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11 septembre 1985 - Décret organisant l'évaluation des incidences sur l'environnement dans la Région wallonne
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Le Conseil Régional Wallon a adopté et Nous, Exécutif, sanctionnons ce qui suit:

Art. 1er.

Pour l'application du présent décret, on entend par:

1. Système d'évaluation des incidences sur l'environnement: l'ensemble des procédures du présent décret et de ses arrêtés d'application organisant, préalablement à toute autorisation, la prise en considération comme élément de décision, des incidences des projets sur l'environnement.

2. Projet: toute opération, activité, ouvrage, construction, démolition, transformation, extension ou désaffection d'installations, programme ou plan modifiant l'environnement, dont la réalisation est envisagée par une personne physique ou morale, de droit public ou privé.

3. Incidences sur l'environnement: les effets directs et indirects, à court, moyen et long terme d'un projet sur l'environnement.

4. Autorisation:

– les permis accordés en vertu de la réglementation des établissements, classés comme dangereux, insalubres ou incommodes, en ce qui concerne la protection des voisins et de l'environnement;

– les permis accordés en vertu des articles 41, 45 et 53 du Code wallon de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme;

– les actes administratifs, énumérés par l'Exécutif, pris en application des lois, décrets et règlements, décidant de réaliser ou de permettre de réaliser un projet en tout ou partie.

5. Notice d'évaluation préalable des incidences sur l'environnement: le document synthétisant les principaux paramètres écologiques du projet, réalisé lors de la première phase du système d'évaluation et permettant de déterminer les projets devant faire l'objet d'une étude d'incidences sur l'environnement.

6. Rapport d'incidences: le document d'évaluation et de synthèse destiné à éclairer la décision relative à un projet.

7. Etude d'incidences: l'étude scientifique réalisée par une personne agréée, à la demande de l'autorité compétente.

8. Système de normes d'évaluation: l'ensemble des normes, listes, critères de décision, directives et recommandations arrêtés conformément au présent décret et s'imposant à l'autorité compétente, dans le respect des normes légales générales et sectorielles visées à l'article 6 de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles.

9. Autorité compétente: tout organe délibérant ou non, doté ou non de la personnalité juridique, chargé d'une mission de service public et habilité à délivrer l'autorisation visée au présent article.

10. Exécutif: l'Exécutif de la Région wallonne.

Art. 2.

La mise en oeuvre des procédures prévues par le présent décret doit avoir principalement pour but:

– de protéger et d'améliorer la qualité du cadre de vie et des conditions de vie de la population, pour lui assurer un environnement sain, sûr et agréable;

– de gérer le milieu de vie et les ressources naturelles de façon à préserver leurs qualités et utiliser rationnellement et judicieusement leurs potentialités;

– d'instaurer entre les besoins humains et le milieu de vie un équilibre qui permette à l'ensemble de la population de jouir durablement d'un cadre et de conditions de vie convenables.

Art. 3.

Il est institué, dans la Région wallonne, un système d'évaluation des incidences des projets sur l'environnement.

Art. 4.

La délivrance de toute autorisation est subordonnée à la mise en oeuvre du système d'évaluation des incidences sur l'environnement prévu par le présent décret.

Si plusieurs autorisations sont requises, un seul système d'évaluation des incidences sera prévu pour autant qu'il soit relatif à tous les aspects des autorisations indispensables à la bonne fin du projet.

L'Exécutif détermine, par des normes générales, les conditions d'application du présent article.

Art. 5.

L'autorité compétente et le juge administratif peuvent prononcer la nullité de toute autorisation délivrée en contradiction avec les dispositions de l'article 4, alinéa 1er.

La nullité doit en tout cas être prononcée dans les cas suivants:

– en cas d'absence de notice d'évaluation lorsqu'il n'y a pas eu d'étude d'incidences;
– en cas de violation d'une des dispositions de l'article 15;
– en cas d'absence d'étude d'incidences lorsqu'elle était prévue par l'article 10, §4 du présent décret;
– lorsque la personne chargée de l'étude n'était pas agréée;
– en cas d'absence de résumé non technique.

