Province – Documents et explications relatifs à la vente d'un domaine – Irrecevabilité partielle – Recours partiellement sans objet – Vie privée – Communication partielle
En cause :
[…],
Partie requérante,
Contre :
La Province de Luxembourg,
Partie adverse,
Vu l’article 32 de la Constitution ;
Vu l’article 8, § 1er, du décret du 30 mars 1995 relatif à la publicité de l’Administration (ci-après, le décret du 30 mars 1995) tel qu’il a été modifié par le décret du 2 mai 2019 modifiant le décret du 30 mars 1995 relatif à la publicité de l'Administration et le Code de la démocratie locale et de la décentralisation en vue de renforcer le rôle de la Commission d'accès aux documents administratifs (CADA) de la Région wallonne ;
Vu le Code de la démocratie locale et de la décentralisation (ci-après : le CDLD), plus particulièrement les articles L3231-1 et suivants ;
Vu l’arrêté du Gouvernement wallon du 9 juillet 1998 fixant la composition et le fonctionnement de la Commission d’accès aux documents administratifs ;
Vu le recours introduit par courriel le 20 février 2022 ;
Vu la demande d’information adressée à la partie adverse le 22 février 2022 et reçue le 23 février 2022 ;
Vu la réponse de la partie adverse du 3 mars 2022, réceptionnée le 7 mars 2022 ;
Vu la décision de proroger de 15 jours le délai prévu à l’article 8quinquies, § 1er, du décret du 30 mars 1995, compte tenu de la charge de travail importante de la Commission.
I. Objet du recours
- La demande du 27 janvier 2022 à la Province de Luxembourg porte sur l’obtention du PV du conseil provincial du 18 décembre 2021, le projet de résolution n° 11 et ses deux annexes ainsi que sur l’obtention d’explications relatifs à la vente du "domaine du Celly" sis à 6680 Sainte-Ode. Cette demande fait l’objet de huit points distincts.
Par un courriel du 7 février 2022, la demande a été étendue à l’obtention, « si cela est possible », du projet de compromis à signer avec le promoteur.
Par un courrier daté du 10 février 2022, expédié par la poste le 11 février 2022, la partie adverse a apporté une réponse concernant les huit points contenus dans la demande du 27 janvier 2022. Ce courrier précise qu’en annexe à ce dernier, figure une copie du PV du conseil provincial du 18 décembre 2021 ainsi que le projet d’acte de transfert.
Par courriel du 14 février 2022, la requérante a posé une neuvième question à la partie adverse portant sur des « éclaircissements quant aux modalités des votes de l’Asbl […] (et de la Province) sur l’acceptation du transfert du bien appartenant à la Fondation […], puisque, si je ne m’abuse, parmi ces membres, il y a des conseillers provinciaux ».
- Dans son recours à la Commission introduit par courriel du 20 février 2022, la partie requérante définit comme il suit le « récapitulatif de [ses] questions dans l’ordre des numéros de lettre et auxquelles la Province n’a pas répondu ou peu :
- 0. Dans la lettre de la Province envoyée par la poste, cette dernière me dit joindre le PV du CP du 18/12/21 et ses annexes --> mais ils n’y sont pas…
- 1. Pas de preuve quant au système de transfert du […] en liquidation vers l’ASBL […], donc.
- 2. Pas de preuve, non plus, que l’ASBL […] est bien propriétaire des 83ha
- et pas de répnse sur le fait que le promoteur devait être choisi quand le bien serait transféré à l’ASBL…
- 3. Pas de réponse sur la Séniorerie de Sainte-Ode (centre du site), alors que le promoteur a déjà inclus ce home dans les transformations et l’a expliqué lors de la réunion d’information préalable pour l’étude d’incidence environnementale (je peux vous fournir le PV établi par la Commune de Sainte-Ode)
- 4. et 9. Pas de convention fournie pour corroborer le fait que les statuts de l’ASBL règlent les modalités de désignation des administrateurs par… la Province, elle-même, dont certains membres sont des élus provinciaux ; ni sur les modalités des votes à deux casquettes…
- 5. /
- 6. Le Promoteur (via sa société […]) est domicilié […]. Ce fait est avéré puisque je leur ai fourni les pré-statuts du MB et je possède une photo avec la boite aux lettres qui y est apposée…
- 7. Je désire bien entendu obtenir les statuts du […] qui prouve (sic) que le transfert des biens était régi ainsi.
