Commune – Demande partiellement irrecevable – Explication au sujet d'un document administratif – Absence de réponse de la partie adverse – Obligation de collaboration – Communication d'office
En cause :
[…],
Partie requérante,
Contre :
La commune de Bernissart,
Partie adverse,
Vu l’article 32 de la Constitution ;
Vu le décret du 30 mars 1995 relatif à la publicité de l’Administration, tel qu’il a été modifié par le décret du 2 mai 2019, l’article 8, § 1er ;
Vu le Code de la démocratie locale et de la décentralisation, les articles L3231-1 et suivants ;
Vu l’arrêté du Gouvernement wallon du 9 juillet 1998 fixant la composition et le fonctionnement de la Commission d’accès aux documents administratifs ;
Vu le recours introduit par courriel le 19 janvier 2020 ;
Vu la demande d’information adressée à la partie adverse le 24 janvier 2020 et reçue le 27 janvier 2020.
Objet et recevabilité du recours
Les documents sollicités, pour autant qu’ils existent, sont des documents administratifs au sens de l’article L3211-3, alinéa 2, 2° du CDLD.
Toutefois, la date du courrier recommandé envoyé à la partie adverse en application de l’article 8bis, alinéa 3, du décret du 30 mars 1995[1], confère, le cas échéant, date certaine au recours.
La Commission attire l’attention sur le risque que prend la partie requérante en termes d’expiration du délai de recours dans un tel cas[2].
Le courrier recommandé en application de l’article 8bis, alinéa 3, du décret du 30 mars 1995 a été envoyé à la partie adverse le 24 janvier 2020. Dès lors, il y a lieu de considérer cette date certaine comme celle du présent recours, de sorte qu’il est recevable ratione temporis.
- Pouvez vous me dire si les pesticides du groupe glyphosate (Round-Up) et les néonicotinoïdes sont utilisés pour l’entretien en voiries, aires sportives et/ou dans les espaces communaux ?
Si oui, quelle quantité ? à défaut, quels sont les moyens utilisés pour l'entretien ? ;
La Commission rappelle que, lorsque les documents sollicités relèvent d’informations relatives à l’environnement visées à l’article D.10 du Code de l’environnement ou d’information environnementale telle que définie par l’article D.6, 11° du Code de l’environnement, la présente Commission n’est pas compétente, dès lors que seule la CRAIE est compétente.
Il ressort, en effet, des travaux parlementaires que l’intention des auteurs de l’avant-projet du Code de l’environnement était établie en ce sens que l’application des textes généraux relatifs à la publicité de l’administration (notamment pour les pouvoirs locaux) ne s’étend pas aux matières environnementales.
Dès lors, en vertu de l’article 2 du décret du 30 mars 1995, tel que modifié par le décret du 2 mai 2019, la présente Commission n’est pas compétente ratione materiae.
6. En ce qui concerne la demande d’explication, les questions posées à l’administration peuvent être résumées comme suit :
- Qui est la personne de contact pour les renseignements relatifs à l’avancée du chantier de l’immeuble à appartements à Harchies ?;
- Des enfouissements sontils prévus sur le site de concassage à Harchies, et si oui, de quelle nature ? ;
- Pourquoi l’entretien de la Rue des Oies n’est il pas communal à l’instar des rues voisines ? ;
- Les entretiens des équipements de jeux sontils réguliers ? Si oui à quelle fréquence ? Est-ce qu'il y a eu des accidents ces 5 dernières années ? ;
- La Commune répondelle entièrement aux exigences du RGPD ? Si oui, depuis quand précisément ;
- Un DPO at-il été désigné et est-il actuellement officiellement en fonction ? Qui est officiellement en charge de la fonction de DPO ? Quelles sont les coordonnées du DPO ? ;
- Les coordonnées du DPO sontelles à disposition du public, des usagers des services communaux et de l'administration communale ? Via quels canaux a été effectuée cette publicité ? ;
- La Commune at-elle élaboré et mis en place une politique et des procédures pour gérer les fuites de données ? ;
- Depuis le 25 mai 2018, des plaintes pour nonrespect de la vie-privée, violation d’une obligation de secret ou fuites de données ont-elles été déposées à l’encontre de la Commune ? Si oui, combien et quels sont les dates de dépôts de ces plaintes ? ;
(…)
- Avez vous entamé des démarches afin d’étudier la mise en œuvre d’une telle application? ;
- Quelle entreprise a été chargé de la mission concernant le site web ? Quels sont les autres soumissionnaires ? Quel est le coût de ce nouveau site ? ;
- Pourriez vous me dire quelles informations sont données aux nouveaux habitants ? Quand reçoivent-ils ces informations (au moment de l’inscription ?) ? Reçoivent-ils ces informations dans une brochure d’accueil ou reçoivent-ils ces informations d’une autre manière ?