L'article 68 de la loi du 29 mars 1962 organique de l'aménagement du territoire et de l'urbanisme est applicable.

Art. 6.

L'autorisation et le refus d'autorisation doivent être motivés en regard notamment des incidences sur l'environnement et des objectifs précisés à l'article 2.

Art. 7.

Toute demande d'autorisation comporte une notice d'évaluation préalable des incidences du projet sur environnement.

Art. 8.

L'Exécutif détermine les formes et le contenu minimum de la notice d'évaluation préalable des incidences sur l'environnement.

Art. 9.

L'Exécutif arrête un système de normes d'évaluation permettant de déterminer les cas où les incidences d'un projet risquent d'être importantes.

Les projets visés à l' annexe I font d'office l'objet d'une étude d'incidences.

Art. 10.

§1er. L'autorité compétente apprécie les incidences du projet sur l'environnement en prenant en considération la notice d'évaluation préalable et toute autre information qu'elle juge utile.

La décision de l'autorité intervient dans les trente jours à dater de la réception par celle-ci de la notice d'évaluation. Passé ce délai, l'autorité est réputée dispenser le projet du reste de la procédure d'évaluation.

§2. Lorsque l'autorité compétente juge les incidences sur l'environnement peu importantes, le projet est dispensé du reste de la procédure d'évaluation.

§3. Lorsqu'elle estime ne pas disposer des informations requises, l'autorité compétente notifie au demandeur en autorisation, dans le délai prévu au §1er, le genre d'informations complémentaires qu'il doit fournir.

Elle statue dans les trente jours de la réception des informations complémentaires. Passé ce délai, l'autorité est réputée dispenser le projet de la procédure d'évaluation.

§4. Lorsqu'elle estime que les incidences risquent d'être importantes ou lorsque le présent décret ou toute autre réglementation le prévoit, l'autorité compétente prescrit l'établissement d'une étude d'incidences sur l'environnement.

§5. L'auteur du projet choisit une personne agréée en vertu de l'article 11 pour réaliser l'étude. L'Exécutif détermine les cas où, pour la réalisation d'une étude, une personne agréée peut être récusée.

§6. L'Exécutif détermine les modalités d'application du présent article.

Art. 11.

§1er. Il est établi un conseil dénommé « Conseil wallon de l'Environnement ». L'Exécutif en fixe les règles de composition et de fonctionnement; ce Conseil a pour mission de réaliser les tâches qui lui sont confiées par le présent décret, ainsi que celles qui peuvent lui être confiées par l'Exécutif ou par d'autres réglementations.

§2. L'Exécutif agrée, selon les critères et une procédure qu'il détermine, les personnes physiques et morales qui peuvent être chargées d'effectuer des études d'incidences sur l'environnement; il détermine les règles d'octroi et de retrait de l'agrément. L'agrément peut, notamment, être retiré temporairement ou définitivement, lorsqu'après un premier avertissement dûment notifié, l'Exécutif constate la qualité manifestement médiocre d'une étude. Le Conseil wallon de l'Environnement doit être consulté avant tout retrait d'agrément.

Art. 12.

§1er. Les frais qui incombent aux autorités publiques du fait de l'application du présent article et des articles 13 à 17, incombent au demandeur de l'autorisation.

L'Exécutif détermine le mode de calcul de ces frais, les modalités et détails de paiement; il peut instituer une procédure de recours relative à la fixation du montant.

§2. Pour les projets soumis à autorisation et envisagés par des personnes de droit public, l'étude d'incidences est précédée d'une phase de consultation du public. L'Exécutif détermine les modalités de cette consultation et les mesures destinées à en informer préalablement le public.

