Commune – Acquisition d'un immeuble – Correspondance avec le notaire – Document à caractère personnel (non) – Communication
En cause :
[…],
Partie requérante,
Contre :
La commune de Boussu,
Partie adverse,
Vu l’article 32 de la Constitution ;
Vu le décret du 30 mars 1995 relatif à la publicité de l’Administration, tel qu’il a été modifié par le décret du 2 mai 2019, l’article 8, § 1er ;
Vu le Code de la démocratie locale et de la décentralisation (ci-après : le CDLD), les articles L3231-1 et suivants ;
Vu l’arrêté du Gouvernement wallon du 9 juillet 1998 fixant la composition et le fonctionnement de la Commission d’accès aux documents administratifs ;
Vu le recours introduit par courriel le 14 avril 2021 ;
Vu la demande d’information adressée à la partie adverse le 16 avril 2021 et reçue le 20 avril 2021 ;
Vu la réponse de la partie adverse du 4 mai 2021.
Objet et recevabilité du recours
1. La demande du 21 février 2021 porte sur l’obtention d’une copie d’un courriel du 21 décembre 2016 d’une étude de notaire adressé à la partie adverse ainsi que de « tout document que cette administration a échangé avec l’Etude notariale […] concernant le bien sis rue du Moulin […], 7300 Boussu ».
2. Les documents sollicités sont, dès lors qu’ils existent et sont en possession de la partie adverse, des documents administratifs au sens de l’article L3211-3 du CDLD.
3. En ce qui concerne les modalités d’introduction du recours, la partie requérante a introduit son recours par courriel. Or, en principe, le simple courrier électronique n’est pas de nature à conférer une date certaine.
Toutefois, la date du courrier recommandé envoyé à la partie adverse en application de l’article 8bis, alinéa 3, du décret du 30 mars 1995[1], confère, le cas échéant, date certaine au recours.
La Commission attire l’attention sur le risque que prend la partie requérante en termes d’expiration du délai de recours dans un tel cas[2].
4. En l’espèce, la demande date du 21 février 2021 et a été rejetée implicitement par l’entité concernée le 24 mars 2021. Or le courrier recommandé en application de l’article 8bis, alinéa 3, susmentionné, a été envoyé à la partie adverse le 16 avril 2021. Dès lors, il y a lieu de considérer cette date certaine comme celle du présent recours. La partie requérante a donc introduit valablement son recours dans le délai de 30 jours visé à l’article 8bis, alinéa 1er, second tiret, du décret du 30 mars 1995, prenant cours le lendemain du rejet implicite.
Examen du recours
5. Dans sa réponse la partie adverse rappelle qu’il s’agit « d’une vente publique judiciaire sur saisie », la partie requérante ne disposerait dès lors plus « de la maîtrise de décision sur cette vente, pas plus que d’une capacité de négociation sur son bien et donc ne dispose plus d’intérêt personnel à obtenir ces informations ».
La Commission rappelle que le requérant doit justifier d’un intérêt uniquement lorsqu’il s’agit d’un document à caractère personnel. Il s’agit d’une condition de recevabilité de la demande d’accès. La notion de document à caractère personnel est définie comme « un document administratif comportant une appréciation ou un jugement de valeur relatif à une personne physique nommément désignée ou aisément identifiable, ou la description d’un comportement dont la divulgation peut manifestement causer un préjudice à cette personne » par l’article 1er, alinéa 2, 3°, du décret du 30 mars 1995.
En l’espèce, les documents sollicités ne constituent pas des documents à caractère personnel. De sorte qu’aucune démonstration d’un intérêt n’est requise.
6. La partie adverse indique également que « il est de bonne gestion administrative et financière, tant que la vente n’est pas conclue, qu’un candidat acquéreur potentiel (a fortiori la commune) tienne confidentielles les informations dont il dispose dans le cadre d’un dossier d’acquisition potentielle ceci tant à l’égard d’autres candidats acquéreurs que de la propriétaire du bien.
Le but évident est d’éviter toute ingérence, délit d’initié ou spéculation immobilière. »
La partie adverse souligne encore que « les informations sollicitées et reçues par le service des régies l’ont été dans le cadre d’une analyse des risques et d’un avis à remettre au collège, avis ayant conduit à la décision du Collège communal du 5 février 2021 de renoncer à toute action visant à se rendre maître du bien (expropriation ou enchère lors d’une vente publique). »
Aucune exception légale ne peut se rattacher à cette argumentation. À cet égard, la Commission rappelle que le droit d’accès aux documents administratifs, prévu à l’article 32 de la Constitution est un droit fondamental et que les exceptions doivent s’entendre de manière restrictive. En effet, les exceptions légales au droit d’accès aux documents administratifs en possession d’une commune sont limitativement énumérées à l’article L3231-3 du CDLD, sans préjudice des autres exceptions établies par la loi ou le décret pour des motifs relevant de l’exercice de l’autorité fédérale, de la Communauté ou de la Région.
7. La partie adverse communique à la partie requérante les documents sollicités et ce, en l’absence d’occultation nécessaire, et au vu du volume réduit des documents à communiquer, dans un délai de 15 jours à compter à partir de la notification de la présente décision.
Par ces motifs, la Commission décide :
La partie adverse communique à la partie requérante les documents sollicités, et ce dans un délai de 15 jours à compter à partir de la notification de la présente décision.