeante locale font partie de ces règles destinées à éviter les abus (Doc. parl., Parlement wallon, 2017-2018, n° 1047/1, p. 3).
B.24.1. Le législateur décrétal a pu estimer nécessaire, en vue d'atteindre les objectifs qu'il poursuivait en matière de bonne gouvernance et de transparence au sein des structures locales sur lesquelles il exerce la tutelle, de prendre les dispositions attaquées. En effet, il lui revient de garantir la saine gestion des sociétés dont le capital est constitué à plus de 50 % par des moyens publics. Ayant constaté l'existence de situations incompatibles avec la politique qu'il entend mener en cette matière, il a pu prendre les dispositions qui s'imposaient, en vue de corriger ces situations et de prévenir leur réapparition.
B.24.2. Le plafonnement des rémunérations dans certaines sociétés et la possibilité d'insérer une clause de non-concurrence limitée ne portent pas atteinte aux éléments essentiels de la réglementation fédérale en ce qui concerne les contrats de travail, de sorte qu'il peut être admis que les dispositions attaquées règlent des éléments du droit du travail qui se prêtent à un règlement différencié.
B.24.3. Enfin, l'incidence des dispositions attaquées sur la compétence fédérale en matière de droit du travail est marginale, dès lors que seule une catégorie bien spécifique de sociétés est concernée par l'application des dispositions décrétales attaquées.
B.25. Le quatrième moyen n'est pas fondé.
Quant au principe d'égalité et de non-discrimination
B.26. Le cinquième moyen est pris de la violation des articles 10 et 11 de la Constitution, lus ou non en combinaison avec l'article 22 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, avec les articles 8 et 11 de la Convention européenne des droits de l'homme, avec l'article 27 de la Constitution, avec l'article 7 du décret d'Allarde et avec les articles II.3 et II.4 du Code de droit économique, avec les articles 16 et 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, avec les libertés de circulation consacrées par les articles 28, 45, 49, 54 et 56 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et avec l'article 133 de la directive 2009/138/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009 « sur l'accès aux activités de l'assurance et de la réassurance et leur exercice (solvabilité II) (refonte) ». Ce moyen vise les articles 7, 9, 31, 35, 38 à 41, 44, 45, 47 à 49, 51, 52, 62, 67 à 80 du décret attaqué.
Ce moyen est décliné en quatre branches par lesquelles la Cour est invitée à comparer la situation des sociétés soumises aux dispositions attaquées avec la situation des autres sociétés d'assurances qui n'y sont pas soumises (première branche), avec la situation des sociétés détenues, directement ou indirectement, par la Région wallonne ou par les personnes publiques qui en sont l'émanation (deuxième branche), avec la situation des sociétés d'assurances qui seraient détenues par la Région wallonne ou par les personnes publiques qui en sont l'émanation (troisième branche) et avec les organismes de financement de pensions créés sur la base de la loi du 27 octobre 2006 « relative au contrôle des institutions de retraite professionnelle » (quatrième branche).
B.27. Le principe d'égalité et de non-discrimination n'exclut pas qu'une différence de traitement soit établie entre des catégories de personnes, pour autant qu'elle repose sur un critère objectif et qu'elle soit raisonnablement justifiée.
L'existence d'une telle justification doit s'apprécier en tenant compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la nature des principes en cause; le principe d'égalité et de non-discrimination est violé lorsqu'il est établi qu'il n'existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé.
B.28.1. Compte tenu de l'annulation partielle de cette disposition, comme il est dit en B.9, l'article L1532-5 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation, remplacé par l'article 35 attaqué, est applicable aux sociétés dans lesquelles une intercommunale ou une filiale d'une intercommunale a une participation et dont le capital est détenu à plus de 50 %, directement ou indirectement, par des communes, provinces, CPAS, intercommunales, régies communales ou provinciales autonomes, ASBL communales ou provinciales, associations de projet, associations de pouvoirs publics visées à l'article 118 de la loi du 8 juillet 1976 organique des centres publics d'action sociale, sociétés de logement ou personne morale ou association de fait associant plusieurs des autorités précitées, seules ou conjointement.
