11 juillet 2011 - Arrêté royal relatif aux dispositifs de sécurité des passages à niveau sur les voies ferrées
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RAPPORT AU ROI
Sire,
Le projet d'arrêté royal que j'ai l'honneur de soumettre à la signature de votre Majesté a pour but d'abroger l'arrêté royal du 2 août 1977 relatif aux dispositions de sécurité et à la signalisation des passages à niveau et d'adopter de nouvelles dispositions réglementaires en la matière.
1. Généralités
Ces dispositions complètent le cadre de lutte contre les accidents aux passages à niveau.
Elles visent l'amélioration de la signalisation aux passages à niveau et la réduction de certaines entraves administratives à l'établissement, la gestion et la suppression de passages à niveau privés.
En ce qui concerne l'amélioration de la signalisation, il est apparu que la catégorisation des passages à niveau (de 1 à 5) ne reflétait pas la diversité des situations rencontrées et présentait peu d'intérêt pratique pour la sensibilisation des usagers de la voie publique et les politiques publiques de préventions des accidents menées par l'Etat et la SA de droit public Infrabel (ci-après dénommée " Infrabel ").
Tout en conservant au Ministre un large pouvoir d'appréciation, l'arrêté royal en projet regroupe les passages à niveau en deux catégories fondamentales pour l'usager de la voie publique : ceux munis de signalisation active par opposition aux passages à niveau à signalisation passive.
En ce qui concerne les passages à niveau privés, des dispositions désuètes reconnaissaient au Ministre la faculté d'autoriser l'établissement des passages à niveau privés et d'en fixer la signalisation et les conditions d'utilisation.
Ces dispositions permettaient autrefois au Ministre d'autoriser l'établissement d'une infrastructure de passages à niveau sur le domaine public et étatique que constituaient les voies ferrées, et ceci à des fins privées.
En reconnaissant à Infrabel une mission de service public ayant pour objet " l'acquisition, la construction, le renouvellement, l'entretien et la gestion de l'infrastructure ferroviaire ", la loi du 21 mars 1991 (article 199, 1°) portant réforme de certaines entreprises publiques économiques a rendu ces dispositions définitivement désuète.
Depuis lors, il appartient à Infrabel d'autoriser, le cas échéant, l'établissement d'un passage à niveau qui sert à l'utilisation par des particuliers dans la mesure où celui-ci ne contrarie pas l'intérêt général à la circulation ferroviaire.
Il revient donc au Roi de modifier en ce sens sa réglementation. Pour le reste, le cadre réglementaire de la police de la circulation routière et ferroviaire est maintenue par rapport aux passages à niveaux qui sont établies sur ces voies à la demande des particuliers, mais qui en général, sont accessibles au public.
2. Commentaires auprès des dispositions
Le premier chapitre relatif aux définitions n'appelle pas de commentaire.
Le second chapitre délimite le champ d'application des dispositions, lequel ne se limite pas à la circulation croisant l'infrastructure ferroviaire relevant d'Infrabel.
Le troisième chapitre fixe le cadre normatif de signalisation qui complète pour l'essentiel les dispositions du code de la route (arrêté royal du 1er décembre 1975).
Les passages à niveaux privés font l'objet de mesures moins strictes qui se justifient par la plus faible circulation sur ces voies d'accès et par la nécessité de ne pas imposer à des particuliers des charges disproportionnées par rapport aux objectifs légitimes de sécurité.
En raison de l'affectation principale au transport de marchandises de ces portions des voies ferrées et de la vitesse réduite du trafic ferroviaire sur ceux-ci, les ports maritimes et fluviaux ainsi que les zonings industriels font également l'objet d'un traitement spécifique.
Le quatrième chapitre traite de la procédure de signalisation.
Le cinquième chapitre établit les modalités du contrôle périodiques des dispositifs de sécurités prescrits.
Le sixième chapitre détermine les dispositions finales.
L'abrogation expresse des actes existants qui sont incompatibles avec des dispositions nouvelles, est requise, non seulement pour assurer la cohérence du droit applicable mais aussi pour garantir la sécurité juridique. En effet, sans abrogation expresse, le lecteur ne saura jamais avec certitude quel sort il doit réserver aux dispositions existantes, et il sera obligé de déduire lui-même l'abrogation implicite des actes existants qui lui semblent incompatibles avec les dispositions nouvelles (Principes de technique législative - Guide de rédaction des textes législatifs et réglementaires, www.raadvst-consetat.be, recommandation n° 134).
L'article 16 fait application de cette recommandation.
Une période transitoire de dix ans est prévue pour faire basculer plus de 2000 passages à niveau vers la nouvelle réglementation.
Durant cette période transitoire, les arrêtés ministériels adoptés en vertu de l'article 21 de l'arrêté royal du 2 août 1977 conservent donc leur vigueur. Cependant, le remplacement, la modification ou la suppression d'un dispositif de sécurité est immédiatement soumis à la nouvelle réglementation en vertu de l'article 17.
Nous avons l'honneur d'être,
Sire,
de Votre Majesté,
les très respectueux
et très fidèles serviteurs,
Le Premier Ministre,
Y. LETERME
Le Secrétaire d'Etat à la Mobilité,
E. SCHOUPPE

