Commission d'Éthique en expérimentation animale – Décisions d'autorisation – Documents relatifs au fonctionnement de la Commission d'Éthique – Recours sans objet
[…],
Partie requérante,
CONTRE :
La Commission d’Éthique en expérimentation animale de la S.A. EPICS THERAPEUTICS,
Partie adverse,
Vu l’article 32 de la Constitution,
Vu les articles 1er et 8, § 1er, du décret du 30 mars 1995 relatif à la publicité de l’Administration (ci-après, le décret du 30 mars 1995),
Vu l’arrêté du Gouvernement wallon du 9 juillet 1998 fixant la composition et le fonctionnement de la Commission d’accès aux documents administratifs,
Vu le recours introduit par courriel le 1er octobre 2022,
Vu la demande d’informations adressée à la partie adverse le 16 novembre 2022 et reçue le 18 novembre 2022,
Vu la réponse de la partie adverse du 29 novembre 2022,
Vu la décision de la Commission n° 264 du 13 décembre 2022, notifiée aux parties le 11 janvier 2023 et réceptionnée le 12 janvier suivant,
Vu la décision de la Commission du 27 février 2023 de retirer la décision n° 264 du 13 décembre 2022, notifiée aux parties le 3 mars 2023 et réceptionnée le 6 mars 2023,
Vu la mesure d’instruction du 6 mars 2023 du Président de la Commission et la réponse de la partie adverse du 10 mars 2023,
Vu la décision de proroger le délai prévu à l’article 8quinquies, § 1er, du décret du 30 mars 1995, compte tenu de la charge de travail importante de la Commission.
Aux termes de cette disposition, le Roi détermine la composition, le fonctionnement et les missions de ces commissions d'éthique. Celles-ci sont approuvées et contrôlées par le service chargé du bien-être animal. Le Roi fixe les règles pour l'approbation et le contrôle des commissions d'éthique.
L’article 21, § 3, de la même loi prévoit que le Roi nomme une autorité compétente qui est chargée d’autoriser les projets. Aucun projet ne peut être mené sans qu'une autorisation ne lui soit attribuée au préalable. Un projet ne peut être exécuté que si l'évaluation du projet est favorable. Conformément à l’article 17 de l’arrêté royal du 29 mai 2013 relatif à la protection des animaux d'expérience, tel qu’il est applicable en Région wallonne, chaque utilisateur qui procède à des expériences sur animaux soumet, au préalable, ses projets à évaluation et à autorisation d’une commission d'éthique acceptée par le Service. Un projet ne peut être exécuté qu'après avoir reçu une évaluation favorable.
Dans l’exécution de ses missions, et sous réserve de garantir le respect de la propriété intellectuelle et de la confidentialité des informations, la commission d'éthique doit garantir qu'elle ne connaît aucun conflit d'intérêts et veiller à l'impartialité de jugement en prenant en compte l’avis de parties indépendantes de l'utilisateur qui introduit une demande d’autorisation d’un projet. Par ailleurs, la commission d'éthique doit effectuer les évaluations de manière transparente (article 18, § 2, de l’arrêté royal du 29 mai 2013 précité, tel qu’il est applicable en Région wallonne).
En effet, comme il est dit au point 3, la commission d’éthique doit être reconnue par le service chargé du bien-être animal ; elle est chargée d’une mission de service public ; son fonctionnement est déterminé et contrôlé par les pouvoirs publics ; et, en ce qu’elle évalue et autorise ou non les projets d’expérimentation sur des animaux, elle prend des décisions obligatoires à l’égard de tiers.
« Une nouveauté à l’égard de la jurisprudence existante du Conseil d’Etat est qu’il conviendra, pour ce qui est de l’application de la présente loi, de déterminer les autorités administratives qui doivent être considérées comme autorités administratives fédérales et celles qui doivent être considérées comme autorités administratives non fédérales. Les autorités administratives fédérales sont, comme l’a précisé le Conseil d’Etat dans l’avis qu’il a donné sur le présent projet, les administrations fédérales, les organismes publics et les services publics assimilés, qui ressortissent à une autorité administrative fédérale, ainsi que les personnes privées chargées par une autorité fédérale, à la suite d’événements autres que fortuits, de l’exercice d’un service public fédéral. Fait également partie du niveau fédéral le personnel des provinces qui dépend des autorités fédérales, y compris les commissaires d’arrondissement.
