18 mars 2025 -
CADA - Décision n° 501 : SLSP – Rapport de rémunération – Directeur-gérant – Vie privée (non) – Communication partielle
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SLSP – Rapport de rémunération – Directeur-gérant – Vie privée (non) – Communication partielle
[…],
Partie requérante,
CONTRE :
La Société de Logement de service public, Le Foyer Jambois, Avenue Parc d’Amée, 1 à 5100 Jambes,
Partie adverse,
Vu l’article 32 de la Constitution,
Vu l’article 8, § 1er, du décret du 30 mars 1995 relatif à la publicité de l’Administration (ci-après, le décret du 30 mars 1995),
Vu l’article L3211-3, ainsi que les articles L3231-1 et suivants du Code de la démocratie locale et de la décentralisation (ci-après, le CDLD),
Vu l’arrêté du Gouvernement wallon du 9 juillet 1998 fixant la composition et le fonctionnement de la Commission d’accès aux documents administratifs,
Vu le recours introduit par courriel le 21 janvier 2025,
Vu la demande d’informations adressée à la partie adverse le 27 janvier 2025 et reçue le 28 janvier 2025,
Vu la réponse de la partie adverse du 10 février 2025.
I. Objet de la demande
1. La demande porte sur la communication d’une copie de « l'ensemble des documents qui détaillent les avantages octroyés [au directeur-gérant] pour les années 2019, 2020 et 2021 » ainsi que « pour les mêmes années, les documents qui font ressortir les montants chiffrés correspondant à chacun des avantages octroyés ».
Cette demande s’inscrit dans le constat, par la partie requérante, que « via les déclarations wallonnes de mandats, fonctions et professions introduites par [le directeur-gérant] […] que les avantages en nature déclarés par [le directeur-gérant] sont passés d'un montant de 2.412,73 euros en 2019 à un montant de 19.022,82 euros en 2020 puis 27.566,75 euros en 2021. Ce qui correspond à une augmentation substantielle ».
II. Compétence de la Commission
2. La Commission est compétente pour connaître du recours.
III. Recevabilité du recours
3. L’article L3231-3, alinéas 3 et 4, du CDLD, rendu applicable à la partie adverse par l’article L3211-3 du même code, dispose comme suit :
« L’autorité administrative provinciale ou communale qui ne peut pas réserver de suite immédiate à une demande de publicité ou qui la rejette communique dans un délai de trente jours de la réception de la demande les motifs de l’ajournement ou du rejet. En cas d’ajournement, le délai ne pourra jamais être prolongé de plus de quinze jours.
En cas d’absence de communication dans le délai prescrit, la demande est réputée avoir été rejetée ».
4. La demande initiale de publicité administrative a été adressée à la partie adverse le 17 décembre 202
La partie adverse n’y ayant pas donné suite, la demande a été rejetée implicitement le 16 janvier 2025, en application de l’article L3231-3, alinéa 4, du CDLD.
La partie requérante a introduit son recours auprès de la Commission le 21 janvier 2025, soit dans le délai de 30 jours prévu à l’article 8bis, alinéa 1er, second tiret, du décret du 30 mars 1995, rendu applicable par l’article L3231-5, § 1er, du CDLD.
Dès lors, le recours est recevable ratione temporis.
5. Pour toute demande relative à un document à caractère personnel, l’article L3231-1, alinéa 2, du CDLD prévoit que « le demandeur doit justifier d’un intérêt ».
Selon l’article L3211-3, 3°, du CDLD, un document à caractère personnel se définit comme tout « document administratif comportant une appréciation ou un jugement de valeur relatif à une personne physique nommément désignée ou aisément identifiable, ou la description d'un comportement dont la divulgation peut manifestement causer un préjudice à cette personne ».
En l’espèce, les documents sollicités ne constituent pas des documents à caractère personnel, dans la mesure où ils ne portent aucune appréciation ou jugement de valeur relatif à une personne physique nommément désignée ou aisément identifiable ou la description d’un comportement dont la divulgation peut manifestement causer un préjudice à cette personne. La partie requérante ne doit donc pas justifier d’un intérêt afin d’obtenir la copie de ces documents.
Dès lors, le recours est également recevable sur ce point.
