Ville – Documents relatifs à des caméras de surveillance – Sécurité de la population – Ordre public – Recherche ou poursuite de faits punissables – Secrets d'affaires – Obligation de secret instaurée par la loi – Demande manifestement trop vague – Obligation de collaboration – Communication partielle
En cause :
[…],
Partie requérante,
Contre :
La Ville de Mouscron,
Partie adverse,
Vu l’article 32 de la Constitution,
Vu l’article 8, § 1er, du décret du 30 mars 1995 relatif à la publicité de l’Administration (ci-après, le décret du 30 mars 1995),
Vu l’article L3211-3 ainsi que les articles L3231-1 et suivants du Code de la démocratie locale et de la décentralisation (ci-après, le CDLD),
Vu l’arrêté du Gouvernement wallon du 9 juillet 1998 fixant la composition et le fonctionnement de la Commission d’accès aux documents administratifs,
Vu le recours introduit par courriel le 27 mai 2022,
Vu la demande d’informations adressée à la partie adverse le 7 octobre 2022 et reçue le 10 octobre 2022,
Vu la réponse de la partie adverse du 25 octobre 2022,
Vu la décision de proroger le délai prévu à l’article 8quinquies, § 1er, du décret du 30 mars 1995, compte tenu de la charge de travail importante de la Commission.
- Objet du recours
- La demande porte sur l’obtention d’une copie des documents suivants :
- « la liste des caméras fixes dans des lieux ouverts accessibles au public, en ce compris les localisations et les responsables de traitement » ;
- « les documents administratifs relatifs à l’installation des dites caméras : les avis délivrés par la commune à destination des responsables de traitement conformément à l’article 5 de la loi du 21 mars 2007 réglant l’installation et l’utilisation de caméras de surveillance » ;
- « les analyses d’impact et les documents relatifs aux marchés publics (appels d’offre, cahiers de charges, documents d’attribution, contrats signés pour l’ensemble des marchés passés, dans le cas des marchés classiques et des accordscadres) concernant les systèmes de surveillance (caméras fixes et mobiles, visuelles et/ou thermiques, drones et bodycams, ANPR, commutateurs et logiciels, etc.) acquis depuis 2000 par la commune, conformément aux lois du 21 mars 2007 et du 17 juin 2016 relative aux marchés publics et de l’arrêté royal du 30 juin 2017 relatif à la passation des marchés publics dans les secteurs classiques ».
II. Compétence de la Commission
- La Commission est compétente ratione materiae et ratione personae pour connaître du présent recours.
III. Recevabilité du recours
- La demande a été adressée à la partie adverse le 12 mars 2022.
La partie adverse a explicitement rejeté la demande par décision du 26 avril 2022. Cette décision a été notifiée par courriel du même jour à la partie requérante.
La partie requérante a introduit son recours le 27 mai 2022, soit hors du délai de 30 jours prévu à l’article 8bis, alinéa 1er, premier tiret, du même décret.
Toutefois, la partie adverse ayant fait choix d’un envoi par courriel de sa décision, elle ne s’est pas réservé la preuve d’une date certaine quant à la réception de celle-ci par la partie requérante. Or, cette dernière ne précise pas à quelle date elle a reçu le courriel. Dès lors, le doute doit lui profiter, de telle sorte que le recours est déclaré recevable ratione temporis.
IV. Examen du recours
- La Commission rappelle que tous les documents administratifs sont en principe publics. C'est le principe consacré à l'article 32 de la Constitution. Une entité ne peut refuser la publicité que dans la mesure où elle peut se baser sur l'un des motifs d'exception visés par les régimes législatifs applicables et motiver sa décision de manière concrète et suffisante. Dans la mesure où ce n'est pas le cas, l’entité est tenue d’assurer la publicité des documents administratifs.
- En l’espèce, la partie adverse invoque plusieurs exceptions dans sa décision, selon le type de document administratif concerné :
- La liste des caméras de surveillance
- Selon la partie adverse, la liste des caméras de surveillance est prévue par le registre « caméra », visée à l’article 25/8 de la loi du 5 août 1992 sur la fonction de police.
L’article 25/8, alinéas 1er et 2, de la loi du 5 août 1992 sur la fonction de police, prévoit l’existence de deux registres « caméra » :
« Un registre reprenant toutes les utilisations de caméras, est tenu au sein du service de police concerné et conservé sous une forme digitale. Le Roi détermine le contenu de ce registre, après avis de l'autorité compétente de contrôle des traitements de données à caractère personnel.