Les autres dispositions attaquées sont applicables aux sociétés à participation publique locale significative, définies à l'article L5111-1, 10°, du Code de la démocratie locale et de la décentralisation, inséré par l'article 47 du décret attaqué, comme étant, compte tenu de l'annulation partielle de cette disposition, comme il est dit en B.9, les sociétés dont le capital est détenu à plus de 50 %, directement ou indirectement, par des « communes, provinces, CPAS, intercommunales, régies communales ou provinciales autonomes, associations de projet, associations de pouvoirs publics visées à l'article 118 de la loi du 8 juillet 1976 organique des centres publics d'action sociale, sociétés de logement ou personne morale ou association de fait associant plusieurs des autorités précitées[,] seules ou conjointement avec la Région wallonne, un organisme visé à l'article 3, § 1er à § 7, alinéa 1er, du décret du 12 février 2004 relatif au statut de l'administrateur public pour les matières réglées en vertu de l'article 138 de la Constitution ».
B.28.2. Les différences de traitement critiquées dans le moyen reposent sur le critère de la provenance des fonds investis dans la société concernée. Les dispositions attaquées sont applicables lorsque l'actionnariat de la société est constitué pour plus de la moitié, directement ou indirectement, d'une ou de plusieurs des autorités publiques locales énumérées à l'article L1532-5 ou à l'article L5111-1, 10°, du Code de la démocratie locale et de la décentralisation.
Ce critère est objectif. La Cour doit examiner s'il est pertinent eu égard à l'objet des dispositions attaquées et à l'objectif poursuivi par le législateur décrétal.
B.29.1. Les dispositions attaquées créent des incompatibilités à l'égard des titulaires des fonctions dirigeantes dans les sociétés concernées (articles 7, 9, 31, 38 à 41 et 62) et leur imposent d'effectuer certaines déclarations (articles 48 et 49), de sorte qu'elles limitent les possibilités de recrutement pour ces fonctions. Elles établissent un certain nombre de contraintes limitant le pouvoir décisionnel des organes de gestion des sociétés concernées, en ce qui concerne les prises ou les retraits de participation dans d'autres personnes morales de droit public ou privé, les cessions de branches d'activités et d'universalités (article 35), les rémunérations, rétributions et avantages en nature octroyés aux membres du principal organe de gestion et aux membres du personnel (article 52). Elles soumettent les sociétés à participation publique locale significative à la tutelle ordinaire exercée par la Région wallonne
(article 44) et permettent à l'autorité de tutelle de désigner un commissaire spécial qui est habilité à prendre, dans certaines circonstances, toutes les mesures nécessaires en lieu et place de l'autorité (de la société) considérée défaillante (article 45). Enfin, elles leur imposent des règles en matière de gouvernance et de transparence (articles 67 à 80).
B.29.2. L'exposé des motifs du décret attaqué indique que ce dernier traduit les recommandations formulées par la Commission d'enquête parlementaire chargée d'examiner la transparence et le fonctionnement du Groupe PUBLIFIN dans son rapport du 6 juillet 2017. Le législateur décrétal a considéré que la transposition des recommandations énoncées dans ce rapport dans des outils juridiques wallons était d'intérêt général. Afin de mettre un terme à des situations que le législateur décrétal considérait comme incompatibles avec sa politique en matière de gouvernance et de transparence au sein des structures locales, supra-locales ou dans leurs filiales, et de prévenir leur réapparition, il a estimé qu'il était indispensable d'étendre « considérablement le périmètre des organismes et des mandataires visés par les dispositions du Code de la démocratie locale et dès lors, par l'exercice de la tutelle et le contrôle de la Direction de contrôle des mandats locaux » (Doc. parl., Parlement wallon, 2017-2018, n° 1047/1, p. 3).
B.30.1. Au regard de cet objectif, le critère de distinction entre les sociétés soumises aux dispositions attaquées et celles qui ne le sont pas est pertinent, puisqu'il permet aux autorités régionales et locales d'exercer un contrôle sur les sociétés privées qui sont l'émanation de personnes morales de droit public locales elles-mêmes soumises au contrôle des autorités régionales. Il est en effet permis de considérer qu'une société de droit privé dont le capital est constitué, à plus de 50 %, directement ou indirectement, de fonds d'origine publique, est une émanation des personnes morales de droit public locales qui la constituent et qu'elle peut, à ce titre, être soumise à des contrôles exercés par les autorités publiques.