- 8. Si je comprends bien la réponse de la Province à cette question, c’est […] qui a vendu l’hôpital ; puis-je en obtenir les documents ? Puis-je aussi obtenir le document de l’emphytéose ? ».
- Le 2 mars 2022, postérieurement à l’introduction de son recours, la partie requérante a adressé un courriel au secrétariat de la Commission précisant ce qui suit :
- l’objet de leur réponse n’est pas le même que le mien dans ma lettre du 27/01/22 ;
- je n’ai pas reçu le PV du CP du 18/12/21 et ses annexes comme annoncé dans leur réponse ;
- je n’ai pas reçu de réponse à ma question n° 9 posée dans 1 mail supplémentaire à ma lettre du 27/01/22, à savoir : demande d’éclaircissements quant aux modalités des votes (de l’Asbl […] >< « Province ») sur l’acceptation du transfert du bien appartenant à la Fondation […], puisque, si je ne m’abuse, parmi les membres de l’Asbl, il y a des élus conseillers provinciaux (contraire au ROI de la Province).
- que la Province cite de nouvelles données, mais qu’elle ne les fournit pas, à savoir :
-
- décision du 06/12/21 par laquelle le CA de l’Asbl […] accepte le transfert du bien appartenant à la Fondation […] en liquidation ;
- acte authentique chez […] du transfert de propriété vers l’Asbl […] du 20/12/21 ;
- statuts de […] pur ex-PG et ex-PP qui mentionnent la cession de l’actif net de l’ASBL […] ira à la Province ;
- acte de transfert du bâtiment « hôpital » à […] ;
- acte de vente du bâtiment « hôpital » à la société […] ;
- bail emphytéotique de la Province ;
Si cela est permis, pouvez-vous ajouter cette pièce et Ces demandes de documents complémentaires à mon recours n° 240 : […] c/ Province du Luxembourg ? »
En annexe à ce courriel du 2 mars 2022, figurait un courriel adressé le 26 février 2022 par la partie requérante à la partie adverse, sollicitant que le PV du conseil provincial du 18 décembre 2021 et ses annexes lui soient communiqués par retour de courriel, et que des documents et explications complémentaires lui soient transmis, incluant, entre autres :
- la confirmation que ce sont bien les 83ha mis en vente, en totalité, qui sont concernés par la liquidation du […] ;
- la décision du 6 décembre 2021 par laquelle le conseil d’administration de l’ASBL […] accepte le transfert du bien appartenant au […] ainsi que l’acte authentique de transfert du 20 décembre 2021 passé chez le notaire […] ;
- les statuts du […] ;
- les décisions régissant le transfert du bâtiment de l’hôpital à [...] ;
- l’acte de vente du bâtiment « hôpital » ;
- le bail emphytéotique de la Province.
Il convient de noter que dans ce courriel du 26 février 2022, la partie requérante précisait toutefois qu’elle disposait déjà d’une copie du jugement du 27 mars 2020.
II. Compétence matérielle de la Commission et recevabilité du recours
- Dans sa demande du 27 janvier 2022, la requérante ne sollicitait pas :
- concernant la première partie de l’objet n° 2 du recours, la « preuve (…) que l’ASBL […] est bien propriétaire des 83ha » ;
- concernant l’objet n° 4 du recours, la communication d’une « convention (…) pour corroborer le fait que les statuts de l’ASBL règlent les modalités de désignation des administrateurs par… la Province, ellemême, dont certains membres sont des élus provinciaux » ;
- concernant l’objet n° 7 du recours, les « statuts du […] qui prouve (sic) que le transfert des biens était régi ainsi » ;
- concernant l’objet n° 8 du recours, les documents relatifs au fait que « c’est […] qui a vendu l’hôpital » ainsi que « le document de l’emphytéose ».
En effet, dans sa demande du 27 janvier 2022, la requérante posait les questions suivantes :
- « 2. Puisje en conclure que, comme instillé dans votre procès-verbal du 18/12/20 que tout ou partie des 83ha mentionnés dans l’appel à manifestation (dont j’ai pris connaissance grâce à la publication internet[…]) soit encore la propriété du [...] ? Si oui, je vous serai gréé de m’en donner une vision fouillée et, de surcroit, m’éclairer sur la permission décidée par votre Conseil du 27/11/20 de la sélection du candidat acquéreur qui devait se faire lorsque le bien devait effectivement être transféré dans le patrimoine propre de l’ASBL […] ? ».
