20 mai 2025 -
CADA - Décision n° 515 : Ministre – Etude juridique – Consultation d'avocat – Obligation de secret instaurée par une loi ou par un décret (oui) – Communication (non)
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Ministre – Etude juridique – Consultation d'avocat – Obligation de secret instaurée par une loi ou par un décret (oui) – Communication (non)
[…],
Partie requérante,
CONTRE :
La Ministre de l’Energie, du Plan Air-Climat, du Logement et des Aéroports, Chaussée de Liège, 140-142, 5100 Jambes,
Partie adverse,
Vu l’article 32 de la Constitution,
Vu les articles 1er, alinéa 1er, et 8, § 1er, du décret du 30 mars 1995 relatif à la publicité de l’Administration (ci-après, le décret du 30 mars 1995),
Vu l’arrêté du Gouvernement wallon du 9 juillet 1998 fixant la composition et le fonctionnement de la Commission d’accès aux documents administratifs,
Vu le recours introduit par courrier recommandé le 25 mars 2025,
Vu la demande d’informations adressée à la partie adverse le 27 mars 2025 et reçue le 28 mars 2025,
Vu la réponse de la partie adverse du 14 avril 2025.
I. Objet de la demande
1. La demande porte sur la communication d’une copie de l’étude juridique précisant que « l’allocation-loyer, l’allocation d’attente de logement de son nom officiel, était apparentée à une aide sociale, qui est protégée par l’article 23 de la Constitution ». La partie requérante ajoute que « cette étude a conduit le Gouvernement (…) à adopter en date du 19 décembre 2024 un projet d’arrêté visant à confirmer le montant de base de l’allocation pour la période du 1er janvier 2025 au 31 décembre 2027 ».
II. Compétence de la Commission
2. La Commission est compétente pour connaître du recours.
III. Recevabilité du recours
3. L’article 8bis, alinéa 1er, du décret du 30 mars 1995 dispose comme il suit :
« Le recours devant la Commission peut être introduit par tout demandeur n'ayant pas obtenu satisfaction auprès de l'entité compétente par requête adressée au secrétariat de la Commission par lettre recommandée ou par tout autre moyen conférant date certaine à l'envoi et à la délivrance de cet envoi dans un délai de trente jours, qui en fonction du cas prend effet :
- le lendemain de la réception de la décision de rejet ;
- le lendemain de l'expiration du délai visé à l'article 6, § 5, ou à l'article 7, alinéa 2 ».
4. La demande initiale de publicité administrative a été adressée à la partie adverse le 7 février 2025.
La partie adverse n’y ayant pas donné suite, la demande a été rejetée implicitement le 9 mars 2025, en application de l’article 6, § 5, du décret du 30 mars 1995.
La partie requérante a introduit son recours auprès de la Commission le 25 mars 2025, soit dans le délai de 30 jours prévu à l’article 8bis, alinéa 1er, second tiret, du même décret.
Dès lors, le recours est recevable.
IV. Examen au fond
5. La Commission rappelle que tous les documents administratifs sont en principe publics. C'est le principe consacré à l'article 32 de la Constitution. Une entité ne peut refuser la publicité que dans la mesure où elle peut se baser sur l'un des motifs d'exception visés par les législations applicables et motiver sa décision de manière concrète et suffisante. Dans la mesure où ce n'est pas le cas, l’entité est tenue d’assurer la publicité des documents administratifs.
Dans le cadre de ses prérogatives de réformation, la Commission est elle-même compétente pour apprécier dans quelle mesure il y a lieu de faire droit à la demande d'accès au document administratif, en procédant, le cas échéant, à la mise en balance requise entre l’intérêt de la publicité des documents administratifs et l’intérêt protégé par le motif d’exception invoqué.
6. La Commission constate que la partie adverse n’a pas répondu dans le délai imparti à la demande d’informations qui lui a été adressée en application de l’article 8ter, alinéa 1er, du décret du 30 mars 1995.
Néanmoins, la partie adverse a, rapidement après l’expiration du délai susvisé, communiqué à la Commission des informations dont il y a lieu, pour des raisons de bonne administration, de tenir compte dans le cadre de l’examen du présent recours.
7. Le document sollicité est une étude juridique sur la compatibilité d’une suppression ou d’une réduction significative de l’allocation de loyer avec l’obligation de standstill découlant de l’article 23 de la Constitution (Parlement wallon – Session 2024-2025 – CRIC n° 65 – Énergie – Mardi 17 décembre 2024). Cette étude, adressée au cabinet de la ministre du Logement, est une consultation d’avocats.
8. La partie adverse justifie son refus de communiquer le document sollicité à la partie requérante par le fait que cette étude est un élément parmi d’autres lui permettant d’élaborer une évaluation des différents dispositifs d’allocations-loyer et une proposition au Gouvernement concernant les différents dispositifs d’allocations-loyers existants en Wallonie pour que ce dernier puisse statuer en la matière. Elle précise que cette étude n’emporte, à ce stade, ni un choix de sa part quant à une option plutôt qu’à une autre, et encore moins la décision finale du Gouvernement à cet égard. Elle en conclut qu’il n’est pas opportun de communiquer ce document de travail.
9. La circonstance que l’étude juridique sollicitée constitue un document de travail n’emportant à ce stade aucun choix de la ministre ou du Gouvernement dans la matière concernée n’est pas en soi un motif suffisant pour justifier un refus de communication du document sollicité.
10. Il appartient à la Commission de vérifier si une exception prévue dans la législation relative à la publicité de l’administration est susceptible de justifier la non-communication de ce document.
11. L’article 6, § 2, 2°, du décret du 30 mars 1995 dispose que l’entité « rejette la demande de consultation, d'explication ou de communication sous forme de copie d'un document administratif, qui lui est adressée en application du présent décret, si la publication du document administratif porte atteinte […] à une obligation de secret instaurée par une loi ou par un décret ».
Dès lors que l’étude juridique sollicitée est une consultation d’avocats, elle est protégée par le secret professionnel des avocats (article 458 du Code pénal)[1] Elle ne doit dès lors pas être communiquée à la partie requérante.
Par ces motifs, la Commission décide :
Le recours n’est pas fondé. Le document sollicité n’est pas communiqué.
[1] Voir Avis n° 320 du 14 mars 2023 de la CADA wallonne.