- Quelles mesures la partie adverse at-elle prise face à l’alerte rouge au niveau des fortes chaleurs ? ;
- Que fait la Commune pour les personnes les plus vulnérables ? ;
- Est ce que nous avons un « cadastre » des personnes sensibles et que fait-on pour celles-ci ? Comment les mesures sont-elles diffusées auprès de la population ? ;
- Qu'est ce qu'il en est des profils de fonction des membres du personnel communal et de l'évaluation de ceux-ci ? ;
- À combien s'élève le taux d’absentéisme au sein de la commune ? ;(…)
- Combien de visite d'un médecin contrôle ont été demandée en 2016 / 2017 / 2018 / 2019 ? ;
- Depuis le 1er juillet, quelle est la situation de x (personne nommée dans le recours) en référence au problème dont la partie requérante, conseiller communal, avait parlé par le passé avec la partie adverse ? ;
- De quand date la dernière analyse psychosociale à la Commune ? ;
- Est ce que dans l'ensemble des "sites" administratifs il y a une pointeuse ? à défaut, comment s'effectue le contrôle des horaires ? S'il y a un registre. Comment doit-on s'y prendre pour consulter celui-ci ? ;
- De quand date la dernière inspection des Lois Sociales ? ;
- De quand date la dernière inspection de l’ONSS APL ? ;
- Comment s'est faite la répartition des sièges dans les intercommunales lors de la mandature 2006/2012 ? ;
- Qu’est ce que le label « commune accueillante » ? ; Qui attribue ce label ?
- Pour l’année 2019, les périodes pendant lesquelles nos grades légaux et le Bourgmestre ont dû se faire remplacer ainsi que le nom du remplaçant ;
- Les registres du courrier entrant et sortant sontils consultables n'importe quand ? ;
- Depuis décembre 2018, quelle a été la situation du logement communal (34 rue Buissonnet) ? Quelle est son affectation actuelle ? ;
- Est ce que, l’exception éventuelle des associations de parents qui sont plus que probablement en conformité avec la réglementation dans ce domaine, les écoles communales ont des comptes en banque que ceux-ci sont ouverts au nom de la Commune et la visibilité des mouvements en est donnée au Directeur financier ? ;
- La commune at-elle été informée par Bpost du retrait de certaines boîtes ? Sur base de quel critère les boîtes ont-elles disparues ? La commune a-t-elle estimé nécessaire de faire part de remarques à Bpost. Si oui, lesquelles ?
Le droit d’obtenir des explications au sujet d’un document administratif est une des modalités de la publicité passive prévue par toutes les législations relatives à la publicité de l’administration.
Selon les travaux préparatoires de la loi fédérale, ce droit d’explication s’impose car « dans la plupart des cas, la publicité sans explications resterait lettre morte en raison du caractère administratif du langage utilisé ou de la technicité des documents » (Doc.parl., Chambre, sess. 1992-1993, n° 1112/1, p. 14).
Selon la Commission fédérale d’accès aux documents administratifs, « le droit d’explication comprend seulement la possibilité pour le demandeur d’obtenir des informations dans un langage compréhensible au sujet du contenu d’un texte existant et se limite à cela » (avis n° 2014/64 du 28 juillet 2014). Elle précise par ailleurs que toute question (et donc toute demande d’explication) doit porter sur un document existant, et dont l’information est matérialisée sur un support (avis n° 2014/48 du 2 juin 2014).