Un registre national reprenant la géolocalisation de toutes les caméras fixes utilisées par les services de police est tenu, au sein de la police fédérale, et conservé sous une forme digitale. »
L’accès à ces registres est régi par l’alinéa 3 du même article, qui prévoit que :
« Les registres visés aux alinéas 1er et 2 sont mis sur demande à la disposition de l'Organe de contrôle, des autorités de police administrative et judiciaire et du délégué à la protection des données visé à l'article 144 de la loi du 7 décembre 1998 organisant un service de police intégré, structuré à deux niveaux. »
La partie adverse en déduit que, la partie requérante n’étant pas visée par cette disposition, elle ne peut pas avoir accès à ces registres.
- Ce faisant, la partie adverse se fonde nécessairement, bien qu’implicitement, sur l’exception visée à l’article 6, § 2, 2°, du décret du 30 mars 1995, auquel renvoie notamment le CDLD, à savoir l’existence d’une obligation de secret prévue par la loi.
A cet égard, la liste demandée ne correspond pas au registre visé par l’article 25/8 de la loi sur la fonction de police.
L’article 25/8, tout comme la loi du 21 mars 2007 réglant l’installation et l’utilisation de caméras de surveillance, prévoient en réalité essentiellement des registres relativement à l’utilisation des caméras et au traitement de leurs images. Le registre national « reprenant la géolocalisation de toutes les caméras fixes utilisées par les services de police » (article 25/8, alinéa 2) est, quant à lui, tenu au sein de la police fédérale ; il ne concerne donc par définition pas toutes les caméras de surveillance installées dans des lieux ouverts au public.
La liste des caméras de surveillance, et l’identification de leur situation, est au contraire une information dont la loi du 21 mars 2007 impose la publicité, par l’apposition d’un pictogramme dans les lieux concernés, signalant l’existence d’une surveillance par caméra (article 5, § 3, alinéa 5, de la loi du 21 mars 2007). Cette publicité est également prévue pour les caméras installées et utilisées par les services de police (voy. l'arrêté royal du 22 mai 2019 définissant la manière de signaler l'utilisation de caméras fixes et fixes temporaires par les services de police, arrêté d’ailleurs mentionné par la partie adverse dans sa décision de refus d’accès).
En outre, dans les deux législations, l’installation de caméras de surveillance dans les lieux ouverts au public doit faire l’objet d’un avis positif ou d’une autorisation préalable du conseil communal, notamment fondé sur le lieu concerné et la finalité de la surveillance, et même sur le type de caméra concerné (article 5 de la loi du 21 mars 2007 et article 25/4 de la loi sur la fonction de police), donnant donc également une publicité à ces informations. Selon l’article 25/4, § 4, alinéa 3, « l'autorisation visée au paragraphe 1er fait l'objet d'une publicité, lorsqu'elle concerne des missions de police administrative. » La partie adverse s’en prévaut d’ailleurs, en indiquant dans sa décision que « cette publicité a été réalisée par le biais de différents moyens (publication sur le site internet de la zone, publication sur les réseaux sociaux de la zone, articles de presse, publicité des débats du Conseil communal, retransmission des débats du Conseil communal, publication systématique des procès-verbaux du Conseil communal sur le site internet de la Ville) ».
Tenant compte de ces multiples mesures de publicité, la liste des caméras fixes installées sur le territoire de la partie adverse constitue une information publique, dont la Ville dispose (au sens de l’article 1er du décret du 30 mars 1995).
L’éventuel secret qui serait prévu par l’article 25/8 de la loi sur la fonction de police ne concerne donc pas la liste demandée elle-même, ni la localisation ou l’indication du responsable du traitement de chaque caméra.
Cette liste doit par conséquent être communiquée à la partie requérante.
B. Les avis délivrés par la partie adverse sur la base de l’article 5 de la loi du 21 mars 2007
- La Commission constate que, sur ce point, la partie adverse n’a pas répondu à la demande d’informations qui lui a été adressée en application de l’article 8ter, alinéa 1er, du décret du 30 mars 1995.
Elle n’a en effet pas reçu les documents faisant l’objet de la demande, de telle sorte qu’elle n’est pas en mesure d’exercer la mission qui lui est dévolue.
Aucune exception à cette obligation de collaboration dans l’instruction du dossier n'est prévue par le décret.
La Commission, ses membres et son secrétariat sont par ailleurs soumis au secret professionnel visé à l’article 458 du Code pénal, compte tenu de la nature des missions de la Commission, ce qui a été confirmé par la Cour constitutionnelle[1].