Art. 1er.

Pour l'application des dispositions du présent arrêté, on entend par :

1° "passage à niveau public" : le croisement total ou partiel de plain-pied d'une voie publique par une ou plusieurs voies ferrées établies en dehors de la chaussée;

2° "gestionnaire de la voie ferrée" : la personne morale de droit privé ou de droit publique ou la personne physique tenue de la gestion et de l'entretien ou du renouvellement de l'infrastructure ferroviaire sur la ligne ou le raccordement où se situe un passage à niveau par ou en vertu de la loi, ou à défaut de cette personne morale ou physique, le propriétaire de la voie ferrée ou du raccordement où se situe le passage à niveau;

3° "passage à niveau privé" : le croisement total ou partiel de plain-pied d'une voie publique ou d'une voie privée par une ou plusieurs voies ferrées établies en dehors de la chaussée, et qui étais créé dans l'intérêt de particuliers;

4° "passage à niveau à signalisation active" : un passage à niveau dont la signalisation avertit les usagers du passage à niveau de l'approche et/ou du passage d'un train;

5° "passage à niveau à signalisation passive" : un passage à niveau dont la signalisation n'avertit les usagers du passage à niveau ni de l'approche ni du passage d'un train;

6° "système à fermeture complète" : un système, situé de part et d'autre de la ou des voies ferrées, qui ferme complètement la voie publique ou privée;

7° "système à fermeture partielle" : un système, situé de part et d'autre de la ou des voies ferrées, qui ferme partiellement la voie publique ou privé;

8° "système à fermeture supplémentaire pour piétons et cyclistes" : un système, situé d'un côté de la ou des voies ferrées, qui ferme complètement un trottoir ou une piste cyclable ou les deux ensemble;

9° "système de détection d'obstacle" : un système qui permet de détecter qu'aucun obstacle se trouve à l'intérieur d'un passage à niveau protégé par un système à fermeture complète;

10° "dispositif de sécurité" : tout élément destiné à prévenir du risque de collision ou accident à un passage à niveau et dont la mise en oeuvre est prescrite par des dispositions légales, réglementaires ou des dispositions à portée individuelle, en ce compris la signalisation;

11° "signal lumineux de circulation d'interdiction de passage" : le signal à feux clignotants tel que défini à l'article 64.2 du code de la route;

12° "signal lumineux de circulation d'autorisation de passage" : le signal à feu clignotant tel que défini à l'article 64.3 du code de la route;

13° "signal routier" : le signal routier tel que défini aux articles 65 et suivants du code de la route;

14° "signal d'indication" : le signal routier de catégorie F visé à l'article 71 du code de la route;

15° "Ministre" : le ministre qui a le transport ferroviaire dans ses attributions;

16° "code de la route" : l'arrêté royal du 1er décembre 1975 portant règlement général sur la police de la circulation routière et de l'usage de la voie publique;

17° "administration" : le Service public fédéral Mobilité et Transports.