La requérante posait donc une première question consistant à savoir si [...] était encore propriétaire de tout ou partie des 83ha mentionnés dans l’appel à manifestation. Dans l’affirmative, la requérante posait une deuxième question.
La partie adverse y a répondu en précisant que le bien était la propriété de l’ASBL […], ce qui n’impliquait, de facto, pas de réponse à la seconde question.
- « 4. Dans quels contextes (juridiques, conventions ou autres) la Province de Luxembourg at-elle l’apanage de désigner les membres de l’ASBL […] ?
Toutes conventions ou explications écrites sont, vous le comprendrez, nécessaires à ma compréhension ».
Par cette question, la partie requérante ne sollicitait donc pas forcément la communication d’une « convention », mais se limitait à solliciter « toutes conventions ou explications écrites » (la Commission souligne) en fonction de l’hypothèse rencontrée.
Or, dans son courrier du 10 février 2022 adressé à la partie requérante, la partie adverse a bien répondu à la question posée en fournissant à la partie requérante l’explication écrite suivante : « Les statuts de l’ASBL […] règlent les modalités de désignation des administrateurs ».
- « 7. Vu l’article 32 des statuts de l’ASBL […], existet-il aussi une convention écrite qui décide que cette association cèdera son ‘actif net’ à l’organe « Province du Luxembourg ».
Par cette question, la partie requérante ne sollicitait donc pas la communication des statuts de [...].
La partie adverse a répondu à cette question en précisant que comme l’indiquait la requérante, les statuts de l’ASBL réglait la question de la cession de ses biens à la Province du Luxembourg, le transfert des biens étant lui-même préalablement régi par les statuts de [...].
- « 8. En cas de dissolution/liquidation de l’ASBL […], comment, alors, la Province garantirat-elle son investissement dans la poursuite du but social des activités pour ex-prisonniers et apparentés ? »
La partie adverse y a répondu en précisant ce qui suit :
« Toute l’opération de liquidation a commencé en 1993, lorsque l’hôpital de Sainte-Ode, purement privé, a progressivement migré vers le giron public : intercommunale de soins de santé et Province.
Le mouvement s’est poursuivi par la fusion hospitalière, la désignation du liquidateur, le transfert du bâtiment de l’hôpital à l’intercommunale, sa revente par celle-ci, le bail emphytéotique de la Province et les opérations actuellement en cours, la Province ayant estimé ne pas pouvoir conserver ce patrimoine.
Tous ces actes et mouvements sont à situer dans l’écoulement du temps qui a petit-à-petit vu s’estomper, par la force des choses, l’affectation principale des lieux aux prisonniers de guerre. Les représentants de ceux-ci, véritables visionnaires, ont dessiné, il y a presque trente ans, la situation juridique actuelle ».
Ainsi, ce n’est que suite à la prise de connaissance du courrier de la partie adverse du 10 février 2022 que la partie requérante a sollicité des documents et explications complémentaires dans son recours. Cette demande de documents et explications complémentaires a, en parallèle, fait l’objet d’un courriel adressé le 26 février 2022 à la partie adverse portant, entre autres, sur (i) l’information selon laquelle ce sont bien les 83ha mis en vente, en totalité, qui sont concernés par la liquidation du […], (ii) l’acte authentique de transfert entre le […] vers l’ASBL […] du 20 décembre 2021 passé chez le notaire […] et (iii) les statuts […].
Cette demande de documents et explications complémentaires excède l’objet de la demande initiale qui a été adressée à la partie adverse et ne peut donc pas avoir fait l’objet d’une décision de rejet, même implicite, de la partie adverse préalable au présent recours.
L’article 8bis du décret du 30 mars 1995 exige, pour l’introduction d’un recours devant la présente Commission, l’existence d’une décision de rejet, explicite ou implicite, d’une demande d’accès aux documents administratifs.
En ce qu’une telle décision de rejet est, en l’espèce, inexistante concernant la première partie de l’objet n° 2, l’objet n° 4, l’objet n° 7 et l’objet n° 8 du recours, le recours est, par conséquent, irrecevable à leur égard[1].