La Commission régionale d’accès à l’information environnementale (CRAIE) précise ces avis en rejetant systématiquement les demandes d’explication lorsque « la réponse à ces demandes d’explications ou de précisions implique l’établissement d’un document nouveau » (décisions de la CRAIE n° 609 du 11 juin 2013, et n° 629 du 8 novembre 2013). L’information doit donc préexister à l’explication, et l’autorité peut donc légitimement rejeter « les demandes qui impliqueraient un réel travail de consolidation, d’analyse ou d’interprétation de données de la part de l’autorité publique qui en est saisie » (M. Delnoy, R. Smal, « La publicité de l’information en matière environnementale », dans V. Michiels (dir.), La publicité de l’administration, Bruxelles, Larcier, 2014, p. 280-281, et les nombreuses références citées).
Il s’ensuit que les explications qui doivent être données par les autorités administratives se limitent strictement au contenu du document demandé, et ne devraient porter que sur l’explication des termes administratifs, juridiques ou techniques utilisés dans ce document. Il est néanmoins possible que, dans ce cadre, des étapes de l’instruction du dossier doivent parfois être expliquées[3].
Par conséquent, le droit d’obtenir des explications au sujet d’un document administratif suppose que ce document soit identifié et existant et ne peut être interprété comme ouvrant un droit général à interroger une entité sur une thématique donnée, par le biais de questions ouvertes appelant des justifications ou explications d’ordre général.
La demande d’explication, telle que formulée, n’est donc pas recevable rationae materiae. A supposer qu’une telle demande soit recevable, elle devrait en tout état de cause être considérée comme abusive, au vu de la diversité des thématiques abordées, sans lien entre elles.
Examen du recours
- La liste des aires de jeux appartenant à la partie adverse ;
- La déclaration de politique communale votée en 2013 concernant la mandature 2012-2018 ;
- Le montant du crédit engagé et imputé, au compte budgétaire 2006, aux articles suivants :
* 10101/11121 ? 10102/11121 ? 10103/11121 ;
- pour l’exercice 2018 et 2019 (ou si plus facile pour l’année scolaire 2018/2019), la liste des enseignants (+montants) à qui des paiements dans le cadre des garderies de midi ont été effectués. Et ce, selon la subvention reçue et comptabilisée à l’article : 722/465-48.2018 [7.994,25€] ;
- le plan d’entretien des voiries communales ;
La Commission constate que la partie adverse n’a pas répondu à la demande d’information, comme le prévoit l’article 8ter, alinéa 2, du décret du 30 mars 1995, de sorte qu’elle doit faire « d'office droit au recours (...) ».
En l’espèce, pour autant que les documents existent, le requérant sera autorisé à en recevoir une copie[4].
Il ressort de l’esprit du décret du 30 mars 1995 relatif à la publicité de l’administration que les informations obtenues par la Commission dans le cadre de l’instruction du dossier sont confidentielles.
En ne communiquant pas la moindre information à la Commission, la partie adverse fait obstruction à la mission dévolue à celle-ci, laquelle participe pourtant à la protection d’un droit fondamental, garanti par l’article 32 de la Constitution. La Commission est en effet dans l’impossibilité d’apprécier concrètement l’application des exceptions prévues par le décret. L’absence de collaboration de la partie adverse avec la Commission, en contradiction flagrante avec l’intention du législateur, n’est donc pas admissible.
Par ces motifs, la Commission décide :
Le recours est irrecevable concernant la demande de consultation.
Le recours est irrecevable en ce qui concerne les demandes d’explication.
Le recours est irrecevable en ce qui concerne la demande relative au volet environnemental.
La partie adverse autorise la communication sous forme de copies des autres documents sollicités, s’ils existent, en occultant, le cas échant, les données susceptibles de porter atteinte à une exception légale, et ce dans un délai de 30 jours à partir de la notification de la présente décision.