Ministre-Président – Ministre du Climat, de l'Énergie, de la Mobilité et des Infrastructures – Montants des aides énergétiques – Informations environnementales – Incompétence ratione materiae
En cause :
[…],
Partie requérante,
Contre :
-Le Ministre-Président wallon,
Première partie adverse,
-Le Ministre wallon du Climat, de l’Énergie, de la Mobilité et des Infrastructures,
Deuxième partie adverse,
Vu l’article 32 de la Constitution,
Vu l’article 1er, alinéa 1er, et l’article 8, § 1er, du décret du 30 mars 1995 relatif à la publicité de l’Administration (ci-après, le décret du 30 mars 1995),
Vu l’arrêté du Gouvernement wallon du 9 juillet 1998 fixant la composition et le fonctionnement de la Commission d’accès aux documents administratifs,
Vu le recours introduit par courriel le 12 mai 2022,
Vu la demande d’informations adressée à la partie adverse le 9 juin 2022 et reçue le 10 juin 2022,
Vu l’absence de réponse de la première partie adverse,
Vu la réponse de la deuxième partie adverse du 25 juin 2022,
Vu la décision de proroger le délai prévu à l’article 8quinquies, § 1er, du décret du 30 mars 1995, compte tenu de la charge de travail importante de la Commission.
- Objet du recours
- La demande porte sur l’obtention d’une copie de « tous documents détenus par l’autorité et dans lequel (sic) se trouve l’information recherchée », à savoir les « montants des aides énergétiques reçues via les accords de branche par les filiales du groupe AGC (Asahi Glass Company) ».
II. Compétence de la Commission
- L'article 2, § 1er, du décret du 30 mars 1995 dispose :
« §1er. Le présent décret ne s'applique pas aux informations environnementales définies à l'article D.6., 11°, du Livre 1er du Code de l'Environnement ».
Selon l’article D. 6, 11°, du livre Ier du Code de l’Environnement, la notion d’ « information environnementale » est définie comme étant :
« toute information, détenue par une autorité publique ou pour son compte, disponible sous forme écrite, visuelle, sonore, électronique ou toute autre forme matérielle, concernant:
a. l'état des éléments de l'environnement, tels que l'air et l'atmosphère, l'eau, le sol, les terres, les paysages et les sites naturels, y compris les biotopes humides, les zones côtières et marines, la diversité biologique et ses composantes, y compris les organismes génétiquement modifiés, ainsi que l'interaction entre ces éléments ;
b. des facteurs, tels que les substances, l'énergie, le bruit, les rayonnements ou les déchets, les émissions, les déversements et autres rejets dans l'environnement, qui ont ou sont susceptibles d'avoir des incidences sur les éléments de l'environnement visés au point a. ;
c. les mesures, y compris les mesures administratives, telles que les politiques, les dispositions législatives, les plans, les programmes, les accords environnementaux et les activités ayant ou susceptibles d'avoir des incidences sur les éléments et les facteurs visés aux points a. et b., ainsi que les mesures ou activités destinées à protéger ces éléments ;
d. les rapports sur l'application de la législation environnementale ;
e. les analyses coûts-avantages et autres analyses et hypothèses économiques utilisées dans le cadre des mesures et activités visées au point c. ;
f. l'état de la santé humaine, la sécurité, y compris, le cas échéant, la contamination de la chaîne alimentaire, le cadre de vie, le patrimoine, pour autant qu'ils soient ou puissent être altérés par l'état des éléments de l'environnement visés au point a., ou, par l'intermédiaire de ces éléments, par l'un des facteurs, mesures ou activités visés aux points b. et c. ; ».
Ainsi, en vertu de l’article D.6, 11°, c), du livre Ier du code de l’environnement, la notion d’ « information environnementale » couvre toute information détenue par une autorité publique, concernant les mesures et les activités ayant ou susceptibles d’avoir des incidences sur l’environnement ou destinées à protéger celui-ci[1].
- Lorsque les documents ou informations faisant l’objet du recours constituent des informations environnementales telles que définies par l’article D.6, 11°, du Code de l’environnement, la présente Commission n’est pas compétente, seule la Commission de recours pour le droit d’accès à l’information environnementale (CRAIE) étant compétente. Il ressort, en effet, des travaux parlementaires que l’intention des auteurs de l’avant-projet de Code de l’environnement est établie en ce sens que l’application des textes généraux relatifs à la publicité de l’administration (notamment pour les pouvoirs locaux) ne s’étend pas aux matières environnementales (voy. notamment les décisions n° 101 et n° 104 du 11 janvier 2021, et n° 118 du 1er mars 2021).
« La commission de recours visée à l'article D.20.3, § 1er, du Livre 1er du Code de l'Environnement est chargée de l'application du présent décret pour les documents administratifs dans les recours qu'elle a à connaitre au titre de la procédure de rectification et de recours prévue au sein de la Section 3, du Chapitre II, du Titre Ier, de la Partie III du même Code ».
À ce sujet, les travaux parlementaires précisent :
« Concrètement, cela signifie dès lors que : d’une part, si une personne demande à se voir communiquer un élément de nature non-environnementale présent dans un document de nature environnementale et que celui-ci introduit un recours devant la CADA, celle-ci devra inviter ladite personne à introduire son recours non pas devant la CADA mais devant la CRAIE ; d’autre part, lors de ce recours, la CRAIE aura potentiellement à connaitre des demandes de ladite personne traitant d’informations environnementales (matière réglée par le Code de l’Environnement) et des demandes de cette même personnes traitant d’informations non-environnementales réglées par le présent décret. »[2],[3].
- En l’espèce, la Commission considère que l’information demandée est liée à un accord environnemental en matière d’énergie, qui est susceptible d’avoir une incidence sur l’air et l’atmosphère, dès lors que l’information porte sur les montants d’aide à une entreprise du secteur verrier dans le cadre d’un accord de branche conclu entre ce secteur et la Région wallonne relatif à la réduction des émissions de CO2 et à l’amélioration de l’efficience énergétique. Ainsi qu’il a été indiqué par Monsieur le Ministre de l’Energie dans sa réponse à la question parlementaire du demandeur, ces montants constituent le financement des actions concrètes à mettre en œuvre pour atteindre ces objectifs. Si les montants demandés ne sont pas, en tant que tels, des informations environnementales, ils sont intrinsèquement liés à un document constituant, quant à lui, une information environnementale au sens de l’article D.6, 11°, c.) du Code de l’environnement. Dès lors, la CRAIE est seule compétente pour statuer sur leur éventuelle communication.
- Dès lors, la Commission est incompétente ratione materiae.
Par ces motifs, la Commission décide :
La Commission est incompétente rationae materiae.