- Par ailleurs, la demande aux termes de laquelle la requérante a posé une neuvième question à la partie adverse portant sur des « éclaircissements quant aux modalités des votes de l’Asbl […], (et de la Province) sur l’acceptation du transfert du bien appartenant à la Fondation […], puisque, si je ne m’abuse, parmi ces membres, il y a des conseillers provinciaux » a été formulée par courriel du 14 février 2022, soit postérieurement au courrier de la partie adverse du 10 février 2022 faisant l’objet du présent recours.
Le délai dont la partie adverse disposait pour statuer n’était pas encore expiré le 20 février 2022, jour de l’introduction du présent recours. Celui-ci est, par conséquent, prématuré et, partant, irrecevable concernant l’objet suivant du recours[2] :
« (…) et 9. Pas de convention fournie (…) sur les modalités des votes à deux casquettes ».
- Dès lors qu’il n’y a pas d’objet n° 5 du recours[3], il reste à examiner si les objets n° 0, 1, 2 (seconde partie), 3 et 6 du recours, portent bien sur des documents administratifs au sens de l’article L3211-3, 2°, du CDLD.
6.1. Pour rappel, l’article L3211-3, 2°, du CDLD définit le document administratif comme « toute information, sous quelque forme que ce soit, dont une autorité dispose ».
Conformément à l’article L3231-1, alinéa 1er, du CDLD, « Le droit de consulter un document administratif d'une autorité administrative provinciale ou communale et de recevoir une copie du document consiste en ce que chacun, selon les conditions prévues par le présent livre, peut prendre connaissance sur place de tout document administratif, obtenir des explications à son sujet et en recevoir communication sous forme de copie ».
Le droit d’obtenir des explications au sujet d’un document administratif est une des modalités de la publicité passive prévue par toutes les législations relatives à la publicité de l’administration.
Selon les travaux préparatoires de la loi fédérale, ce droit d’explications s’impose car « dans la plupart des cas, la publicité sans explications resterait lettre morte en raison du caractère administratif du langage utilisé ou de la technicité des documents »[4].
Selon la Commission fédérale d’accès aux documents administratifs, « le droit d’explication comprend seulement la possibilité pour le demandeur d’obtenir des informations dans un langage compréhensible au sujet du contenu d’un texte existant et se limite à cela »[5]. Elle précise par ailleurs que toute question (et donc toute demande d’explication) doit porter sur un document existant, et dont l’information est matérialisée sur un support[6].
La Commission régionale d’accès à l’information environnementale (CRAIE) rejette systématiquement les demandes d’explications lorsque « la réponse à ces demandes d’explications ou de précisions implique l’établissement d’un document nouveau »[7]. L’information doit donc préexister à l’explication, et l’autorité peut donc légitimement rejeter « les demandes qui impliqueraient un réel travail de consolidation, d’analyse ou d’interprétation de données de la part de l’autorité publique qui en est saisie »[8] .
Il s’ensuit que les explications qui doivent être données par les autorités administratives se limitent strictement au contenu du document demandé, et ne devraient porter que sur l’explication des termes administratifs, juridiques ou techniques utilisés dans ce document. Il est néanmoins possible que, dans ce cadre, des étapes de l’instruction du dossier doivent parfois être expliquées[9].
Par conséquent, le droit d’obtenir des explications au sujet d’un document administratif suppose que ce document soit identifié et existant, et ne peut être interprété comme ouvrant un droit général à interroger une entité sur une thématique donnée, par le biais de questions ouvertes appelant des justifications ou explications d’ordre général.
La Commission rappelle, par ailleurs, que les entités administratives ne sont pas tenues de créer un document administratif nouveau pour remplir leurs obligations relatives à la publicité passive[10].
6.2. En l’espèce, les objets n° 0 et 1 du recours se confondent. Ils visent, en effet, à obtenir le PV de la séance du conseil provincial du 18 décembre 2021 ainsi que ses annexes, lesquels documents traitent du transfert du bien appartenant à la Fondation […] en liquidation vers l’ASBL […].
Les documents sollicités, dès lors qu’ils existent et sont en possession de la partie adverse, sont des documents administratifs au sens de l’article L3211-3, 2°, du CDLD.
La Commission est donc compétente ratione materiae pour connaître du recours en ce qui concerne les objets n° 0 et 1. Le recours est, par conséquent, recevable à leur égard.
