Région wallonne – Ministre en charge des Pouvoirs locaux – Mandats –Publication en cours de procédure au Moniteur belge – Perte d'objet –
Vie privée (non) – Communication
En cause :
[…],
Partie requérante,
Contre :
Région wallonne, représentée par le Ministre du Logement, des Pouvoirs locaux et de la Ville,
Partie adverse,
Vu l’article 32 de la Constitution ;
Vu le décret du 30 mars 1995 relatif à la publicité de l’Administration, tel qu’il a été modifié par le décret du 2 mai 2019, l’article 8, § 1er ;
Vu l’arrêté du Gouvernement wallon du 9 juillet 1998 fixant la composition et le fonctionnement de la Commission d’accès aux documents administratifs ;
Vu le recours introduit par courriel le 7 décembre 2020 ;
Vu la demande d’information adressée à la partie adverse le 8 décembre 2020 et reçue le 10 décembre 2020 ;
Vu la réponse de la partie adverse reçue le 29 décembre 2020 ;
Objet et recevabilité du recours
1. La demande du 3 novembre 2020 porte sur l’obtention de copie des listes suivantes :
« 1-Des mandataires récemment déchus de leurs mandats.
2- Des mandataires titulaires d’un mandat originaire restant en défaut d’avoir remis leur déclaration et qui ne sont plus titulaires d’un mandat pour lequel une déchéance peut être constatée.
3- Des mandataires qui n’avaient pas encore rentré la déclaration 2019 de mandats, de fonctions et de rémunération pour l’exercice 2018 et pour lesquels, l’exécutif régional avait décidé, le 17 septembre selon l’article de presse précité, de poursuivre la procédure de sanction. »
2. Les documents sollicités sont, pour autant qu’ils existent et soient en possession de la partie adverse, des documents administratifs au sens de l’article L3211-3 du CDLD.
3. En ce qui concerne les modalités d’introduction du recours, la partie requérante n’a pas introduit son recours par recommandé, ni par tout autre moyen conférant date certaine à l’envoi. En principe, le simple courrier électronique n’est pas de nature à conférer une date certaine. Toutefois, la date du courrier recommandé envoyé à la partie adverse en application de l’article 8bis, alinéa 3, du décret du 30 mars 1995[1], confère, le cas échéant, date certaine au recours. La Commission attire l’attention sur le risque que prend la partie requérante en termes d’expiration du délai de recours dans un tel cas[2].
4. En l’espèce, le courrier recommandé en application de l’article 8bis, alinéa 3, susmentionné a été envoyé à la partie adverse le 8 décembre 2020. Dès lors, il y a lieu de considérer cette date certaine comme celle du présent recours. La demande date du 3 novembre 2020 et a été rejetée implicitement par l’entité concernée le 3 décembre 2020.
La partie requérante a donc introduit valablement son recours dans le délai de 30 jours prévu à l’article 8bis, alinéa 1er, second tiret, du décret du 30 mars 1995, prenant cours le lendemain du rejet implicite.
Examen du recours
5. La Commission constate que la partie adverse n’a pas répondu à la demande d’information dans le délai visé à l’article 8ter, alinéa 1er, du décret du 30 mars 1995. Comme le prévoit l’article 8ter, alinéa 2, du décret du 30 mars 1995, la Commission doit dès lors faire « d'office droit au recours et décide[r], moyennant le respect des exceptions prévues à l'article 6 du présent décret, la production du document demandé ».
6. Néanmoins, la partie adverse a, par la suite, communiqué à la Commission les documents sollicités ainsi qu’un courrier de réponse envoyé à son administration le 22 décembre 2020 pour communication à la partie requérante.
La Commission estime qu’il y a lieu de tenir compte, pour l’examen du présent recours, de ces informations, même si elles ont été communiquées en dehors du délai visé à l’article 8ter, alinéa 1er, du décret du 30 mars 1995.
7. En ce qui concerne les deux premiers documents sollicités, la partie adverse indique dans son courrier à la partie requérante que ceux-ci ont été publiés au Moniteur belge le 25 novembre 2020 (NUMAC n° 2020204813). Le recours a dès lors perdu son objet.
8. En ce qui concerne le troisième document sollicité, la partie adverse avance un avis juridique de ses services ainsi que de la Direction du Support juridique du Secrétariat général du Service public de Wallonie dont il ressort que transmettre les noms de mandataires qui n’ont fait l’objet d’aucune sanction violerait manifestement leur vie privée et leurs droits fondamentaux eu égard aux dispositions du RGPD et à la Convention Européenne des Droits de l’Homme.
9. À travers cet argument, la partie adverse soulève l’exception prévue par l’article 6, §2, 1°, du décret du 30 mars 1995 qui dispose :
« §2. L'entité ou l’autorité administrative non régionale rejette la demande de consultation, d'explication ou de communication sous forme de copie d'un document administratif, qui lui est adressée en application du présent décret, si la publication du document porte atteinte :1° à la vie privée, sauf les exceptions prévues par la loi […] ».
Concernant cette exception, la Commission rappelle à cet égard que les données à caractère personnel, notamment au sens du droit européen[3], sont les informations relatives à une personne physique identifiée ou identifiable, et notamment les informations spécifiques propres à l’identité physique, physiologique, génétique, psychique, économique, culturelle ou sociale de la personne concernée.
La Commission rappelle également que toutes les données à caractère personnel au sens du droit européen ne relèvent pas de la vie privée au sens l’article 6, §2, 1°, du décret du 30 mars 1995 relatif à la publicité de l’Administration.
De plus, les données déjà rendues publiques, ou les données de personnes exerçant une fonction publique ne bénéficient pas d’une protection équivalente à celles des autres personnes physiques. La Commission partage également l’avis de l’ancienne Commission de protection de la vie privée, selon laquelle « le fait même d'exercer une fonction publique ou d'utiliser des ressources publiques ne peut pas aboutir à une négation totale du droit au respect de la vie privée des personnes concernées »[4].
En l’espèce, les données à caractère personnel présentes dans le document sollicité relèvent strictement de la fonction de mandataire public. La Commission ne distingue dès lors pas d’atteinte à la vie privée des personnes mentionnées. La circonstance que certains des mandataires repris dans la liste, établie à une date déterminée, ont pu, par la suite, régulariser leur situation, ne permet pas d’arriver à une autre conclusion[5].
La partie adverse doit communiquer le troisième document sollicité, et ce, vu l’absence de difficulté et d’occultation, dans un délai de 15 jours à compter à partir de la notification de la présente décision.
Par ces motifs, la Commission décide :
Le recours a perdu son objet en ce qui concerne les deux premiers documents sollicités.
La partie adverse doit communiquer la troisième liste visée dans la demande, relative aux mandataires qui n’avaient pas encore rentré la déclaration 2019 de mandats, de fonctions et de rémunération pour l’exercice 2018, à la partie requérante et ce, vu l’absence de difficulté et d’occultation, dans un délai de 15 jours à compter à partir de la notification de la présente décision.