Gouverneur – Courrier – Délibération – Arrêté d’approbation – Zone de police – Demande manifestement abusive (non) – Communication d’office
[…],
Partie requérante,
CONTRE :
Le Gouverneur de la Province de Liège, Place Notger, 2 à 4000 Liège,
Partie adverse,
Vu l’article 32 de la Constitution,
Vu l’article 8, § 1er, du décret du 30 mars 1995 relatif à la publicité de l’Administration (ci-après, le décret du 30 mars 1995),
Vu l’article L3211-3, ainsi que les articles L3231-1 et suivants du Code de la démocratie locale et de la décentralisation (ci-après, le CDLD),
Vu l’arrêté du Gouvernement wallon du 9 juillet 1998 fixant la composition et le fonctionnement de la Commission d’accès aux documents administratifs,
Vu le recours introduit par courriel le 15 juin 2025,
Vu la demande d’informations adressée à la partie adverse le 18 juin 2025 et reçue le 19 juin 2025,
Vu la réponse de la partie adverse du 23 juin 2025.
« - Les courriers et délibérations (avec leurs annexes) des collèges et des conseils de la Zone de police Vesdre
- Les arrêtés d’approbation du Gouverneur ».
La partie requérante ajoute que sa demande porte sur « les conseils et collèges de la Zone de police Vesdre des mois de février, mars et avril 2025 ».
II. Compétence de la Commission
III. Recevabilité du recours
« L’autorité administrative provinciale ou communale qui ne peut pas réserver de suite immédiate à une demande de publicité ou qui la rejette communique dans un délai de trente jours de la réception de la demande les motifs de l’ajournement ou du rejet. En cas d’ajournement, le délai ne pourra jamais être prolongé de plus de quinze jours.
En cas d’absence de communication dans le délai prescrit, la demande est réputée avoir été rejetée ».
La partie adverse a explicitement rejeté la demande le 13 juin 2025.
La partie requérante a introduit son recours auprès de la Commission le 15 juin 2025, soit dans le délai de 30 jours prévu à l’article 8bis, alinéa 1er, premier tiret, du décret du 30 mars 1995, rendu applicable par l’article L3231-5, § 1er, du CDLD.
Dès lors, le recours est recevable.
IV. Examen au fond
Dans le cadre de ses prérogatives de réformation, la Commission est elle-même compétente pour apprécier dans quelle mesure il y a lieu de faire droit à la demande d'accès au document administratif, en procédant, le cas échéant, à la mise en balance requise entre l’intérêt de la publicité des documents administratifs et l’intérêt protégé par le motif d’exception invoqué.
Il s’ensuit qu’il est de règle que la partie adverse doit communiquer les documents demandés à la partie requérante, sous réserve des exceptions prévues à l’article 6 du décret du 30 mars 1995 et à l’article L3231-3 du CDLD, en ce compris les précisions qui suivent.
7. En l’espèce, si la partie adverse n’invoque pas expressément d’exception au droit à la publicité de l’administration, il découle toutefois de ses développements qu’elle s’interroge sur le caractère abusif de la demande. Elle explique à cet égard que « comme indiqué à l’intéressé, nous ne communiquerons pas les pièces demandées car je n’ai plus qu’un agent pour traiter les dossiers des 20 zones de police de la province. Ces dossiers sont prioritaires par rapport aux demandes qui nous semblent non fondées pour les raisons déjà évoquées à l’occasion des autres recours d’autant que les documents sont disponibles auprès de la zone de police concernée ».
« Sans préjudice des autres exceptions établies par la loi ou le décret pour des motifs relevant de l’exercice des compétences de l’autorité fédérale, de la Communauté ou de la Région, l’autorité administrative provinciale ou communale peut rejeter une demande de consultation, d’explication ou de communication sous forme de copie d’un document administratif dans la mesure où la demande :
[…]
3° est manifestement abusive ou répétée ».
La Commission rappelle qu’« une demande abusive est une demande qui nécessite pour y répondre un travail qui mette en péril le bon fonctionnement [de la commune]. Un simple surcroît de travail ne peut suffire à considérer une demande comme manifestement abusive »[1].
Il a, par ailleurs, été jugé par le Conseil d’Etat que :
« Peut être considérée comme manifestement abusive […], la demande dont le traitement a pour conséquence de compromettre le bon fonctionnement de l’autorité qui en est saisie. Toutefois, cette exception au droit d’accès, qui est un droit fondamental, est d’interprétation stricte et l’autorité qui entend l’opposer à la demande dont elle est saisie doit la fonder sur les éléments propres au cas d’espèce et aptes à justifier concrètement le recours à cette hypothèse légale d’exception. Ces éléments doivent ressortir de la motivation formelle de la décision de refus »[2].
En l’espèce, la partie adverse ne démontre pas de manière suffisamment concrète en quoi la demande de la partie requérante est abusive.
Enfin, l’exception relative à une demande « répétée » a été introduite par l’article 62 du décret du 26 avril 2012 modifiant certaines dispositions du Code de la démocratie locale et de la décentralisation. Si l’exposé des motifs[3] et le commentaire des articles[4] ne permettent pas d’en comprendre les motivations, il ressort en revanche de la discussion parlementaire[5] que, selon le Ministre, « il peut s’agir d’une demande exprimée plusieurs fois » ou encore que, selon un parlementaire, « si quelqu’un fait cinq fois la même réclamation, qu’il obtient une réponse et qu’il réitère sa demande, cela devient répété » ou que, selon un autre parlementaire, cela « vise le cas où la demande a reçu une suite positive et où on a simplement un citoyen qui répète sa demande alors qu’il a eu réponse. On vise à empêcher une personne de redemander quelque chose qui n’est pas abusif, mais auquel une réponse a été donnée ».
Eu égard à ce qui précède, la demande ne peut pas être qualifiée de « répétée ».
Par ces motifs, la Commission décide :
Le recours est fondé. La partie adverse communique à la partie requérante les documents sollicités, pour autant qu’ils existent et moyennant le respect des exceptions prévues à l’article 6 du décret du 30 mars 1995 et ce, dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la présente décision.
[1] Voy. avis n° 199 du 18 juin 2018 de la CADA wallonne.
[2] Voy. arrêt n° 250.170 du 19 mars 2021, A.S.B.L. Animal Rights.
[3] Exposé des motifs, Doc., Parl. w., 2011-2012, n° 567/1, p. 2.
[4] Commentaire des articles, Doc., Parl. w., 2011-2012, n° 567/1, p. 13.
[5] Rapport, Doc., Parl. w., 2011-2012, n° 567/10, p. 43.