6.3. La seconde partie de l’objet n° 2 du recours est, pour rappel, formulée comme il suit : « 2. (…) et pas de réponse sur le fait que le promoteur devait être choisi quand le bien serait transféré à l’ASBL ». Cette partie de l’objet n° 2 du recours porte, en réalité, sur la question n° 5 posée dans la demande initiale du 27 janvier 2022.
Cette question était formulée de la manière suivante :
« L’ASBL […] est-elle légitime à lancer une procédure de vente sans encore (probablement, si vous répondez par l’affirmative à ma question 2, plus haut) être propriétaire du bien qu’elle annonce ?
Si oui, merci de me fournir les textes ou conventions s’y rapportant ».
Dans son courrier du 10 février 2022 adressé à la partie requérante, la partie adverse a répondu à cette question comme il suit :
« La procédure d’appel à manifestation d’intérêt a été lancée le 05 janvier 2021 forte du jugement du 27 mars 2020 du TPI du Luxembourg autorisant Me […], agissant en qualité de liquidateur judiciaire de [...], à transférer le solde du patrimoine immobilier dudit établissement à l’ASBL […] ».
Cette seconde partie de l’objet n° 2 du recours ne vise ainsi pas à obtenir des explications dans un langage compréhensible au sujet du contenu d’un document administratif identifié et préexistant, mais à obtenir des justifications quant à la régularité d’une procédure. La demande implique donc que, pour y répondre, l’entité à laquelle elle est adressée établisse un document nouveau.
Force est dès lors de constater que la demande ne concerne pas un document administratif au sens de l’article L-3211-3, 2°, du CDLD.
La Commission n’est donc pas compétente ratione materiae pour connaître du recours en ce qui concerne la seconde partie de son objet n° 2. Le recours est, par conséquent, irrecevable à son égard.
6.4. L’objet n° 3 du recours est, pour rappel, formulé comme il suit : « 3. Pas de réponse sur la Séniorerie […] (centre sur le site), alors que le promoteur a déjà inclus ce home dans les transformations et l’a expliqué lors de la réunion préalable pour l’étude d’incidence environnementale (je peux vous fournir le PV établi par la Commune de Sainte-Ode) ». Cet objet n° 3 du recours porte sur la question n° 3 posée dans la demande initiale du 27 janvier 2022.
Cette question était formulée de la manière suivante :
« De ce point 2., naissent, alors, de nouvelles interrogations, à savoir si de mêmes « modus operandi » peuvent être par la suite (ou sont déjà) organisés pour d’autres parties du bien mis en vente et/ou ses/des surplus et, plus particulièrement, comme mentionné dans ce même PV du 18/12/20, qu’à cela s’ajoute la question du devenir de la Séniorerie de Sainte-Ode, située à 100 m seulement du Château de Celly.».
Dans son courrier du 10 février 2022 adressé à la partie requérante, la partie adverse a répondu comme il suit :
« La vente de la Séniorerie n’est pas visée par la présente procédure ».
Le PV de la séance du conseil provincial du 18 décembre 2020 dont question dans la demande initiale du 27 janvier 2022 se limite à préciser, au sujet de la Séniorerie de Sainte-Ode :
« le souhait de la Province de Luxembourg de valoriser le Domaine du Celly à Sainte-Ode, en bordure immédiate des Communes de Tenneville et de Bertogne ; que ce domaine de près de 100ha constitué de vastes espaces boisés, d’un château érigé en 1931 et de quelques dépendances pavillonnaires est pratiquement inoccupé depuis plus de 10 ans et mérite de faire l’objet d’une attention particulière ; qu’à cela s’ajoute la question du devenir de la Séniorerie Saitne-Ode, située à 100m seulement du Château du Celly, et qui, dans un horizon d’une ou deux années, devrait voir ses activités déménagées sur une nouvelle implantation ; que face à cet état des lieux, la Province de Luxembourg, prochainement propriétaire de l’ensemble du domaine du Celly, (hormis de l’ancien centre hospitalier racheté par la société […] et transformé par celle-ci en centre pour demandeurs d’asile), souhaite pouvoir valoriser le site et le réaffecter à une activité génératrice d’attractivité et de plus-value pour la région » (la Commission souligne).
L’objet n° 3 du recours ne vise pas à obtenir des explications dans un langage compréhensible au sujet du contenu d’un document administratif identifié et préexistant, mais à interroger une entité sur sa politique ou sur une thématique donnée, par le biais de questions ouvertes appelant des justifications ou explications d’ordre général. La demande implique également que, pour y répondre, l’autorité à laquelle elle est adressée établisse un document nouveau.