Dès lors, conformément à l’article 8ter, alinéa 2, du décret du 30 mars 1995, la partie adverse doit communiquer le document à la partie requérante, moyennant le respect des exceptions prévues à l'article 6 du même décret.
- Toutefois, compte tenu de la nature et de la sensibilité des documents litigieux, la Commission souhaite faire part aux parties des éléments suivants, qui concernent la demande d’accès formulée et les motifs de rejet invoqués.
- Selon la partie adverse, la demande sur ce point est « formulée de façon manifestement trop vague (il n’est nullement fait mention de la finalité ni de l’affectation de l’accès à de telles informations) ». La partie adverse se fonde expressément, ensuite, sur cette exception telle que prévue à l’article L3231-3, 4°, du CDLD pour refuser la communication des documents demandés.
Une demande « manifestement trop vague » est relative à ce qui est confus, imprécis, incertain, indécis, indéfini, indéterminé. Il s’agit notamment d’une demande qu’un agent familier de la matière concernée ne parvient pas à identifier, ou d’une demande équivoque.
En l’espèce, la demande porte de manière très précise et sans équivoque sur « les avis délivrés par la commune à destination des responsables de traitement conformément à l’article 5 de la loi du 21 mars 2007 ». Cette demande ne peut en aucun cas être qualifiée de vague, a fortiori de « manifestement trop vague ». L’absence de finalité ou d’affectation de la demande est quant à elle étrangère au caractère vague d’une demande. Le droit fondamental d’accès aux documents administratifs n’exige d’ailleurs pas de justifier la finalité ou l’affectation des documents demandés.
L’exception invoquée par la partie adverse n’est donc pas fondée et ces documents doivent être communiqués à la partie requérante.
- Les analyses d’impact
- La Commission constate que, sur ce point, la partie adverse n’a pas répondu à la demande d’informations qui lui a été adressée en application de l’article 8ter, alinéa 1er, du décret du 30 mars 1995.
Elle n’a en effet pas reçu les documents faisant l’objet de la demande, de telle sorte qu’elle n’est pas en mesure d’exercer la mission qui lui est dévolue.
Aucune exception à cette obligation de collaboration dans l’instruction du dossier n'est prévue par le décret.
La Commission, ses membres et son secrétariat sont par ailleurs soumis au secret professionnel visé à l’article 458 du Code pénal, compte tenu de la nature des missions de la Commission, ce qui a été confirmé par la Cour constitutionnelle[2].
Dès lors, conformément à l’article 8ter, alinéa 2, du décret du 30 mars 1995, la partie adverse doit communiquer le document à la partie requérante, moyennant le respect des exceptions prévues à l'article 6 du même décret.
- Toutefois et à nouveau, compte tenu de la nature et de la sensibilité des documents litigieux, la Commission souhaite faire part aux parties des éléments suivants, qui concernent la demande d’accès formulée et les motifs de rejet invoqués.
- Selon la partie adverse, la communication des analyses d’impact demandées porterait atteinte à la sécurité de la population, l’ordre public, la recherche ou la poursuite de faits punissables et la confidentialité des informations d’entreprises ou de fabrication communiquées à l’autorité. Ces exceptions à la publicité de l’administration sont prévues par l’article 6, § 1er, 1°, 3° et 4° et § 2, 1°, du décret du 30 mars 1995, ainsi que par l’article 6, § 1er, 1°, 4°, 5° et 7°, de la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l’administration.
Concrètement, « ces analyses de risques comportent non seulement une évaluation des risques (notamment au niveau de ITT, de l'infrastructure physique...) mais aussi et surtout les moyens mis en œuvre pour y répondre afin de limiter les risques. Elles comportent en outre des informations d'entreprises avec un caractère confidentiel (localisation des serveurs, localisation des back-ups, mesures de protection mises en place, ...). »
- L’analyse d’impact est en réalité prévue par l’article 58 de la loi du 30 juillet 2018 relative à la protection des personnes physiques à l'égard des traitements de données à caractère personnel, selon lequel :
« Lorsqu'un type de traitement, en particulier par le recours aux nouvelles technologies, est susceptible d'engendrer un risque élevé pour les droits et les libertés des personnes physiques, le responsable du traitement effectue préalablement au traitement une analyse d'impact des opérations de traitement envisagées sur la protection des données à caractère personnel.