Les autorités administratives non fédérales sont celles qui font partie des autres niveaux administratifs - les Communautés, les Régions, les provinces et les communes, comme par exemple les services des Communautés, des Régions ou des Commissions Communautaires ou les établissements créés par ceux-ci, les personnes privées qui exercent une mission d’intérêt général relevant des compétences des Communautés ou des Régions, les organes communaux et provinciaux, les intercommunales, les C.P.A.S., les polders et wateringues, les fabriques d’église, etc. »[1].
La notion d’« autorité administrative autre que fédérale » a été créée à la demande expresse de la section de législation du Conseil d’État. L’objectif était de distinguer le champ d’application de l’ensemble de la loi aux seules autorités fédérales et le champ d’application « des dispositions qui sont applicables à toutes les autorités administratives, quel que soit le niveau auquel elles appartiennent. Ces dispositions prévoient des exceptions à la publicité pour des motifs qui concernent une matière qualifiée de matière fédérale par la Constitution ou en vertu de celle-ci »[2]. Ces considérations valent également, au niveau régional, en ce qui concerne la distinction entre autorités administratives régionales et autres que régionales.
La commission d’éthique en expérimentation animale de la S.A. EPICS THERAPEUTICS est par conséquent une autorité administrative régionale soumise au décret du 30 mars 1995.
La partie adverse n’y ayant pas donné suite, la demande a été rejetée implicitement le 2 septembre 2022, en application de l’article 6, § 5, du décret du 30 mars 1995.
La partie requérante a introduit son recours le 1er octobre 2022, soit dans le délai de 30 jours prévu à l’article 8bis, alinéa 1er, second tiret, du même décret.
Dès lors, le recours est recevable.
9. La Commission rappelle que tous les documents administratifs sont en principe publics. C'est le principe consacré à l'article 32 de la Constitution. Une entité ne peut refuser la publicité que dans la mesure où elle peut se baser sur l'un des motifs d'exception visés par les régimes législatifs applicables et motiver sa décision de manière concrète et suffisante. Dans la mesure où ce n'est pas le cas, l’entité est tenue d’assurer la publicité des documents administratifs.
Dans le cadre de ses prérogatives de réformation, la Commission est elle-même compétente pour apprécier dans quelle mesure il y a lieu de faire droit à la demande d'accès au document administratif, en procédant à la mise en balance requise entre l’intérêt de la publicité des documents administratifs et l’intérêt protégé par le motif d’exception invoqué.
Le droit d’obtenir des explications au sujet d’un document administratif est une des modalités de la publicité passive prévue par toutes les législations relatives à la publicité de l’administration.
Selon les travaux préparatoires de la loi fédérale, ce droit d’explication s’impose car « dans la plupart des cas, la publicité sans explications resterait lettre morte en raison du caractère administratif du langage utilisé ou de la technicité des documents »[4].
Selon la Commission fédérale d’accès aux documents administratifs, « le droit d’explication comprend seulement la possibilité pour le demandeur d’obtenir des informations dans un langage compréhensible au sujet du contenu d’un texte existant et se limite à cela »[5]. Elle précise par ailleurs que toute question (et donc toute demande d’explication) doit porter sur un document existant, et dont l’information est matérialisée sur un support[6].
La Commission régionale d’accès à l’information environnementale (CRAIE) précise ces avis en rejetant systématiquement les demandes d’explication lorsque « la réponse à ces demandes d’explications ou de précisions implique l’établissement d’un document nouveau »[7]. L’information doit donc préexister à l’explication, et l’autorité peut donc légitimement rejeter « les demandes qui impliqueraient un réel travail de consolidation, d’analyse ou d’interprétation de données de la part de l’autorité publique qui en est saisie »[8].
Il s’ensuit que les explications qui doivent être données par les autorités administratives se limitent strictement au contenu du document demandé, et ne devraient porter que sur l’explication des termes administratifs, juridiques ou techniques utilisés dans ce document. Il est néanmoins possible que, dans ce cadre, des étapes de l’instruction du dossier doivent parfois être expliquées.
Par conséquent, le droit d’obtenir des explications au sujet d’un document administratif suppose que ce document soit identifié et existant et ne peut être interprété comme ouvrant un droit général à interroger une entité sur une thématique donnée, par le biais de questions ouvertes appelant des justifications ou explications d’ordre général.
En l’espèce, la demande d’« une explication ou d’une clarification concernant la composition, le mode de décision interne et la publication des décisions de la Commission d’Éthique », telle que formulée auprès de la partie adverse, ne se rattache à aucun document administratif identifié par la partie requérante ; elle est dès lors sans objet.
Par ces motifs, la Commission décide :
Le recours est recevable.
Le recours est sans objet.