Art. 2.

§1er. Sont soumis aux dispositions du présent arrêté les passages à niveau situés sur :

1° les voies ferrées qui relèvent du gestionnaire de l'infrastructure ferroviaire visé par la loi du 19 décembre 2006 relative à la sécurité d'exploitation ferroviaire;

2° les lignes désaffectées qui sont la propriété de la [1 SNCB ou d'Infrabel]1 et qui sont concédées à des tiers en vue de leur exploitation touristique;

3° les voies ferrées privées et raccordements privés, destinés au transport de marchandises;

4° les voies ferrées et raccordements réservés exclusivement à l'utilisation militaire.

§2. Le présent arrêté n'est pas d'application :

1° aux métros, aux tramways et à d'autres systèmes ferroviaires urbains et régionaux faisant usage de light rail ou de tout autre mode lié au rail, pour autant que ces derniers ne circulent pas sur le réseau ferroviaire;

2° aux traversées des voies dans les gares et les points d'arrêt non-gardés;

3° aux voies ferrées à l'écartement de moins d'un mètre.

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(1)(AR 2013-12-11/03, art. 58, 002; En vigueur : 01-01-2014 ou à une date ultérieure fixée par le Roi et au plus tard le 1er avril 2014)

Art. 3.

Les passages à niveau à signalisation active sont équipés, de part et d'autre et à droite du passage à niveau, des dispositifs de sécurité suivants :

1° le signal routier A 45 ou A 47;

2° a) le signal lumineux de circulation d'interdiction de passage, ou b) les signaux lumineux de circulation tels que visés aux articles 61 à 64.1 du code de la route.

Art. 4.

Ces mêmes passages à niveau peuvent être équipés des dispositifs de sécurité suivants :

1° a) le système à fermeture complète équipé d'un système de détection d'obstacle, ou b) le système à fermeture partielle;

2° un ou plusieurs systèmes à fermeture supplémentaires pour piétons et cyclistes;

3° un ou plusieurs signaux sonores. Le Ministre peut décider de diminuer la puissance sonore de ces signaux sonores ou de dispenser de leur fonctionnement dans les plages horaires qu'il détermine;

4° un ou plusieurs signaux routiers A 45 ou A 47 supplémentaires;

5° un ou plusieurs signaux lumineux de circulation d'interdiction de passage supplémentaires;

6° pour chaque signal lumineux de circulation d'interdiction de passage, le signal lumineux de circulation d'autorisation de passage.

Art. 5.

Les feux des signaux lumineux de circulation autres que ceux définis à l'article 1er, 11° et 12° sont synchronisés avec la circulation des véhicules ferroviaires.

Art. 6.

Les passages à niveau à signalisation passive sont équipés, de part et d'autre et à droite du passage à niveau, du signal routier A 45 ou A 47 et peuvent être équipés d'un ou plusieurs signaux routiers A 45 ou A 47 supplémentaires.

Art. 7.

§1er. Tout passage à niveau privé est annoncé de part et d'autre et à droite du passage à niveau privé par un signal d'indication avec la mention " passage à niveau privé ".

§2. Les passages à niveau privés sont équipés :

1° soit par une signalisation visée à la section 1re et qui peut être complétée avec un système qui ferme entièrement le passage à niveau;

2° soit par une signalisation visée à la section 2 et qui peut être complétée avec un système qui ferme entièrement le passage à niveau.

Art. 8.