L'analyse visée à l'alinéa 1er contient au moins une description générale des traitements envisagés, une évaluation des risques pour les droits et libertés des personnes concernées, les mesures envisagées pour faire face à ces risques, les garanties, mesures et mécanismes de sécurité visant à assurer la protection des données à caractère personnel et à apporter la preuve du respect du présent titre, compte tenu des droits et des intérêts légitimes des personnes concernées et des autres personnes intéressées. »
L’analyse d’impact est également imposée, dans des termes similaires, par l’article 35 du Règlement général sur la protection des données (RGPD). Selon l’article 35, §7 du RGPD, en particulier :
« L'analyse contient au moins :
a), une description systématique des opérations de traitement envisagées et des finalités du traitement, y compris, le cas échéant, l'intérêt légitime poursuivi par le responsable du traitement;
b), une évaluation de la nécessité et de la proportionnalité des opérations de traitement au regard des finalités;
c), une évaluation des risques pour les droits et libertés des personnes concernées conformément au paragraphe 1; et
d), les mesures envisagées pour faire face aux risques, y compris les garanties, mesures et mécanismes de sécurité visant à assurer la protection des données à caractère personnel et à apporter la preuve du respect du présent règlement, compte tenu des droits et des intérêts légitimes des personnes concernées et des autres personnes affectées. »
L’article 23 de la loi précitée du 30 juillet 2018 renforce encore ces exigences, en disposant qu’ « en exécution de l'article 35.10 du Règlement, une analyse d'impact spécifique de protection des données est effectuée avant l'activité de traitement, même si une analyse d'impact générale relative à la protection des données a déjà été réalisée dans le cadre de l'adoption de la base légale. ».
Des analyses d’impact à propos de caméras de surveillance sont encore prévues par les articles 25/4, §2, alinéa 2 et 44/11/3octies, alinéa 2 de la loi sur la fonction de police.
- L’ensemble de ces dispositions démontrent que l’objectif principal des analyses d’impact est la protection des données à caractère personnel, au travers de l’identification des risques, d’une part, et des mesures prises pour y répondre, d’autre part.
En ce qui concerne l’identification des risques, certes, une partie des finalités de la surveillance par caméra concerne la sécurité de la population, l’ordre public et la recherche et la poursuite de faits punissables. La partie adverse n’établit cependant pas concrètement en quoi toute description des traitements des données récoltées par les caméras serait susceptible de porter atteinte à ces finalités. Seules les informations, contenues dans les analyses d’impact, affectant concrètement la sécurité de la population, l’ordre public ou la recherche et la poursuite de faits punissables, pourraient être considérées comme confidentielles. A défaut pour la Commission d’avoir pu prendre connaissance d’une analyse d’impact, ces exceptions ne semblent à première vue pas applicables aux parties des analyses d’impact relative à la description des traitements et des finalités, à l’évaluation de la nécessité et de la proportionnalité des traitements, et à l’évaluation des risques causés par ces traitements (article 35, § 7, a, b et c, du RGPD). En revanche, lorsque ces parties du rapport contiennent des informations techniques considérées comme confidentielles par le fournisseur du matériel concerné, ces informations techniques spécifiques ne doivent pas être communiquées, conformément aux exceptions précitées relatives aux secrets d’affaires. Les parties d’une analyse d’impact correspondant à l’article 35, § 7, a), b) et c) du RGPD doivent donc être communiquées, à l’exception des informations constituant des secrets d’affaires.
En ce qui concerne les mesures prises en réponse aux risques identifiés, d’autre part, la publicité des mesures de sécurité techniques, infrastructurelles ou informatiques adoptées paraît, à première vue, pouvoir porter atteinte à la protection des données personnelles, et plus largement à pouvoir menacer les finalités poursuivies par la surveillance par caméras, dont notamment la sécurité de la population, l’ordre public ou la recherche et la poursuite de faits punissables. La partie des analyses d’impact relative à ces mesures, correspondant à l’article 35, § 7, d), du RGPD, ne doit donc pas être communiquée.
D. Les documents relatifs aux marchés publics conclus pour l’achat des caméras
- La Commission constate que, sur ce point, la partie adverse n’a pas répondu à la demande d’informations qui lui a été adressée en application de l’article 8ter, alinéa 1er, du décret du 30 mars 1995.
Elle n’a en effet pas reçu les documents faisant l’objet de la demande, de telle sorte qu’elle n’est pas en mesure d’exercer la mission qui lui est dévolue.
Aucune exception à cette obligation de collaboration dans l’instruction du dossier n'est prévue par le décret.
La Commission, ses membres et son secrétariat sont par ailleurs soumis au secret professionnel visé à l’article 458 du Code pénal, compte tenu de la nature des missions de la Commission, ce qui a été confirmé par la Cour constitutionnelle[3].
