OIP – AViQ – Données Covid19 – Communication en cours de procédure – Perte d'objet – Recours sans objet – Document inachevé ou incomplet (oui) – Communication (non)
En cause :
[…],
Partie requérante,
Contre :
Agence pour une vie de qualité (AViQ),
Partie adverse,
Vu l’article 32 de la Constitution ;
Vu le décret du 30 mars 1995 relatif à la publicité de l’Administration, tel qu’il a été modifié par le décret du 2 mai 2019, l’article 8, § 1er ;
Vu l’arrêté du Gouvernement wallon du 9 juillet 1998 fixant la composition et le fonctionnement de la Commission d’accès aux documents administratifs ;
Vu le recours introduit par courriel le 12 septembre 2020 ;
Vu la demande d’information adressée à la partie adverse le 17 septembre 2020 et reçue le 18 septembre 2020 ;
Vu la réponse de la partie adverse du 1er octobre 2020.
Objet et recevabilité du recours
1. La demande du 8 septembre 2020 porte sur l’obtention sous forme de copie :
« 1) Une ventilation, par MR/MRS[1], du nombre de décès de patients. Autrement dit le nombre exact de décès survenu dans chaque établissement de Wallonie, en ce compris l’âge et le sexe de chacune de ces victimes.
2) Une ventilation, par MR/MRS, du nombre de membres du personnel soignant et de soutien testés positivement au Covid-19.
3) Une ventilation, par MR/MRS, du nombre de membres du personnel soignant et de soutien ayant dû être hospitalisés suite à une contamination Covid-19.
4) Une ventilation, par MR/MRS, du nombre de membres du personnel soignant et de soutien ayant décédé des suites du Covid-19.
5) Copie de toutes les plaintes qui auraient été déposées depuis le 1er mars 2020 à l’encontre de MR/MRS sous la responsabilité de l’Aviq. Etant entendu que, tant par souci déontologique que par respect du RGPD, tous les noms de personnes seront anonymisés.
6) Le nombre de résidents dans les MR/MRS wallonnes et la part d’entre eux qui ont été testés positifs depuis le mois de mars.
7) Le taux d’absentéisme du personnel soignant et de soutien dans les MR/MRS wallonnes durant la crise du Covid-19 »
2. Les documents sollicités sont des documents administratifs au sens de l’article 1er, alinéa 2, 2°, du décret, s’ils existent et sont en possession de la partie adverse.
3. La demande date du 8 septembre 2020 et a été rejetée explicitement par l’entité concernée le 11 septembre 2020. La partie requérante a donc introduit valablement son recours dans le délai de 30 jours visé à l’article 8bis, alinéa 1er, premier tiret, du décret du 30 mars 1995, prenant cours le lendemain de la décision de rejet explicite.
Le 1er octobre 2020 la partie adverse informe le secrétariat de la Commission qu’elle a transmis des documents sollicités à la partie requérante, visés ci-dessus aux points 1 et 5. La partie requérante confirme la réception de ces documents au secrétariat de la Commission par un courriel du 2 octobre 2020, sauf en ce qui concerne le point 1 de sa demande. Partant, le recours a perdu son objet pour le point 5.
4. La partie adverse indique par ailleurs qu’elle ne dispose pas de la plupart des autres informations demandées (sous les points 2, 3, 4, 6 et 7 ci-dessus). Ces documents ne rentrent dès lors pas dans la définition du document administratif au sens de l’article 1er, 2ème alinéa, 2°, du décret, dès lors qu’ils ne sont pas en possession de l’autorité. Partant, le recours est sans objet en ce qui concerne ces points 2, 3, 4, 6 et 7.
La partie adverse a renvoyé la partie requérante vers l’autorité qui selon elle pourrait détenir les documents sollicités, conformément à l’article 7, alinéa 3, du décret.
Examen du recours
5. À propos du point 1, la partie adverse considère que :
« la communication des données pour chaque MR/MRS serait « source de méprise, le document étant inachevé ou incomplet », au sens de l’article 6, §3, 1°, du décret du 30 mars 2005 sur la publicité de l’administration. En effet, ces données pour chaque MR/MRS n’ont pas encore pu être précisément contrôlées. Il n’est pas impossible que les informations ne soient pas toutes correctement encodées. La cause des décès n’a pas non plus été vérifiée. Ces informations ne sont donc pas complètes. Elles peuvent donner une image inexacte de la réalité et, en ce sens, être source de méprise, sur la manière dont chaque MR/MRS a géré la crise.
[…] Les informations en question ont été communiquées par les MR/MRS à la demande de l’AViQ, dans un but de monitoring et de gestion de la crise sanitaire. L’objectif était de détecter d’éventuels foyers de maladie au sein des MR/MRS en vue de déterminer la nécessité d’une éventuelle aide extérieure activée par l’AViQ ou les gouverneurs.
Le nombre exact de cas dans chaque établissement importait moins que la tendance d’évolution observée : la MR parvenait-elle à maîtriser la situation ou avait-elle besoin d’un soutien extérieur ? L’important était d’identifier les établissements dans lesquels au moins un cas était constaté, de manière à agir en conséquence. Au moment de la gestion de ces données, le fait que celles-ci n’étaient pas nécessairement complètes était sans incidence. Par contre, aujourd’hui, ce caractère incomplet pourrait être source de méprise et nuire de manière injustifiée à la réputation de certains établissements. Il convient également de souligner que les MR/MRS ont volontairement communiqué ces informations à l’AViQ mais qu’elles n’ont jamais consenti à ce qu’elles soient transmises à des tiers. »
6. La Commission rappelle que, selon sa jurisprudence, le caractère inachevé et incomplet, engendrant un risque de méprise, peut par exemple se dégager du caractère « non officiel » du document, présenté comme un instrument de travail dont toutes les conséquences ne sont pas dégagées, du caractère partiel des informations en possession de l’autorité ou encore de la présentation formelle du document qui peut être source de méprise[2].
En l’espèce, la collecte des données par maison de repos et par maison de repos et de soin constitue à l’évidence un instrument de travail agrégé dans l’urgence de la crise sanitaire par la partie adverse ; elle n’a manifestement pas été conçue pour répondre adéquatement à la demande d’informations de la partie requérante, eu égard notamment au caractère incomplet et non vérifié des données qui y figurent.
Conformément à l’article 6, §3, 1°, du décret du 30 mars 1995, l’entité peut rejeter la demande s’agissant de telles informations car leur publication peut être source de méprise, le document étant inachevé et incomplet.
Le recours est rejeté.
Par ces motifs, la Commission décide :
Le recours a perdu son objet en ce qui concerne le point 5 de la demande.
Le recours est irrecevable en ce qui concerne les points 2, 3, 4, 6 et 7 de la demande.
Le recours est rejeté pour le surplus.