Le but de cette phase est de susciter l'apparition d'alternatives au projet initial. Ces alternatives pourront viser la localisation, la technique d'exécution, les méthodes de résolution du problème, la finalité même du projet. Ces alternatives sont communiquées à la personne chargée de l'étude, selon une procédure que l'Exécutif arrête.

L'Exécutif pourra déroger à cet article à l'égard des entreprises publiques exerçant leur activité en concurrence avec des personnes de droit privé.

Art. 13.

L'autorité compétente établit le contenu et les modalités de l'étude d'incidences en fonction de l'importance et de la nature des incidences du projet sur l'environnement.

Le Conseil wallon de l'Environnement ou son délégué, a le droit d'obtenir toute information sur le déroulement de l'étude d'incidences, auprès des autorités publiques concernées et de la personne qui réalise l'étude. Il peut adresser à l'Exécutif toutes observations ou suggestions utiles concernant l'étude d'incidences.

Art. 14.

Les informations à fournir par le maître de l'ouvrage dans le cadre de l'étude prévue à l'article 13 comportent au minimum:

– une description du projet comportant des informations relatives à son site, à sa conception et à ses dimensions;
– les données nécessaires pour identifier et évaluer les effets principaux que le projet est susceptible d'avoir sur l'environnement;
– une description des mesures envisagées pour éviter et réduire des effets négatifs importants, et, si possible, y remédier;
– un résumé non technique des rubriques mentionnées ci-dessus.

Art. 15.

Le résumé non technique de l'étude est rendu public. L'autorité compétente procède à une enquête publique. L'Exécutif arrête les modalités de cette enquête.

Art. 16.

Un dossier accessible au public peut être consulté, aux heures ouvrables, à un endroit que l'autorité compétente désigne. Ce dossier comprend l'étude en original ou copie certifiée conforme par l'auteur, copie des avis et correspondances adressées par les citoyens et les différents services ou organismes concernés. Les correspondances adressées et les avis écrits remis à l'autorité, dans le cadre de l'enquête publique, sont, dès leur réception, insérés par celle-ci dans le dossier.

Art. 17.

L'autorisation visée à l'article 1er ou le refus d'autorisation sont motivés et notifiés au demandeur dans les trente jours à dater de la publication du rapport d'incidences sur l'environnement.

La publication de cette décision est réalisée dans les 15 jours de cette notification selon les modalités déterminées par l'Exécutif.

Art. 18.

Tout qui fera entrave à l'exercice de l'enquête publique ou soustraira à l'examen du public des pièces du dossier visé à l'article 16 sera puni d'un à six mois d'emprisonnement et d'une amende de 100 à 250 francs ou d'une de ces peines seulement.

Les personnes chargées de l'étude d'incidences sont assimilées à des « personnes chargées d'un service public » pour l'application du Titre IV, chapitre IV du Code pénal réprimant la corruption.

Art. 19.

L'observation des délais prévus par le Titre III pour satisfaire à l'étude des incidences sur l'environnement a pour effet d'empêcher l'application des autres délais légaux et réglementaires qui s'imposent à l'autorité compétente pour la délivrance des autorisations.

L'alinéa premier ne vise pas les délais de recours contre les décisions ou l'absence de décision de l'autorité compétente, prévus par les lois, décrets et règlements.

Art. 20.

La prescription, par l'autorité compétente, de l'établissement d'une étude des incidences sur l'environnement en vertu de l'article 10, §4, a pour effet d'empêcher la mise en oeuvre des dispositions relatives à l'enquête publique et aux mesures particulières de publicité contenues dans d'autres lois, décrets et règlements.

Art. 21.

Si une requête déposée devant une autorité administrative ou juridictionnelle contre une autorisation est fondée sur le non-respect des règles du système d'évaluation des incidences des projets sur l'environnement, l'autorité saisie peut ordonner même d'office le sursis à exécution de la décision attaquée, en statuant de toute urgence.

