20 mai 2025 -
CADA - Décision n° 510 : Ville – Délibérations communales – Autorisation d'ester en justice – Huis clos – Document à caractère personnel (oui) – Irrecevable
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Ville – Délibérations communales – Autorisation d'ester en justice – Huis clos – Document à caractère personnel (oui) – Irrecevable
[…],
Partie requérante,
CONTRE :
La ville d’Andenne, Place des Tilleuls, 1 à 5300 Andenne,
Partie adverse,
Vu l’article 32 de la Constitution,
Vu l’article 8, § 1er, du décret du 30 mars 1995 relatif à la publicité de l’Administration (ci-après, le décret du 30 mars 1995),
Vu l’article L3211-3, ainsi que les articles L3231-1 et suivants du Code de la démocratie locale et de la décentralisation (ci-après, le CDLD),
Vu l’arrêté du Gouvernement wallon du 9 juillet 1998 fixant la composition et le fonctionnement de la Commission d’accès aux documents administratifs,
Vu le recours introduit par courriel le 17 février 2025,
Vu la demande d’informations adressée à la partie adverse le 19 février 2025 et reçue le 21 février 2025,
Vu la réponse de la partie adverse du 4 mars 2025,
Vu la note d’observations de la partie adverse, transmise à la partie requérante le 4 mars 2025,
Vu la décision de proroger le délai prévu à l’article 8quinquies, § 1er, du décret du 30 mars 1995, compte tenu de la charge de travail importante de la Commission.
I. Objet de la demande
1. La demande porte sur la communication d’une copie, pour la période allant du 1er septembre 2024 à ce jour, de « toutes les délibérations du Conseil communal portant sur une autorisation d'ester en justice dans le dossier qui oppose [...] au journal […] et/ou à ses journalistes », « des dossiers transmis aux Conseillers communaux et qui accompagnaient les points mis au vote concernant lesdites délibérations », ainsi que de « toutes les délibérations et annexes du COLLEGE communal portant sur le dossier qui oppose [...] au journal […] et/ou à ses journalistes ».
Le demandeur ajoute que, « lorsque [ses] demandes portent sur l'obtention de copies de délibérations, [il] souhaite obtenir les délibérations complètes avec, pour chacune, mention des Conseillers communaux/Membres du Collège présents lors desdites délibérations ».
II. Compétence de la Commission
2. La Commission est compétente pour connaître du recours.
III. Recevabilité du recours
A. Recevabilité ratione temporis
3. L’article L3231-3, alinéas 3 et 4, du CDLD, rendu applicable à la partie adverse par l’article L3211-3 du même code, dispose comme suit :
« L’autorité administrative provinciale ou communale qui ne peut pas réserver de suite immédiate à une demande de publicité ou qui la rejette communique dans un délai de trente jours de la réception de la demande les motifs de l’ajournement ou du rejet. En cas d’ajournement, le délai ne pourra jamais être prolongé de plus de quinze jours.
En cas d’absence de communication dans le délai prescrit, la demande est réputée avoir été rejetée ».
4. La demande initiale de publicité administrative a été adressée à la partie adverse le 4 février 2025.
La partie adverse a explicitement rejeté la demande le 17 février 2025.
La partie requérante a introduit son recours auprès de la Commission le 17 février 2025, soit dans le délai de 30 jours prévu à l’article 8bis, alinéa 1er, premier tiret, du décret du 30 mars 1995, rendu applicable par l’article L3231-5, § 1er, du CDLD.
Dès lors, le recours est recevable ratione temporis.
B Recevabilité ratione materiae
5. Pour toute demande relative à un document à caractère personnel, l’article L3231-1, alinéa 2, du CDLD prévoit que « le demandeur doit justifier d’un intérêt ».
Selon l’article L3211-3, 3°, du CDLD, un document à caractère personnel se définit comme tout « document administratif comportant une appréciation ou un jugement de valeur relatif à une personne physique nommément désignée ou aisément identifiable, ou la description d'un comportement dont la divulgation peut manifestement causer un préjudice à cette personne ».
Dans la note d’observations, la partie adverse indique que :
« les décisions d'ester en justice et l'autorisation d'ester en justice sollicitées, et leurs annexes, se rapportent directement à la mise en cause de la responsabilité délictuelle et professionnelle d'une journaliste, qui est aisément identifiable au vu du contexte largement médiatisé de l'affaire, et dont le comportement fait l'objet d'une appréciation négative de la part des autorités communales.
En soi une action en responsabilité professionnelle emporte une appréciation ou un jugement de valeur négatif à l'égard de la personne concernée.
Selon les travaux préparatoires du Nouveau Code civil, :
"La faute résulte (...), soit de la violation d'un devoir précis énoncé par la loi soit de la méconnaissance du devoir général de prudence qui s'impose à tous dans les rapports sociaux" (Exposé des motifs, Doc. Parl., Chambre, 55-3213, page 17).
Dans le chef d'un journaliste, la faute s'apprécie par référence au comportement d'un journaliste, normalement avisé et prudent, placé dans les mêmes circonstances de temps et de lieu, "relevant de la même catégorie professionnelle" et qui respecte les devoirs et responsabilités propres à sa mission d'information (voyez "La responsabilité civile des médias" Traité Théorique et Pratique, Ariane JOACHIMOWICZ, Editions Kluwer, citant Civ. Namur (div. Namur, 7e ch. D), 23 juin 2017, A.M., 2017/2, p. 185-193).
En l'espèce, les délibérations des Collège et Conseil communaux ainsi que leurs annexes, dont singulièrement la citation en justice, contiennent des appréciations négatives à l'égard du comportement […] journaliste.
On observera, en outre que les délibérations sollicitées ont été prises à huis clos, ce qui confirme s'agissant du Conseil communal qu'il s'agissait d'une "question de personne".
Le requérant n'apporte aucun élément de nature à contredire la qualification opérée par le Collège communal quant à la nature des documents sollicités.
Le requérant ne peut davantage être suivi lorsqu'il sollicite une communication partielle de ces documents, il lui appartient au contraire de démontrer, préalablement, l'existence d'un intérêt dans son chef, ce dont il s'abstient ».
En l’espèce, l’ensemble des documents dont la communication est sollicitée comporte des appréciations et des jugements de valeur à l’égard d’une personne nommément désignée. Il s’agit donc de documents à caractère personnel pour lesquels le demandeur doit justifier d’un intérêt. A la suite de la communication de la note d’observations qui fait valoir que le demandeur ne justifie pas d’un tel intérêt, celui-ci n’a apporté aucun élément susceptible de démontrer que tel serait le cas – et la Commission n’aperçoit pas en quoi concrètement la partie requérante a un intérêt à cette communication.
Dans ces circonstances particulières, le recours est irrecevable.
Par ces motifs, la Commission décide :
Le recours est irrecevable.