Les passages à niveau privés à signalisation active ou passive peuvent être signalés à distance :

1° soit par le signal routier A 41 si le passage à niveau privé est équipé d'un système qui ferme entièrement ou partiellement le passage à niveau;

2° soit par le signal routier A 43 si le passage à niveau privé n'est pas équipé d'un système qui ferme entièrement ou partiellement le passage à niveau.

Art. 9.

Les usagers de la voie publique ou de la voie privée doivent se conformer à la signalisation décrite dans le présent arrêté dès qu'elle est régulière en la forme et suffisamment visible.

Art. 10.

Les passages à niveau établis dans les ports maritimes ou fluviaux et dans les zonings industrielles ne doivent pas être équipés de dispositifs de sécurité.

Toutefois, compte-tenu de la situation des lieux et des dangers qu'elle comporte, le Ministre peut imposer le placement de dispositifs de sécurité.

Art. 11.

§1er. Le Ministre détermine les dispositifs de sécurité d'un passage à niveau public ou privé conformément au chapitre 3 et fixe le délai dans lequel les dispositifs de sécurité doivent être placés.

§2. Le Ministre peut adopter des normes techniques relatives aux dispositifs de sécurité.

Art. 12.

§1er. Les dossiers proposant l'établissement, la modification ou la suppression d'un dispositif de sécurité relatif à un passage à niveau public ou privé sont introduits auprès du Ministre par le gestionnaire de la voie ferrée concernée.

§2. Ce dossier contient toutes les informations, en ce compris un croquis des lieux, nécessaires à l'analyse de la proposition et à la prise de décision par le Ministre.

Art. 13.

§1er. Le gestionnaire de la voie ferrée avertit le gestionnaire de la voie publique ou de la voie privée de toute modification des dispositifs de sécurité d'un passage à niveau public ou privé existant et ceci avant la réalisation de cette modification.

§2. Le gestionnaire de la voie ferrée qui planifie de réaliser ou de faire réaliser pour son compte, des travaux qui vont obstruer temporairement la circulation sur le passage à niveau public ou privé, en avertit le gestionnaire de la voie publique et/ou les particuliers, à la demande desquels le passage à niveau privé a été créé, au moins cinq semaines avant la date prévue de l'obstruction. Il indique aussi la durée prévue de l'obstruction.

Art. 14.

§1er. L'administration et le gestionnaire de la voie ferrée procèdent conjointement à des contrôles périodiques de tous les passages à niveau. Ce contrôle porte sur la vérification visuelle de conformité des dispositifs de sécurité et donne lieu à l'établissement d'un rapport écrit.

§2. En dehors des contrôles périodiques conjoints, l'administration peut procéder, à tout moment, au contrôle visuel des dispositifs de sécurité d'un passage à niveau. Ce contrôle donne lieu à l'établissement d'un rapport écrit. L'administration informe le gestionnaire de la voie ferrée des constatations et fixe le délai dans lequel les mesures adéquates doivent être mises en oeuvre.

Art. 15.

L'arrêté royal du 2 août 1977, relatif aux dispositions de sécurité et à la signalisation des passages à niveau, est abrogé.

Art. 16.

Les arrêtés ministériels adoptés en vertu de l'article 21 de l'arrêté royal du 2 août 1977 relatif aux dispositions de sécurité et à la signalisation des passages à niveau sont abrogés de plein droit dix ans après l'entrée en vigueur du présent arrêté.

Art. 17.

Le remplacement, la modification ou la suppression d'un dispositif de sécurité d'un passage à niveau public ou privé est soumis de plein droit aux dispositions du présent arrêté.

Art. 18.

Le Ministre qui a la Circulation routière dans ses attributions et le Ministre qui a le Transport ferroviaire dans ses attributions sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent arrêté.

ALBERT

Par le Roi :

Le Premier Ministre,

Y. LETERME

Le Secrétaire d'Etat à la Mobilité,

E. SCHOUPPE