Il s’ensuit que la demande ne concerne pas un document administratif au sens de l’article L-3211-3, 2°, du CDLD.
La Commission n’est donc pas compétente ratione materiae pour connaître du recours en ce qui concerne son objet n° 3. Le recours est, par conséquent, irrecevable à son égard.
6.5. L’objet n° 6 du recours est, pour rappel, formulé comme il suit : « 6. Le Promoteur (via sa société […]) est domicilié […]. Ce fait est avéré puisque je leur ai fourni les pré-statuts du MB et je possède une photo avec la boite aux lettres qui y est apposée… ». Cet objet n° 6 du recours porte sur la question n° 6 posée dans la demande initiale du 27 janvier 2022.
Cette question était formulée comme il suit :
« Peu ou prou, si ces faits sont rencontrés (et sans véritable négociation entre acteurs concernés, ni compromis signé, semble-t-il à la compréhension de votre dernière réunion), la société acheteuse, paraît-il, « […] », peut-elle déjà se domicilier sur les lieux, comme c’est le cas ?
Si oui :
- Il y a-t-il eu, dès lors, un véritable « negotium » à défaut d’ « instrumentum » ? Si oui, quels en sont les teneurs et conditions ?
- Et par l’entremise de quel organe ?
Si non :
Par quelle autre procédure légitime (location) ? ».
Dans son courrier du 10 février 2022 adressé à la partie requérante, la partie adverse a répondu de la manière suivante :
« La Province n’est nullement intervenue dans la domiciliation de ladite société et n’a pas été consultée à ce sujet.
Pour autant que ces faits soient avérés, il y a lieu de vérifier que la domiciliation soit applicable ».
L’objet n° 6 du recours ne vise donc pas à obtenir des explications dans un langage compréhensible au sujet du contenu d’un document administratif identifié et préexistant, mais à obtenir des informations, sans qu’il soit avéré que celles-ci concernent un document administratif existant, ou à interroger l’entité sur une thématique donnée, par le biais de questions ouvertes appelant des justifications ou explications d’ordre général. La demande implique donc également que, pour y répondre, l’autorité à laquelle elle est adressée établisse un document nouveau.
Force est dès lors de constater que la demande ne concerne pas un document administratif au sens de l’article L-3211-3, 2°, du CDLD.
La Commission n’est donc pas compétente ratione materiae pour connaître du recours en ce qui concerne son objet n° 6. Le recours est, par conséquent, irrecevable à son égard.
- Pour le surplus, en ce qu’elle porte sur le PV de la séance du conseil provincial du 18 décembre 2021 ainsi que ses annexes (objets n° 0 et n° 1), la demande a bien été rejetée explicitement par l’entité concernée par un courrier daté du 10 février 2022, reçu, selon la partie requérante, le 15 février 2022. A leur égard, la partie requérante a donc introduit valablement son recours dans le délai de 30 jours visé à l’article 8bis, alinéa 1er, premier tiret, du décret du 30 mars 1995, prenant cours le lendemain du rejet explicite.
- Enfin, par son courriel du 2 mars 2022 adressé au secrétariat de la Commission, la partie requérante réitère des demandes qu’elle avait déjà formulées dans son recours du 20 février 2022, mais formule également d’autres demandes.
En ce qui concerne les demandes qui avaient déjà été formulées dans son recours du 20 février 2022, la Commission renvoie :
- au point 6.2. de la présente décision concernant le fait que « je n’ai par (sic) reçu le PV du CP du 18/12/21 et ses annexes comme annoncé dans leur réponse » ;
- au point 5 de la présente décision concernant le fait que « je n’ai pas reçu de réponse à ma question n° 9 posée dans 1 mail supplémentaire à ma lettre du 27/01/22, à savoir : demande d’éclaircissements quant aux modalités des votes (de l’Asbl […] >< « Province ») sur l’acceptation du transfert du bien appartenant à la Fondation […], puisque si je ne m’abuse, parmi les membres de l’Asbl, il y a des élus conseillers provinciaux (contraire au ROI de la Province) ».