B.30.2. Par ailleurs, en ce qui concerne la comparaison entre les sociétés auxquelles les dispositions attaquées sont applicables et les sociétés détenues, directement ou indirectement, par la Région wallonne ou par les personnes publiques qui en sont l'émanation, il s'impose de relever que, par deux décrets pris le même jour que le décret attaqué (décret du 29 mars 2018 « modifiant les décrets [du] 12 février 2004 relatif au statut de l'administrateur public et du 12 février 2004 relatif aux commissaires du Gouvernement et aux missions de contrôle des réviseurs au sein des organismes d'intérêt public, visant à renforcer la gouvernance et l'éthique au sein des organismes wallons » et décret du 29 mars 2018 « modifiant les décrets [du] 12 février 2004 relatif au statut de l'administrateur public pour les matières réglées en vertu de l'article 138 de la Constitution et du 12 février 2004 relatif aux commissaires du Gouvernement et aux missions de contrôle des réviseurs au sein des organismes d'intérêt public pour les matières réglées en vertu de l'article 138 de la Constitution, visant à renforcer la gouvernance et l'éthique au sein des organismes wallons »), le législateur décrétal a également entendu assurer la bonne gouvernance et la transparence au sein des personnes morales contrôlées par la Région wallonne. Sans qu'il soit nécessaire de comparer précisément les dispositions applicables aux sociétés contrôlées par les pouvoirs publics locaux et celles qui sont applicables aux sociétés contrôlées par la Région, il suffit de constater que les différences entre ces dispositions sont justifiées par les natures différentes des pouvoirs publics participant à leur actionnariat.
B.31. Compte tenu de ce qu'en conséquence de l'annulation des articles 35, 44 et 45 attaqués, telle qu'elle est circonscrite en B.19, ces dispositions ne sont pas applicables aux sociétés d'assurances, les dispositions attaquées n'entraînent pas des effets disproportionnés pour les sociétés de droit privé concernées. En effet, les contraintes qu'elles imposent aux sociétés qui y sont soumises ont pour objectif de garantir la bonne gouvernance en leur sein, ce dont elles ne peuvent que tirer profit. Ces contraintes, qui requièrent, certes, une modification de l'organisation de la prise de certaines décisions, ne paraissent pas excessivement lourdes à mettre en œuvre. Par ailleurs, les limitations imposées aux rémunérations ne paraissent pas déraisonnables et laissent une marge de négociation suffisante permettant le recrutement d'un personnel compétent et motivé.
B.32. Sans qu'il soit nécessaire de trancher la question de savoir si des personnes morales de droit privé contrôlées par les pouvoirs publics locaux peuvent se prévaloir de la liberté d'association garantie par l'article 27 de la Constitution, lu ou non en combinaison avec l'article 11 de la Convention européenne des droits de l'homme et avec l'article 22 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, il suffit de constater qu'une limitation de cette liberté par les dispositions attaquées serait justifiée par l'objectif poursuivi par le législateur, qui a été rappelé en B.29.2.
B.33. Pour le surplus, la partie requérante ne démontre pas en quoi les autres normes de référence qu'elle cite dans le moyen seraient violées par les dispositions attaquées.
B.34. Le cinquième moyen n'est fondé en aucune de ses branches.
Décision
Par ces motifs,
la Cour
1. décrète le désistement de la partie requérante dans l'affaire n° 7055;
2. annule :
- dans l'article L1532-5 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation, remplacé par l'article 35 du décret de la Région wallonne du 29 mars 2018 « modifiant le Code de la démocratie locale et de la décentralisation en vue de renforcer la gouvernance et la transparence dans l'exécution des mandats publics au sein des structures locales et supra-locales et de leurs filiales », les mots « ou atteigne plus de cinquante pourcents des membres du principal organe de gestion »;
- dans l'article L5111-1, 10°, du même Code, remplacé par l'article 47 du décret du 29 mars 2018 précité, les mots « ou désignent plus de cinquante pourcents des membres du principal organe de gestion »;
- les articles L1532-5, L3111-1, § 1er, 8°, et L3116-1 du même Code, respectivement remplacés et insérés par les articles 35, 44 et 45 du même décret, mais uniquement en ce qu'ils s'appliquent aux entreprises d'assurances;
3. rejette le recours pour le surplus.