L'arrêt n°40/92 de la Cour d'arbitrage du 13 mai 1992 a annulé les mots « ou juridictionnelle » dans ce paragraphe premier.

L'Exécutif peut arrêter les règles relatives à la durée du sursis à exécution, à sa levée, ainsi qu'aux modalités d'application de l'alinéa précédent.

L'arrêt n°41/90 de la Cour d'arbitrage du 21 décembre 1990 a statué sur une question préjudicielle portant sur cet article.

Art. 22.

Les dispositions du présent décret entrent en vigueur à la date fixée par l'Exécutif, et au plus tard deux ans après sa publication au Moniteur belge . Il ne sera cependant pas applicable aux demandes d'autorisation introduites avant la date d'entrée en vigueur, sauf dans les cas particuliers où l'Exécutif le rend applicable par décision motivée.

Annexe I

1. Raffinerie de pétrole brut (à l'exclusion des entreprises fabriquant des lubrifiants à partir de pétrole brut) ainsi que les installations de gazéification et de liquéfaction d'au moins 500 tonnes de charbon et de schiste bitumineux par jour.
2. Centrales thermiques et autres installations de combustion d'une puissance calorifique d'au moins 300 MW ainsi que les centrales nucléaires et autres réacteurs nucléaires (à l'exception des installations de recherche pour la production et la transformation des matières fissiles et fertiles dont la puissance maximale ne dépasse pas 1 KW de durée permanente thermique).
N.B. L'arrêt n°54 de la Cour d'arbitrage du 24 mai 1988 a annulé dans ce point 2 les mots « ainsi que les centrales nucléaires et autres réacteurs nucléaires (à l'exception des installations de recherche pour la production et la transformation des matières fissiles et fertiles dont la puissance maximale ne dépasse pas 1 KW de durée permanente thermique) », dans la mesure où le système d'évaluation instauré par le décret est susceptible d'être rendu applicable, relativement à de telles installations, aux autorisations relevant de l'Etat.3. Installations servant exclusivement à stocker en permanence ou à éliminer définitivement des déchets radioactifs.
N.B. L'arrêt n°54 de la Cour d'arbitrage du 24 mai 1988 a annulé ce point 3, dans la mesure où le système d'évaluation instauré par le décret est susceptible d'être rendu applicable, relativement à de telles installations, aux autorisations relevant de l'Etat.4. Usines intégrées de première fusion de la fonte et de l'acier.
5. Installations destinées à l'extraction d'amiante ainsi qu'au traitement et la transformation d'amiante et de produits contenant de l'amiante: pour les produits en amiante-ciments, une production annuelle de plus de 20 000 tonnes de produits finis; pour les garnitures de friction, une production annuelle de plus de 50 tonnes de produits finis; pour les autres utilisations de l'amiante, une utilisation de plus de 200 tonnes par an.
6. Installations chimiques intégrées.
7. Construction d'autoroutes, de voies rapides, de voies pour le trafic à grande distance des chemins de fer ainsi que d'aéroports dont la piste de décollage et d'atterrissage a une longueur de 2 100 mètres ou plus.
8. Ports de commerce maritime ainsi que les voies navigables et les ports de navigation intérieure permettant l'accession de bateaux supérieurs à 1 350 tonnes.
9. Installations d'élimination des déchets toxiques et dangereux par incinération, traitement chimique ou stockage à terre.
N.B. L'arrêt n°54 de la Cour d'arbitrage du 24 mai 1988 a annulé dans ce point 2 les mots « ainsi que les centrales nucléaires et autres réacteurs nucléaires (à l'exception des installations de recherche pour la production et la transformation des matières fissiles et fertiles dont la puissance maximale ne dépasse pas 1 KW de durée permanente thermique) », dans la mesure où le système d'évaluation instauré par le décret est susceptible d'être rendu applicable, relativement à de telles installations, aux autorisations relevant de l'Etat.