Les autres demandes correspondent aux « nouvelles données » citées par la partie adverse dans son courrier du 10 février 2022, lesquelles ont fait l’objet, en parallèle, d’une nouvelle demande de communication auprès de la partie adverse par un courriel adressé par la requérante le 26 février 2022. A supposer qu’il faille interpréter le courriel adressé le 2 mars 2022 par la partie requérante au secrétariat de la commission comme consistant en une demande d'extension de l'objet de son recours en ce qui concerne ces « nouvelles données », il convient de relever que celles-ci ne figuraient pas dans la demande initiale, avec pour effet qu’il n’existe pas de décision de rejet de la part de la partie adverse. La demande d’extension de l’objet du recours est donc irrecevable, par identité de motifs avec ce qui est exposé au point 4 de la présente décision.
III. Examen du recours
- Dans sa réponse du 3 mars 2022 à la Commission, la partie adverse précise que les documents demandés ont été envoyés à la requérante en annexe au courrier du 10 février 2022, envoyé le 11 février 2022.
En annexe à sa réponse, la partie adverse joint, outre les échanges de courriels avec la partie requérante, le courrier daté du 10 février 2022 qu’elle a adressé à la requérante ainsi que le PV du conseil provincial du 18 décembre 2021 accompagné du PV du conseil d’administration de l’ASBL […] du 3 décembre 2021 par procédure écrite et de ses trois annexes, à savoir :
- annexe 1 : PV de l’assemblée générale de l’ASBL […] du 12 septembre 2016 ;
- annexe 2 : jugement prononcé le 27 mars 2020 par le tribunal de première instance du Luxembourg, division Neufchâteau ;
- annexe 3 : projet d’acte de transfert du solde du patrimoine immobilier de [...] à l’ASBL […] rédigé par le notaire […].
- La partie requérante précise, dans son recours, qu’aucune annexe n’était jointe au courrier de la partie adverse du 3 mars 2022, de sorte qu’elle ne dispose toujours pas du PV du conseil provincial du 18 décembre 2021 et de ses annexes (objet n° 0 du recours), ni, par conséquent, de « preuve quant au système de transfert du […] en liquidation vers l’ASBL […] » (objet n° 1 du recours).
La Commission relève toutefois que dans son courriel du 26 février 2022, la partie requérante précise avoir déjà reçu une copie du jugement du 27 mars 2020, lequel constitue l’annexe 2 du PV du conseil d’administration de l’ASBL […] du 3 décembre 2021. Le recours est donc, à cet égard, sans objet.
Pour le surplus, la partie adverse ne soulève aucune exception légale qui empêcherait la communication du PV du conseil provincial du 18 décembre 2021, du PV du conseil d’administration de l’ASBL […] du 3 décembre 2021 par procédure écrite ou des annexes 1 et 3 dudit PV du 3 décembre 2021. La Commission constate qu’aucune exception légale ne s’oppose, effectivement, à la communication de ces documents, sous réserve de la mention du numéro national des administrateurs de l'ASBL […], qui figure sur un document annexé au PV de l'assemblée générale de ladite ASBL du 12 septembre 2016, dès lors que cette mention touche à la vie privée de ces administrateurs.
Il y a donc lieu de communiquer ces documents à la partie requérante, qui précise ne pas les avoir reçus, en occultant le numéro national des administrateurs de l’ASBL […] figurant dans le document précité.
- Vu le peu d’éléments à occulter, la communication des documents qui précèdent doit être faite dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la présente décision.
Par ces motifs, la Commission décide :
Le recours est irrecevable en tant qu’il porte sur les objets n° 2, n° 3, n° 4, n° 6, n° 7, n° 8 et n° 9, et recevable en tant qu’il porte sur les objets n° 0 et n° 1.
A supposer qu’il faille interpréter le courriel adressé le 2 mars 2022 par la partie requérante au secrétariat de la commission comme consistant en une demande d'extension de l'objet de son recours en ce qui concerne les « nouvelles données » citées par la partie adverse dans son courrier du 10 février 2022, cette demande est irrecevable.
Le recours est sans objet en tant qu’il porte sur le jugement du 27 mars 2020, lequel constitue l’annexe 2 du PV du conseil d’administration de l’ASBL […] du 3 décembre 2021.
Pour le surplus, le recours est partiellement fondé.
La partie adverse doit communiquer les documents tels que visés au point 10 de la présente décision à la partie requérante en occultant la mention du numéro national des administrateurs de l'ASBL […] qui figure sur un document annexé au PV de l'assemblée générale de ladite ASBL du 12 septembre 2016, et ce, dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la décision.