IV. Examen au fond
6. La partie adverse indique à la Commission que le droit d'accès ne doit pas être considéré comme absolu et manque en tout cas de base légale. Selon elle, dès lors que le Gouvernement wallon n’a, à ce jour, pas encore fixé le traitement des directeurs-gérants des sociétés de logement de service public, comme le prévoit l’article 158bis du Code wallon de l’habitation durable, les rémunérations des directeurs-gérants ne sont pas des informations publiques.
La Commission rappelle que tous les documents administratifs sont en principe publics. C'est le principe consacré à l'article 32 de la Constitution. Une entité ne peut refuser la publicité que dans la mesure où elle peut se baser sur l'un des motifs d'exception visés par les législations applicables et motiver sa décision de manière concrète et suffisante. Dans la mesure où ce n'est pas le cas, l’entité est tenue d’assurer la publicité des documents administratifs.
Dans le cadre de ses prérogatives de réformation, la Commission est elle-même compétente pour apprécier dans quelle mesure il y a lieu de faire droit à la demande d'accès au document administratif, en procédant, le cas échéant, à la mise en balance requise entre l’intérêt de la publicité des documents administratifs et l’intérêt protégé par le motif d’exception invoqué.
L’article L3211-3, 2°, du CDLD définit le document administratif comme « toute information, sous quelque forme que ce soit, dont une autorité administrative dispose ». Le fait que l’arrêté du Gouvernement fixant le traitement du directeur-gérant ne soit pas encore adopté n’induit en rien que l’information sollicitée ne soit pas publique. En effet, dès lors que la partie adverse dispose d’un document administratif, celui-ci est en principe communicable moyennant le respect des exceptions prévues à l’article 6 du décret du 30 mars 1995 et de l’article L3231-3 du CDLD.
7. La Commission considère que l’exception relative à l’atteinte à la vie privée, prévue à l’article 6, § 2, 1°, du décret du 30 mars 1995, est susceptible de s’appliquer en l’espèce.
L’article 6, § 2, 1°, du décret du 30 mars 1995 dispose comme il suit :
« § 2. L’entité ou l’autorité administrative non régionale rejette la demande de consultation, d’explication ou de communication sous forme de copie d’un document administratif, qui lui est adressée en application du présent décret, si la publication du document administratif porte atteinte :
1° à la vie privée, sauf les exceptions prévues par la loi ;
[…] ».
Le décret du 30 mars 1995 interdit donc à l’autorité communale de transmettre des informations qui portent atteinte à la vie privée.
De manière constante, la Commission considère que les données relatives à des personnes exerçant une fonction publique ne bénéficient pas d’une protection équivalente à celles des autres personnes physiques. Pour justifier une restriction au droit à la transparence administrative, il doit être établi que la publicité des informations concernées porte effectivement atteinte à la vie privée, un simple lien avec celle-ci ne suffisant pas. Une telle restriction est d’autant moins admissible lorsque les informations reprises dans le document administratif concerné présentent un intérêt public.
En l'espèce, les documents sollicités contiennent les avantages octroyés au directeur-gérant de la société de logement de service public concernée pour les années 2019, 2020 et 2021 ainsi que diverses informations telles que son adresse, sa situation familiale, son état civil ou encore son numéro national.
La rémunération d’agents rémunérés avec de l’argent public est une information d’intérêt public dont la divulgation n’entraîne pas en soi une atteinte à la vie privée des personnes concernées. En revanche, il n’y a pas lieu de communiquer les informations relatives à l’adresse, à la situation familiale, à l’état civil ou encore le numéro de registre national, qui sont des données dont la divulgation constituerait une atteinte au respect de la vie privée. Il convient donc de communiquer les documents en occultant ces dernières informations.
8. La Commission n’aperçoit pas, à la lecture des éléments communiqués par la partie adverse, quelles autres exceptions pourraient être invoquées pour refuser la communication des documents concernés.
Par ces motifs, la Commission décide :
Le recours est fondé. La partie adverse communique à la partie requérante les documents sollicités en occultant les informations relatives à l’adresse, à la situation familiale, à l’état civil ou encore le numéro de registre national et ce, dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la présente décision.