Dès lors, conformément à l’article 8ter, alinéa 2, du décret du 30 mars 1995, la partie adverse doit communiquer le document à la partie requérante, moyennant le respect des exceptions prévues à l'article 6 du même décret.
- Une fois encore, compte tenu de la nature et de la sensibilité des documents litigieux, la Commission souhaite malgré tout faire part aux parties des éléments suivants concernant la demande d’accès formulée et les motifs de rejet invoqués.
- La partie adverse se borne à indiquer que les décisions relatives aux marchés publics ont été prises par le conseil communal, et invite donc la partie requérante à consulter ces décisions sur le site internet de la Ville. Dans sa réponse au présent recours, la partie adverse soutient par ailleurs que ces documents contiennent des secrets d’affaires, et ne peuvent donc pas être communiqués.
- Au-delà de l’incohérence dont cette double argumentation relève (les documents demandés devant dans un cas être considérés comme publics, et dans l’autre comme confidentiels), il convient de souligner que la demande s’étend à l’ensemble des documents du marché, lesquels ne sont forcément pas tous reproduits dans les procès-verbaux des conseils communaux.
Outre les décisions validées lors des conseils communaux de la partie adverse, il faut admettre que les appels d’offres et les cahiers des charges des marchés concernés ne contiennent par définition aucune information d’entreprise ou de fabrication communiquée à l’autorité, puisque ces documents émanent de l’autorité elle-même, avant de savoir quelle entreprise se verra attribuer le marché. Aucune exception n’étant invoquée à cet égard, ces documents doivent être communiqués.
- Les décisions d’attribution comme les contrats signés avec les adjudicataires sont en revanche susceptibles de contenir des secrets d’affaires, lorsque l’entreprise concernée a expressément fait état du caractère confidentiel des informations transmises.
La protection du secret des affaires est en effet déduite de l’article 6, § 2, 1°, du décret du 30 mars 1995, et est prévue expressément par l’article 6, § 1er, 7°, de la loi du 11 avril 1994 relative à la publicité de l’administration qui dispose :
« L'autorité administrative fédérale ou non fédérale rejette la demande de consultation, d’explication ou de communication sous forme de copie d’un document administratif si elle a constaté que l'intérêt de la publicité ne l'emporte pas sur la protection de l'un des intérêts suivants : […]
7° au caractère par nature confidentiel des informations d’entreprises ou de fabrication communiquées à l'autorité ».
Selon la Commission européenne, ce principe protège notamment « les informations techniques et financières relatives au savoir-faire, les méthodes de calcul des coûts, les secrets et procédés de fabrication, les sources d’approvisionnement, les quantités produites et vendues, les parts de marché, les fichiers de client et de distributeurs, la stratégie commerciale, la structure de coûts et de prix ou encore la politique de vente d’une entreprise ».
Le secret des affaires est également protégé par le Code de droit économique, dont l’article I.17/1, 1°, le définit comme suit :
« information qui répond à toutes les conditions suivantes :
a) elle est secrète en ce sens que, dans sa globalité ou dans la configuration et l'assemblage exacts de ses éléments, elle n'est pas généralement connue des personnes appartenant aux milieux qui s'occupent normalement du genre d'information en question, ou ne leur est pas aisément accessible ;
b) elle a une valeur commerciale parce qu'elle est secrète ;
c) elle a fait l'objet, de la part de la personne qui en a le contrôle de façon licite, de dispositions raisonnables, compte tenu des circonstances, destinées à la garder secrète ».
Seules les informations qui répondent à ces définitions, pour lesquelles l’adjudicataire a expressément signalé le caractère confidentiel, sont donc susceptibles d’être occultés par la partie adverse. Une version non confidentielle des rapports d’attribution, des décisions d’attribution et des documents contractuels des marchés concernés par la demande doit donc être communiquée par la partie adverse.
Par ces motifs, la Commission décide :
Le recours est recevable.
Le recours est partiellement fondé. La partie adverse communique à la partie requérante les documents suivants :
- La liste des caméras fixes dans des lieux ouverts accessibles au public, en ce compris les localisations et les responsables de traitement ;
- Les avis relatifs à ces caméras délivrés par la partie adverse sur la base de l’article 5 de la loi du 21 mars 2007 ;
- Les parties non confidentielles des analyses d’impact existantes ;
- Les appels d’offre et les cahiers des charges de tous les marchés publics faisant l’objet de la demande, ainsi que la version non confidentielle des rapports d’attribution, décisions d’attribution et documents contractuels des marchés concernés ;